Extension du domaine de la tique

Les infections par le virus de l’encéphalite à tique sont inscrites sur la liste des maladies à déclaration obligatoire depuis mai 2021. Santé publique France a présenté le 7 juillet 2023 son premier bilan concernant la surveillance de cette maladie, dans un contexte d’augmentation de son incidence dans toute l’Europe, d’extension de la zone et de la période de circulation du virus. Cette évolution est liée au changement climatique en Europe qui influence la distribution du vecteur : la tique Ixodes ricinus en France.

Le virus de l’encéphalite à tique (virus TBE pour Tick-Borne Encephalitis) est responsable d’infections neurotropes, dirigées contre le système nerveux central. C’est un virus de la famille des flavivirus, comme le West Nile ou le virus de la dengue, avec trois sous-types : européen, sibérien et asiatique. Le sous-type européen, responsable de maladies moins graves que les deux autres, est présent en France.

La transmission à l’homme est principalement réalisée par des piqûres de tiques, Ixodes ricinus en France, également vecteur de la maladie de Lyme. Plus rarement, la contamination peut se faire par consommation de lait cru ou de fromage au lait cru, essentiellement de chèvre ou de brebis, le virus étant excrété dans le lait des ruminants infectés.

Des cas en augmentation

Durant la période de surveillance, entre mai 2021 et mai 2023, 71 cas ont été notifiés : 30 en 2021, 36 en 2022 et 5 en 2023. La maladie reste donc encore peu répandue dans l’Hexagone, mais son territoire progresse et selon SPF «les infections acquises sur le territoire (61) sont plus nombreuses que celles acquises lors de voyages (10)» (86 % contre 14 %).

Lieu probable de contamination des cas autochtones d’infection par le virus TBE déclarés en France de mai 2021 à mai 2023

Les cas déclarés ne concernent que les cas graves, a indiqué Alexandra Mailles, épidémiologiste à Santé publique France. Les infections sont asymptomatiques dans la grande majorité des cas. Pour les 30 % des cas qui présentent des symptômes, la maladie est biphasique : une première phase avec des syndromes infectieux non spécifiques (fièvre, douleurs aux articulations et aux muscles), suivie de quelques jours d’apparente guérison et dans la moitié des cas, une deuxième phase avec des infections du système nerveux central. La DO identifie donc plus facilement les cas graves, présentant des signes neurologiques : encéphalites (atteinte limitée au cerveau), myélites (atteinte de la moelle épinière), méningites (infection limitée aux méninges) et encéphalomyélites (atteinte du cerveau et de la moelle épinière).

Des cas graves

«C’est une maladie avec une létalité très faible, précise Alexandra Mailles, mais avec de possibles séquelles importantes suite à l’atteinte du système nerveux central». Sur les 71 cas recensés, 94% ont été hospitalisés, mais aucun décès n’est survenu.

Il s’agit en majorité d’hommes, exposés par leur profession (élevage…) d’un âge médian de 48 ans. Mais, on dénombre aussi quatre enfants, dont deux de moins de 10 ans, et 15 personnes de plus de 65 ans. SPF recense 38 % d’encéphalites, 13 % de méningo-encéphalites, 37 % de méningites simples et 3 % d’encéphalomyélites. L’âge constitue un facteur de risque éventuel de gravité plus importante, selon l’épidémiologiste qui a insisté sur les mesures de prévention à adopter, car il n’y a pas de traitement spécifique.

Pas de traitement

SPF a édité un guide qui présente les gestes de prévention à adopter :

  • se couvrir, en portant des vêtements longs qui recouvrent les bras et les jambes, un chapeau et rentrer le bas du pantalon dans les chaussettes,
  • rester sur les chemins et éviter les broussailles, les fougères et hautes herbes,
  • utiliser des répulsifs cutanés, identiques à ceux utilisés contre les moustiques.

En rentrant chez soi après une balade en forêt, il est conseillé de :

  • s’examiner et vérifier soigneusement l’ensemble du corps,
  • en cas de piqûre, retirer le plus rapidement possible la ou les tiques avec un tire-tique ou à défaut une pince fine.

Une vaccination est recommandée aux voyageurs se rendant dans les zones d’infections fréquentes (voir la liste sur le site de Vaccination Info service).

Extension des zones

Mais «l’un des objectifs de la mise à déclaration obligatoire est de suivre la dynamique de l’infection en France et les caractéristiques des cas pour que la Haute Autorité de santé puisse se prononcer dans un avenir proche sur la nécessité de changer ses recommandations vaccinales», indique Alexandra Mailles.

Les pays européens les plus touchés par l’encéphalite à tiques sont l’Allemagne, la République tchèque et les pays baltes. Une extension de la maladie vers l’Europe du Nord et de l’Est est observée. « Avec le changement climatique, certains pays ou régions deviennent plus favorables aux tiques», a poursuivi Alexandra Mailles.

En France, jusqu’à présent, deux foyers étaient connus avec des cas modérés, en Alsace et en Haute-Savoie . «À partir de 2016, on a vu des cas acquis en Auvergne avec une circulation du virus principalement dans le massif du Forez». Aujourd’hui, 24 % des cas ont été contaminés dans un département qui n’était pas considéré comme étant à risque. Une extension de la zone de circulation de la tique qui invite aux mesures de prévention.