Parmi les « nouveaux outils de prévention » de la transmission du VIH Virus de l’immunodéficience humaine. En anglais : HIV (Human Immunodeficiency Virus). Isolé en 1983 à l’institut pasteur de paris; découverte récemment (2008) récompensée par le prix Nobel de médecine décerné à Luc montagnier et à Françoise Barré-Sinoussi. figurent, outre la circoncision, la prophylaxie post-exposition (PEP : prendre un traitement antirétroviral immédiatement après un acte possiblement exposant au VIH), l’utilisation du traitement anti-VIH comme outil de prévention communautaire (TasP : plus les gens dans une communauté sont traités et bien traités moins le virus circule) et une stratégie appelée Prophylaxie pré-exposition ou PrEP Prophylaxie Pré-Exposition. La PrEP est une stratégie qui permet à une personne séronégative exposée au VIH d'éliminer le risque d'infection, en prenant, de manière continue ou «à la demande», un traitement anti-rétroviral à base de Truvada®. C’est-à-dire : encadrer avec des antirétroviraux des activités sexuelles à risques et ce qu’elle que soit la raison de l’exposition aux risques (refus du préservatif , mauvais usage du préservatif ou non accès, prises de drogues concomitantes, sexe tarifé…)
La stratégie PrEP repose sur des données scientifiques et médicales établies : les antirétroviraux sont utilisés avec succès pour réduire le risque de transmission du virus de la mère à l’enfant depuis 1994 (aujourd’hui, ce risque est inférieur à 1% en France). Ils sont également employés pour réduire le risque d’être infecté en cas d’exposition accidentelle au virus (traitement d’urgence post-exposition). Par ailleurs, en ce qui concerne l’exposition sexuelle, des études expérimentales récentes chez le singe ont montré une bonne efficacité de ces traitements préventifs après inoculation du virus par voie sexuelle. Nous analysons ici les principaux essais de PrEP et leurs résultats.
CAPRISA 004
La population de l’essai CAPRISA 04 était constituée de 899 femmes de 18 à 40 ans de la région du KwaZulu-Natal, en Afrique du sud et en zone urbaine. Dans cette région la prévalence Nombre de personnes atteintes par une infection ou autre maladie donnée dans une population déterminée. du VIH touchant les femmes est parmi l’une des plus élevées au monde. Chez les jeunes filles de moins de 16 ans, elle est de 10%. Chez les femmes de plus de 24 ans, de 50%. Moins de 5% des partenaires sexuels des femmes impliquées dans l’étude étaient circoncis… Dans l’étude CAPRISA 004, 445 femmes ont reçu du gel de ténofovir, 444 du gel placebo Substance inerte, sans activité pharmacologique, ayant la même apparence que le produit auquel on souhaite le comparer. (NDR rien à voir avec le groupe de rock alternatif formé en 1994 à Londres par Brian Molko et Stefan Olsdal.) Le gel est liquide, transparent, a peu d’odeur ; il est assez comparable à un lubrifiant. Il s’applique au moyen d’un applicateur en forme de petite canule fournie avec le gel. Il a été en règle très bien toléré. Les incidents constatés ne sont pas attribuable au ténofovir, car ils sont survenus à égalité dans les 2 groupes. Le taux de rétention est bon, puisqu’on comptait, après correction, 422/445 femmes dans le bras utilisation du gel avec ténofovir et 421/444 dans le bras placebo. L’adhérence à la stratégie retenue, une application dans les 12 heures avant le rapport et une autre dans les 12 heures après, était moyenne puisque 40% des femmes utilisaient le gel moins d’une fois sur deux. Les résultats indiquent que ce gel microbicide de 3e génération contenant du ténofovir, réduit de 39% (IC 95 % : 6-60% le risque d’infection au VIH par rapport à un placebo. L’incidence du VIH a été de 54% plus basse chez les femmes qui faisaient une bonne utilisation du gel . Il n’a été noté aucun changement dans les pratiques sexuelles, mise à part une légère augmentation de l’utilisation des préservatifs dans les deux bras de l’étude. Et notamment pas de phénomène de désinhibition, c’est à dire d’augmentation des pratiques à risques sous prétexte d’accéder à de nouveaux outils de prévention jugés avant résultats comme efficace. Il n’a pas été retrouvé de résistance au ténofovir chez les femmes qui ont été contaminée par le VIH.
iPrEx
L’essai iPrEx concernait des hommes — et des transgenres— ayant des relations sexuelles avec des hommes. Cet essai randomisé a été mené sous l’égide des NIH, avec le financement de la Fondation Gates. Il s’est déroulé à partir de 2004 au Pérou, au Brésil, en Equateur, aux Etats-Unis, en Afrique du Sud et en Thaïlande. Deux mille quatre cents quatre vingt dix neufs personnes ont accepté d’y participer et ont pris chaque jour un traitement oral: Truvada® (Gilead) ou placebo. Les personnes ont été suivies en moyenne 1,2 ans. IpreX démontre que le risque d’infection est réduit de 44% (dans un intervalle de confiance de 15 à 63%) chez les hommes ayant pris le Truvada®. Il s’agissait d’une population plutôt jeune et à haut niveau de risque.
Les études pharmacologiques dosant la présence ou l’absence du médicament (Truvada®) dans le sang chez ceux qui ont sont censés le prendre, montrent que beaucoup de ne le prennent pas (50 à 60%) mais que l’efficacité observée est directement liée à l’efficacité des molécules anti-VIH. Quand le médicament (ténofovir et emtricitabine) est détectable dans le sang, la réduction du risque est de 92% (IC : 40-99%), suggérant le rôle fondamental de l’adhérence au traitement préventif. La tolérance au traitement dans cet essai a été globalement satisfaisante et il n’a pas été observé de sélection de résistance parmi les sujets contaminés au cours de l’essai alors qu’ils recevaient le Truvada®. Qui plus est la prise de médicaments n’a pas modifié les comportements dans le sens d’une exposition accrue au risque. Les hommes de cet essai ont réduit leur exposition au risque sexuel par rapport à la période précédant leur entrée dans l’étude. Malgré cela, l’incidence reste très élevée, autour de 3,3% de contaminations/an.
L’efficacité fut moins bonne qu’attendue (les auteurs espéraient démontrer une efficacité d’au moins 30%) mais ont suscité aussi un certain nombre d’interrogations quant à la population ayant participé à l’essai (surtout en Amérique du Sud, sujets très jeunes, beaucoup de sexe tarifé et de prise importante d’alcool), de la survenue de deux cas de résistance du VIH au FTC chez les deux volontaires déjà infectés à l’inclusion et randomisés dans le bras Truvada®, et de l’incertitude sur la tolérance à long terme de cette stratégie et sur son coût-efficacité .
La suite de Iprex en roll-over (iPrEx-OLE) a permis de suivre l’efficacité et la tolérance à plus long terme, ainsi que l‘impact sur les comportements sexuels de la prise en ouvert de Truvada® après démonstration de son efficacité dans l’essai randomisé initial. IprEx-OLE (pour Open Label extension) est une étude observationnelle menée sur 1 600 hommes ou femmes trans de l’essai IPrEx Parmi eux. 76% ont accepté d’emblée ou de manière différée la prise quotidienne, tandis que le reste a choisi de participer à l’étude sans recevoir de traitement [Réf. OLE]
Grâce à un test au buvard de la concentration en antirétroviral, les auteurs de l’essai ont pu mesurer selon le nombre de prises hebdomadaire le taux plasmatique du médicament rapporté à l’incidence). Dès trois prises par semaine, l’incidence tombe à 0,6% soit une réduction du risque de contamination VIH de plus de 90%. Et pour quatre prises par semaine et plus, aucun des participants à IPrEx ne s’est contaminé.
Selon l’équipe de chercheurs, la demande de la PrEP au sein de la cohorte est particulièrement forte, preuve que cet outil est bien accepté dans une population lorsque celle-ci est prise en charge. Mieux encore, ils ont constaté que l’observance au traitement préventif était plus élevé chez les hommes ou femmes trans qui indiquaient avoir régulièrement des sodomies passives sans préservatif, plus de partenaires sexuels et des antécédents d’IST. Chez les participants qui ont refusé la PrEP, près de 50% déclarent l’avoir déclinée par crainte des effets indésirables. L’étude indique également que même si la consommation de drogues et d’alcool n’était pas associée à une baisse de l’observance, l’engagement durable dans la PrEP devra certainement être soutenu par d’autres dispositifs d’accompagnement. Par ailleurs il n’y a pas de signe de « compensation du risque » dans IprEx-OLE, qui a comparé les pratiques sexuelles entre les groupes, avec ou sans PrEP, mais aussi l’incidence de la syphilis, un marqueur important de pratiques favorisant l’infection par le VIH, incidence qui est comparable dans les deux groupes.
FemPrep
Une étude évaluant l’efficacité de la prophylaxie pré-exposition comme moyen de prévention chez les femmes africaines séronégatives, cette fois, a été arrêté précocement en Avril 2011. Les premiers chiffres montraient le même taux de contamination dans le bras placébo et dans le bras recevant le Truvada®.
L’étude était menée par l’organisation Family Health International (FHI) en partenariat avec des chercheurs africains, concernait 1.951 femmes séronégatives du Kenya, de Tanzanie et d’Afrique du Sud. Cette région du monde est l’une des plus touchées par le VIH. Avant l’étude, 21% des femmes candidates, âgées de 18 à 35 ans, étaient séropositives pour le VIH et, à ce titre, non recrutées pour le programme. Les participantes recevaient de manière quotidienne le Truvada® ou un placebo. L’étude était financée par l’Agence des États-Unis pour le développement international et par la fondation Bill et Melinda Gates.
Le taux de contamination chez les participantes à l’étude était de 5%, avec autant de contaminations dans les deux bras: 28 dans le groupe recevant du Truvada® et 28 dans celui recevant du placébo. Pour les responsables du projet, ces chiffres ne démontrent pas l’inefficacité du Truvada® en PrEP dans cette population. Néanmoins, ils ont décidé d’arrêter définitivement le programme. Plusieurs raisons expliqueraient ces résultats : une mauvaise observance L’observance thérapeutique correspond au strict respect des prescriptions et des recommandations formulées par le médecin prescripteur tout au long d’un traitement, essentiel dans le cas du traitement anti-vih. (On parle aussi d'adhésion ou d'adhérence.) du traitement, une efficacité moindre du Truvada® pris par la bouche (contrairement à l’utilisation d’un gel vaginal de ténofovir dans l’essai Caprisa 004) chez les femmes par rapport aux hommes ayant des rapports sexuels avec d’autres hommes (HSH). Il a été aussi discuté des différences de diffusion du Ténofovir et du FTC au niveau tractus génital de la femme comparé au sperme ou au rectum.
Partners/PrEP
Cette étude concernait 4 758 couples séro-discordants chez lesquels l’un des deux partenaires homme ou femme était séropositif Se dit d’un sujet dont le sérum contient des anticorps spécifiques dirigés contre un agent infectieux (toxo-plasme, rubéole, CMV, VIH, VHB, VHC). Terme employé, en langage courant, pour désigner une personne vivant avec le VIH. pour le VIH dans neuf sites répartis au Kenya et Ouganda. Parmi ces 758 couples, un tiers des personnes HIV négatives, partenaires de personnes séropositives, recevaient du ténofovir, un tiers du Truvada® et un tiers du placebo. Tous les participants recevaient un kit de prévention et de service qui incluait, comme c’est le cas pour tous les essais de PreP, à la fois du counseling, des distributions gratuites de préservatif et du dépistage et traitement des infections sexuelles transmissibles ainsi que la possibilité d’accéder à la prise en charge en cas de contamination. Le Comité Indépendant de l’essai, (DSMB, pour Data and Safety Monitoring Board), a statué le 31 mai 2011 sur 78 infections apparues dans l’étude: 18 infections VIH dans le bras de randomisation du ténofovir, 13 dans le bras de randomisation du Truvada® et 47 dans le bras placebo. L’efficacité de la PreP dans cette étude est plus importante que celle décrite chez les gays ( iPrEx) puisque l’on observe 62% de diminution de la contamination VIH sous tenofovir (IC 95% 34 – 78%, P = 0,0003) et 73% de diminution de risque de contamination par le VIH pour le bras Truvada® (IC 95% 49 – 85%, P < 0,0001) si on compare bien sûr au bras placebo. Le comité indépendant de l’étude Partners a d’ailleurs décidé que, si l’essai devait continuer, les résultats étaient suffisants positifs pour que ceux qui recevaient un placebo aient accès en prophylaxie pré-exposition sexuelle au ténofovir ou à la combinaison ténofovir/emtricitabine.
TDF 2
Plus spectaculaire encore, cette étude menée en Afrique chez des hommes et des femmes partenaires de séropositifs, montre un niveau d’adhésion à la PrEP particulièrement élevé puisque 97% des doses de médicaments dispensés ont été réellement prises et que le taux de rétention dans l’étude était de 95%.. L’étude TDF2 a concerné 1 219 couples hétérosexuels au Botswana où cette fois il y avait deux bras de randomisation comparant le Truvada® à un placebo. Dans les données préliminaires portant sur 1200 participants (54.7% d’hommes et 45.3% de femmes), il y a eu 9 contaminations sur les 601 participants qui recevaient le Truvada® et 24 contaminations pour les 599 personnes ayant reçu le placebo. Ces résultats sont compatibles avec une diminution du risque de contamination de 62.6% (IC 95% 21,5 – 83,4%, P = 0,0133) et chez les personnes pour lesquelles on a la preuve que le médicament a été correctement pris, le niveau de protection est de 77.9 % (IC 95% 41,2 – 93,6 %, P = 0,0053). Ces résultats semblent contredire ceux de l’étude FEM-PrEP, qui avaient été jugés suffisamment mauvais pour entrainer un arrêt prématuré de l’essai.
PROUD
L’étude PROUD de prophylaxie pré-exposition (PrEP) a été conduite au Royaume-Uni auprès d’hommes homosexuels, d’hommes ayant des rapports avec d’autres hommes ( HSH Homme ayant des rapports sexuels avec d'autres hommes. ) et de femmes trans. Ainsi 545 personnes séronégatives exposées à l’infection par le VIH ont été recrutées dans 13 centres de santé sexuelle à Londres, Brighton, Manchester, Birmingham, Sheffield et York.
Dans cette étude, les participants et participantes se sont vues séparées en deux groupes, un groupe ayant reçu immédiatement un comprimé de Truvada® (ténofovir + emtricitabine) par jour, tandis que l’autre ne devait, jusqu’à présent, le recevoir que dans douze mois. Les deux groupes se sont vu proposer un ensemble de tests réguliers de dépistage du VIH et des infections sexuellement transmissibles (IST), des préservatifs, des conseils et du suivi autour du safe sex, ainsi que des enquêtes comportementales et la surveillance.
Dans l’étude PROUD, le taux de nouvelles infections au VIH a été de 1,3% par an dans le groupe PrEP et de 8,9% dans le groupe de contrôle. La différence entre ces deux chiffres correspond à une efficacité de 86% comme dans l’essai Ipergay même si l’intervalle de confiance est différent. L’étude PROUD a visé à reproduire les conditions réelles des cliniques en Angleterre et a montré que les craintes d’une adhésion médiocre dans ce cadre n’étaient pas fondées. A noter que cette étude utilisait des tests rapides et qu’une fréquence accrue de faux positifs a été évoquée dans les conditions d’utilisation de la PrEP
ANRS iPergay
Sur les 445 personnes vues à la visite de screening, 414 ont été randomisées, 208 dans le groupe placébo et 206 dans le groupe Truvada®. Il y a eu 12% de perdus de vue ou de retrait, et finalement au moment de la présentation 177 personnes sont issues du groupe placébo et 176 personnes issues du groupe Truvada, soit un total de 353 volontaires. Dans les résultats de ces 414 personnes, volontaires, randomisées, qui ont été présentés, on observe un âge moyen de 34.8 ans [28.8 – 42.7], avec seulement 3% de bisexuels et 1 personne transgenre, 83 (20%) étaient circoncis, le nombre de rapports sexuels dans les 4 dernières semaines était en moyenne de 10 et le nombre de partenaires de 8 dans les deux derniers mois.
Sur l’élément majeur, qui est l’objectif primaire de l’étude, à savoir le nombre de contaminations, il y a eu 16 contaminations VIH dans l’essai Ipergay, 14 dans le bras Placébo et 2 dans le bras Truvada (P= 0.0023). Des chiffres assez comparable à ceux de l’étude PROUD: 19 contaminations dans le bras differé et 3 dans le bras Truvada.
Il n’y pas eu de contamination dans le bras Truvada intermittents dans les 14 premiers mois de l’essai. En terme d’incidence, l’incidence était de 6.60% pour cent patients/année dans le groupe placébo et de 0.92 pour cent patients/année dans le groupe Truvada avec une incidence globale assez proche que celle des organisateurs avaient prévu, soit de 3.72% personne/année. En intention de traiter, le pourcentage de réduction du risque relatif est donc de 86% [40-99%] (p = 0.002) soit le plus élevé jamais observé dans un essais de PreP. pour l’essai PROUD, qui concerne 545 MSM randomises (276 avec la Prep continue immediate, 269 avec la PreP differee), Sheena McCormack presente un taux similaire de reduction de risques de 86%. Même si des resistances acquises sont présentes dans PROUD mais pas dans IPERGAY.
Fait important, il n’a pas été observé de désinhibition tant en terme de nombre de partenaires, de nombre de rapports sexuels que de rapport anaux réceptifs non protégés durant la phase contre placébo.
Comme toujours dans ce type d’essai, il y a une extrême valeur informative dans les cas de contaminations survenues dans le bras sous traitement, tels que les deux cas de contamination VIH survenue sous Truvada qui ont été présentés lors de la communication. Il apparait très clairement que les deux patients avaient non seulement des rapports non protégés par l’importante offre globale de prévention mise en place par les centres, par l’ANRS et par les volontaires de AIDES, mais que dans les deux cas, la démonstration pharmacologique et les retours des comprimés témoignaient d’un niveau d’observance proche de zéro.
Les patients ont consommé dans cet essai une médiane de 14 comprimés par mois [8-20]. Ce qui prouve que globalement le schéma de prises intermittentes était respecté. Il y a eu et, c’est un fait notable dans cet essai centré sur la prévention du VIH, 34% d’infections sexuellement transmissibles sur l’ensemble des patients. En termes de tolérance, il y a un très bon profil de tolérance du Truvada et le taux d’évènements secondaires était similaire dans le groupe placébo et dans le groupe Truvada. Si on excepte les troubles digestifs (nausées diarrhées, douleurs abdominales) qui étaient reportés plus fréquemment dans le groupe Truvada que dans le groupe Placébo [13 – 6%] (p = 0.02). Seulement deux patients (1%) dans le bras Truvada® ont eu une diminution de la clairance de la créatinine en dessous du seuil considéré comme relevant sur le plan clinique, à savoir 60ml/mn.
L’essai de Prep intermittente menée par l’ANRS en France montre donc un niveau de réduction des risques et de prévention le plus élevé dans les essais de PreP menés de part le monde. Cela confirme l’intérêt préventif du schéma «à la demande» de la PreP avec le Truvada dans cette population à haut risque de HSH . Cette prévention, lorsqu’elle est prescrite dans les conditions d’un essai de ce type et avec l’accompagnement important que l’on sait donne des niveaux de protection chez les patients observant proche de 100%. L’analyse de l’intervalle confiance entre 40 et 99% en intention de traiter montre qu’on est au minimum à 40% de réduction des risques, soit bien au-delà de l’essai Iprex mené chez une population HSH avec une Prep continue. Ces données sont plus difficilement comparables avec ceux de l’essai PROUD avec un intervalle de confiance a 90% : 86% ( IC 90% = 62-96%; P=0.0002).
Cet essai, part les hasards de la recherche scientifique, a donné des résultats beaucoup plus précocement que ne le prévoyait les organisateurs et promoteurs, puisqu’il était basé sur une analyse de 950 participants par bras de randomisation, et que finalement ces résultats extrêmement positifs sont intervenus avec seulement 400 participants. Ces résultats vont influencer les décisions et recommandations en termes de Prep, faciliter aussi probablement l’instruction par l’ANSM du dossier de recommandation temporaire d’utilisation (RTU) demandée notamment par l’association AIDES pour la mise à disposition temporaire du Truvada dans cette indication de PrEP et attendu pour 2006.
Prep + Tasp «Treatement as Prevention», le traitement comme prévention. La base du Tasp a été établie en 2000 avec la publication de l’étude Quinn dans le New England Journal of Medicine, portant sur une cohorte de couples hétérosexuels sérodifférents en Ouganda, qui conclut que «la charge virale est le prédicteur majeur du risque de transmission hétérosexuel du VIH1 et que la transmission est rare chez les personnes chez lesquelles le niveau de charge virale est inférieur à 1 500 copies/mL». Cette observation a été, avec d’autres, traduite en conseil préventif par la Commission suisse du sida, le fameux «Swiss statement». En France en 2010, 86 % des personnes prises en charge ont une CV indétectable, et 94 % une CV de moins de 500 copies. Ce ne sont pas tant les personnes séropositives dépistées et traitées qui transmettent le VIH mais eux et celles qui ignorent leur statut ( entre 30 000 et 50 000 en France). plus fort?
L’étude dont les résultats ont été rapporté à la CROI «Conference on Retroviruses and Opportunistic Infections», la Conférence sur les rétrovirus et les infections opportunistes annuelle où sont présentés les dernières et plus importantes décision scientifiques dans le champs de la recherche sur le VIH. 2015 à Seattle, a consisté à proposer une trithérapie pour les partenaires VIH quel que soit le taux de lymphocytes CD4 et la Prep (TDF/FTC, une prise par jour) pour le partenaire séronégatif pendant les 6 premiers mois du traitement cART Combination antiretroviral therapy (cART) ou traitement antirétroviral combiné, en français. Le terme est utilisé quand il est important de préciser qu'il s'agit d'une multithérapie basée sur plusieurs antirétroviraux, et non d'une monothérapie. , en attendant l’indétectabilité. La PreP était considérée « comme un pont pour les cART ». Tous les patients devaient être naïfs de cART et de PreP. Le suivi était à M1 puis tous les 4 mois jusqu’à 24 mois.
Le but de cette étude était de déterminer l’impact de la PreP comme pont jusqu’à l’efficacité des ARV dans la transmission du VIH (TasP). L’incidence du VIH était déterminée selon un modèle développé sur les données de l’étude Partners PrEP, bras placebo .
1013 couples ont été inclus ente novembre 2012 et août 2014 : âge médian 30 ans, 65% avaient des rapports sexuels non protégés dans le mois précédent, médiane de lymphocytes CD4 à 436/mm3 pour le partenaire infecté et charge virale La charge virale plasmatique est le nombre de particules virales contenues dans un échantillon de sang ou autre contenant (salive, LCR, sperme..). Pour le VIH, la charge virale est utilisée comme marqueur afin de suivre la progression de la maladie et mesurer l’efficacité des traitements. Le niveau de charge virale, mais plus encore le taux de CD4, participent à la décision de traitement par les antirétroviraux. à 37 095 copies/ml. Sept séroconversions étaient attendues dans cette population.
L’étude est toujours en cours. 48% des couples ne prenaient que la PreP, 27% cART et PreP et 16% que cART.
Seul 2 séroconversions ont été détectées soit 0,2/100 personne-années soit 96% de réduction du risque de transmission (IC 95% 81-99%, p<0,0001) : efficacité de l’association Prep et cART). Pour les 2 patients avec séroconversion Période d'apparition, dans le sang, d'anticorps spécifiques en réponse au virus. , l’observance de la Prep n’a pas été bonne et le ténofovir était indétectable sur les plasmas en date de la séroconversion. Pour les cART, un des partenaires VIH n’a pas débuté le traitement et l’autre sujet séronégatif a changé de partenaire durant l’étude.
Les premiers résultats montrent que l’association cART et PreP est faisable et efficace dans la réduction de la transmission du VIH chez des couples hétérosexuels sérodiscordants à haut risque. De nouvelles données sont en attente concernant les autres populations à haut risque comme les HSH .
Et dans le futur?
Deux molécules sous formes de nanoparticules sont développées dans un perspective, entre autres, d’utilisation dans la Prep. IL s’agit d’un inhibiteur non nucléosidique de la transcriptase inverse, la rilpivirine (RPV) et d’un nouvel inhibiteur d’intégrase, le GSK744 ou cabotegravir, analogue du Dolutegravir Le dolutégravir, nom de marque de Tivicay® et présent dans Juluca® et Triumeq®, appartient à la une classe de médicaments antirétroviraux appelés inhibiteurs de l'intégrase. Il est utilisé en combinaison avec d'autres médicaments anti-VIH. Les qualités pharmacologiques attendues pour ces antirétroviraux injectables à long durée d’action concernent une efficacité et une tolérance au moins équivalentes aux autres formulations du même principe actif, des propriétés pharmacocinétiques permettant une administration mensuelle ou bimensuelle, un volume à injecter acceptable… Ces deux antirétroviraux possèdent une posologie quotidienne peu dosée avec 25 mg pour la RPV et moins de 30 mg pour le GSK744, ce qui permet d’envisager une charge suffisante de principe actif dans les nanostructures pour assurer une administration mensuelle. De plus l’un comme l’autre ne présentent pas d’interactions médicamenteuses significatives.
Par ailleurs, plusieurs villes travaillent a des programmes de recherche-action visant à diminuer l’incidence du VIH en population. Et ce, en mélangeant les outils de prévention : Tasp + Pep + PrEP + dépistage par exemple. C’est le cas à San Francisco, à Vancouver, à Amsterdam et depuis peu à Paris. La question du cout efficacité de ces stratégies, comme déjà mentionné pour la PrEP est un élément constitutif du débat scientifique.
— Article précédémment publié dans la lettre d’Infectiologue N°5 Sept/Oct 2015 page 170- 177.