Les chiffres 2019 du VIH, handicapés par le Covid-19

L’épidémie actuelle de Covid-19 n’a pas magiquement fait disparaître celle du VIH, et risque même d’entraver les récents progrès réalisés en la matière. En effet, le recueil d’information épidémiologique, plus compliqué que jamais, ne nous permet pas de connaître le nombre de nouvelles découvertes de séropositivité. Le nombre total de test de dépistages du VIH réalisés a en tout cas clairement baissé.

Comme chaque année à l’occasion du 1er décembre, la journée mondiale de lutte contre le sidaSida Syndrome d’immunodéficience acquise. En anglais, AIDS, acquired immuno-deficiency syndrome. Santé publique France a produit des données actualisées sur l’infection par le VIH et les infections sexuellement transmissibles (IST) bactériennes en France. Mais cette année, l’accaparation des professionnels de santé par le Covid-19Covid-19 Une maladie à coronavirus, parfois désignée covid (d'après l'acronyme anglais de coronavirus disease) est une maladie causée par un coronavirus (CoV). L'expression peut faire référence aux maladies suivantes : le syndrome respiratoire aigu sévère (SRAS) causé par le virus SARS-CoV, le syndrome respiratoire du Moyen-Orient (MERS) causé par le virus MERS-CoV, la maladie à coronavirus 2019 (Covid-19) causée par le virus SARS-CoV-2. a eu pour conséquence une sous-déclaration importante des données. La conséquence étant que le nombre de découvertes de séropositivité VIHVIH Virus de l’immunodéficience humaine. En anglais : HIV (Human Immunodeficiency Virus). Isolé en 1983 à l’institut pasteur de paris; découverte récemment (2008) récompensée par le prix Nobel de médecine décerné à Luc montagnier et à Françoise Barré-Sinoussi. n’a pour le moment pas pu être estimé pour l’année 2019.

Pour autant, les données publiées nous donnent des informations sur l’épidémie de VIH/sida en France.

Un nombre de sérologies en hausse… jusqu’au CovidCovid-19 Une maladie à coronavirus, parfois désignée covid (d'après l'acronyme anglais de coronavirus disease) est une maladie causée par un coronavirus (CoV). L'expression peut faire référence aux maladies suivantes : le syndrome respiratoire aigu sévère (SRAS) causé par le virus SARS-CoV, le syndrome respiratoire du Moyen-Orient (MERS) causé par le virus MERS-CoV, la maladie à coronavirus 2019 (Covid-19) causée par le virus SARS-CoV-2.

Le nombre de tests de dépistage réalisés par année, quel que soit le lieu de prélèvement, est établi grâce à l’enquête LaboVIH. Le taux de participation des laboratoires de biologie médicale pour l’année 2019 est de 72%, ce qui est nettement inférieur à celui des années précédentes, qui était évalué entre 85% et 89% jusqu’en 2017, et qui était de 81% en 2018.

En 2019, 6,2 millions de sérologies VIH ont été réalisées par les laboratoires de biologie médicale. L’activité de dépistage du VIH est en augmentation depuis 2014, +10% sur 4 ans, et cette augmentation s’est accélérée en 2019, avec +6% en un an. Le nombre de sérologies confirmées positives a lui aussi augmenté, avec +6% entre 2018 et 2019. 

Malheureusement, le Covid-19  a fortement impacté l’activité de dépistage en 2020 et on constate en mars-avril 2020, lors du 1er confinement, une chute beaucoup plus importante que les variations mensuelles habituelles. Ainsi, le nombre de sérologies a diminué de 56% entre février et avril, en particulier chez les hommes (-66%, pour -49% chez les femmes). Cette baisse importante est particulièrement marquée chez les plus jeunes (-62% pour les 15-24 ans) et les plus âgés (-62% pour les plus de 50 ans).

Nombre mensuel de sérologies VIH réalisées en secteur privé, France, janvier 2018-août 2020.
Source : Assurance maladie, Système national des données de santé.

Il n’y a pas eu de report du dépistage vers les autotests VIH (ATVIH), disponibles en pharmacie depuis quelques années. Les ventes ont également chuté au premier semestre 2020, de -22% par rapport au premier semestre 2019. En mars, cette baisse est même de -32% et en avril, de -50%, par rapport aux mêmes mois de 2019. Les pharmacies n’ayant aucun problème d’approvisionnement, cette baisse correspond bien à une diminution sévère du nombre d’ATVIH achetés.  

Le nombre de sérologies n’a pas suffisamment ré-augmenté lors du déconfinement, en mai et juin, pour pouvoir atteindre les niveaux d’avant la crise.

Le dépistage est l’une des composantes clés de la réponse face au VIH. Sans dépistage, pas d’accès au traitement, pas de qualité de vie soutenue pour les personnes vivant avec le VIH, et pas de prévention de la transmission grâce aux traitements. Ces chiffres nous laissent craindre un déficit global de dépistages pour l’année 2020. 

Les nouvelles personnes vivant avec le VIH

Si nous ne disposons pas encore de chiffre global, ces données permettent néanmoins de connaître le profil des personnes ayant découvert leur séropositivité entre le 1er janvier 2019 et le 30 septembre 2020. 

Répartition des découvertes de séropositivité VIH par mode de contamination, sexe et pays de naissance, France, janvier 2019-septembre 2020.
Source : Santé publique France, DO VIH, Données brutes au 30/09/2020.

Les hommes ayant des rapports sexuels avec les hommes (HSH) et les personnes hétérosexuelles nées à l’étranger restent les 2 groupes les plus touchés, avec respectivement 43% et 37% des découvertes de séropositivité. 

En 2019-2020 comme en 2017-2018, les hommes représentent 65% des découvertes de séropositivité. Les personnes hétérosexuelles et les HSHHSH Homme ayant des rapports sexuels avec d'autres hommes.  représentent respectivement 51% et 43% des découvertes de séropositivité en 2019-2020. Les personnes transgenres contaminées par rapports sexuels et les usagers de drogues injectables (UDI) représentent chacun 2% des découvertes. Là encore, ces proportions sont similaires à celles observées en 2017-2018. Les personnes nées à l’étranger représentent 69% des UDI et 83% des personnes transgenres contaminées par rapports sexuels.

Parmi les personnes hétérosexuelles, 73% sont nées à l’étranger. La majorité des personnes hétérosexuelles nées à l’étranger sont nées en Afrique subsaharienne (79%) et sont des femmes (64% contre 36% d’hommes). Ces proportions sont inversées pour les personnes hétérosexuelles nées en France, qui comptent 64% d’hommes et 36% de femmes.  

Concernant les hommes homosexuels et bisexuels, 32% sont nés à l’étranger (contre 26% en 2017-2018), principalement sur le continent américain, et 68% en France. Les HSH nés en France représentent ainsi 29% de l’ensemble des découvertes en 2019-2020. 

Enfin, les personnes âgées de moins de 25 ans représentent 13% des découvertes et celles de 50 ans et plus, 21%. Chez les HSH, ces proportions sont respectivement de 18% et 15%, et chez les personnes hétérosexuelles de 11% et 22%.

Ce que nous savons des nouveaux cas dépistés en 2019-2020 semble donc montrer une stabilité globale des caractéristiques des découvertes de séropositivité par rapport aux deux années précédentes. Comme l’année dernière, il semblerait que la part des HSH nés à l’étranger augmente. Les données de l’étude GANYMEDE, conduite par Romain Palich (IPLESP, APHP), actuellement en cours, devraient nous permettre d’identifier les contextes individuels et collectifs favorisant l’augmentation de ces diagnostics parmi les HSH nés à l’étranger. Elle explore en effet les différentes facettes du parcours des HSH séropositifs nés à l’étranger avant leur diagnostic, en s’appuyant sur un large échantillon de personnes suivies dans les 15 plus grands centres de prise en charge du VIH en Île-de-France.

Découvertes précoces et tardives

En 2019-2020, 21% des découvertes de séropositivité sont des diagnostics précoces, contre  24% en 2017-2018. D’un autre côté, 26% sont des diagnostics à un stade avancé de l’infection contre 25% en 2017-2018.

Comme les années précédentes, la part des diagnostics précoces est plus élevée chez les HSH (30% en 2019-2020) que chez les UDI (14%), les personnes hétérosexuelles (12%), et les personnes transgenres (10%). On observe pourtant une diminution de la part des diagnostics précoces chez les HSH, mais pas chez les hétérosexuels.

Inversement, les diagnostics à un stade avancé sont plus fréquents chez les UDI (35%) et les hétérosexuels (31%) que chez les transgenres (20%) et les HSH (17%).

Disparité également entre les personnes nées en France et celles nées à l’étranger : Les diagnostics précoces sont plus fréquents chez celles nées en France que chez celles nées à l’étranger. 

Enfin, en 2019-2020, 51% des découvertes de séropositivité concernent des personnes déclarant qu’il s’agissait de leur premier test. Un chiffre toujours élevé, qui souligne le chemin qu’il reste à parcourir pour augmenter le recours au dépistage, Covid ou pas Covid.