PrEP : PREVENIR confirme la très grande efficacité de la prise à la demande

Si le 100% de protection n’existe pas en recherche et en prévention, les excellents résultats de l’étude Prévenir s’en rapprochent pourtant. Présentés à la CROI 2021 par le Pr Jean-Michel Molina, principal investigateur de l’étude, les chiffres confortent la très grande efficacité de la PrEP intermittente: après trois ans et 3 000 personnes très exposées au VIH suivies, seules six infections à VIH sont à déplorer, et toutes sont dues à une mauvaise observance du traitement.

L’étude Prévenir avait pour but d’étudier l’efficacité et la tolérance de la PrEPPrEP Prophylaxie Pré-Exposition. La PrEP est une stratégie qui permet à une personne séronégative exposée au VIH d'éliminer le risque d'infection, en prenant, de manière continue ou «à la demande», un traitement anti-rétroviral à base de Truvada®. en particulier à la demande. Dans ce cas, la prise d’emtricitabine et de fumarate de ténofovir disoproxil (Truvada® et ses génériques) se fait avant, pendant et après les rapports sexuels, contrairement à la PrEP en continu où la prise a lieu tous les jours. Les résultats ont été publiés dans The Lancet HIV daté du 27 juin 2022.

Incidence du VIHVIH Virus de l’immunodéficience humaine. En anglais : HIV (Human Immunodeficiency Virus). Isolé en 1983 à l’institut pasteur de paris; découverte récemment (2008) récompensée par le prix Nobel de médecine décerné à Luc montagnier et à Françoise Barré-Sinoussi. chez les participants de l’étude Prévenir, CROICROI «Conference on Retroviruses and Opportunistic Infections», la Conférence sur les rétrovirus et les infections opportunistes annuelle où sont présentés les dernières et plus importantes décision scientifiques dans le champs de la recherche sur le VIH. 2021.

361 infections évitées

Au total, 3 067 participants (âge moyen de 36 ans) ont été inclus dans l’étude. La presque totalité d’entre eux (98,5%) était des hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes (HSH) cisgenres et plus de la moitié (56%) utilisaient déjà la PrEP avant l’entrée dans l’étude. Près de la moitié des participants (49,5%) a choisi de prendre la PrEP à la demande. L’incidence des perdus de vue de l’étude était de 14 pour 100 participants-année, le taux de rétention dans l’étude était donc relativement élevé. 

Sur 22 mois, l’incidence du VIH dans la cohorte n’était que de 1,1 pour 1000 par année, que ce soit dans le groupe «à la demande» ou dans le groupe «continu». Six personnes ont donc été infectées par le VIH au cours de l’étude : toutes avaient interrompu leur prise de médicament avant l’infection en continuant d’avoir des rapports non protégés par des préservatifs. Si on se rapporte à l’incidence de 6,6 % observée dans le bras placeboPlacebo Substance inerte, sans activité pharmacologique, ayant la même apparence que le produit auquel on souhaite le comparer. (NDR rien à voir avec le groupe de rock alternatif formé en 1994 à Londres par Brian Molko et Stefan Olsdal.) de l’essai ANRS IPERGAY, l’un des premiers essais qui montrait l’extrême efficacité de la PrEP, cela correspond à 361 infections par le VIH évitées. 

Très peu d’effets indésirables

Un seul cas de résistance à l’emtricitabine a été détecté chez l’un des participants diagnostiqué, il avait repris la PrEP sans vérifier s’il n’était pas infecté. D’une manière générale, la tolérance de la PrEP est très satisfaisante. Aucun patient n’a dû interrompre la PrEP pour une toxicité rénale. Les effets indésirables les plus fréquents sont des problèmes digestifs (nausées ou diarrhées), mais ils n’ont poussé que trois personnes à interrompre leur protocole de PrEP.

Le recours au préservatif a baissé d’une manière globale chez les participants, puisque 18% de la totalité des rapports sexuels ont été protégés par un préservatif. L’équipe de recherche a constaté une incidence relativement élevée de l’hépatite C, avec 0,7 % participants-année, et surtout une incidence élevée des infections sexuellement transmissibles (IST) bactériennes, avec 75,5 % participants-année. Notons que cette incidence a chuté à 32 % pendant la période du premier confinement liée à l’épidémie de la Covid-19Covid-19 Une maladie à coronavirus, parfois désignée covid (d'après l'acronyme anglais de coronavirus disease) est une maladie causée par un coronavirus (CoV). L'expression peut faire référence aux maladies suivantes : le syndrome respiratoire aigu sévère (SRAS) causé par le virus SARS-CoV, le syndrome respiratoire du Moyen-Orient (MERS) causé par le virus MERS-CoV, la maladie à coronavirus 2019 (Covid-19) causée par le virus SARS-CoV-2. (du 17 mars au 11 mai 2020).

Deux sous-études sont actuellement en cours dans le cadre de Prévenir afin de réduire l’incidence de ces IST: la première vise l’élimination de l’hépatite C par une stratégie de test and treat (dépistage et traitement rapides) et la seconde, Doxyvac, évalue l’intérêt d’une prophylaxie post-exposition par la doxycycline et d’une vaccination contre le méningocoque B pour essayer de prévenir les infections à Chlamydia, syphilis et gonocoque.

Prévenir était menée en collaboration avec le Pr Jade Ghosn (service des maladies infectieuses et tropicales de l’hôpital Bichat – Claude Bernard AP-HPAP-HP Assistance publique-Hôpitaux de Paris. et Université de Paris), l’équipe de la Pr Dominique Costagliola et du Dr Lambert Assoumou (Institut Pierre-Louis d’épidémiologie et de santé publique InsermInserm Institut national de la recherche médicale. Sorbonne Université), de Daniela Rojas Castro pour AIDES/Coalition PLUS, et soutenue par l’ANRS | Maladies infectieuses émergentes et Sidaction. 

Bibliographie

Incidence of HIV-infection with daily or on demand oral PrEP with TDF/FTC in France
J-M. Molina, J. Ghosn, C. Delaugerre, G. Pialoux, C. Katlama, L. Slama, C. Pintado, M. Ohayon, H. Mouhim, L. Assoumou, B. Spire, M. Ben-Mechlia, D. Rojas Castro, D. Costagliola and the ANRS Prevenir study group. CROI 2021

Les résultats ont été publiés le 27 juin dans The Lancet HIV :
Daily and on-demand HIV pre-exposure prophylaxis with emtricitabine and tenofovir disoproxil (ANRS PREVENIR): a prospective observational cohort study, The Lancet HIV, 27 juin 2022
https://doi.org/10.1016/S2352-3018(22)00133-3

Lien d’intérêt : Notre rédacteur-en-chef Gilles Pialoux est signataire de cette communication orale, rare contribution française à la CROI 2021 virtuelle.