– darunavir (Prezista®), nouvel inhibiteur de protéase (IP), utilisé avec une faible dose de ritonavir (Norvir®) comme «booster»,
– etravirine (TMC 125), nouvel inhibiteur nucléosidique de la transcriptase inverse (INTI),
– raltégravir (Isentress®), premier inhibiteur de l’intégrase (II) en développement clinique.
En plus de ces trois antirétroviraux, les patients avaient la possibilité de recevoir dans leur traitement de base optimisé un ou plusieurs inhibiteurs nucléosidiques de la transcriptase inverse (INTI) et/ou de l’enfuvirtide (Fuzeon®).
Résistance aux trois principales familles d’antirétroviraux
Pour être inclus dans le protocole, les patients devaient être en échappement thérapeutique après avoir été traités par les trois classes d’antirétroviraux (INTI, INNTINNRTI Les inhibiteurs non nucléosidiques de la transcriptase inverse (INNTI en Français ou «non-nucleoside reverse transcriptase inhibitors», NNRTI, en anglais) ont un effet inhibiteur direct sur la transcriptase inverse (TI) du VIH-1 en formant une liaison réversible et non compétitive avec l'enzyme. La nevirapine, la delavirdine et l'efavirenz sont des NNRTI. et IP), et ils ne devaient avoir pris auparavant aucune des trois molécules de l’étude.
Les critères virologiques d’inclusion dans l’essai étaient l’existence d’une charge viraleCharge virale La charge virale plasmatique est le nombre de particules virales contenues dans un échantillon de sang ou autre contenant (salive, LCR, sperme..). Pour le VIH, la charge virale est utilisée comme marqueur afin de suivre la progression de la maladie et mesurer l’efficacité des traitements. Le niveau de charge virale, mais plus encore le taux de CD4, participent à la décision de traitement par les antirétroviraux. (CV) plasmatique > 1 000 copies, le génotype viral montrant les mutations de résistance aux antirétroviraux suivantes :
– au moins trois mutations majeures aux IP (liste IAS 2006) mais sensibilité conservée au darunavir (1er algorithme Power, soit <= 3 mutations parmi V11I, V32I, L33F, I47V, I50V, I54L/M, G73S, L76V, I84V and L89V) ;
– au moins trois mutations aux INTIINTI Les inhibiteurs nucléosidiques de la transcriptase inverse du VIH ou INTI, sont des composés de synthèse utilisés dans le traitement du VIH et des hépatites. (liste IAS 2006) ;
– antécédent d’échec thérapeutique sous INNTI mais présence d’un virus génotypiquement sensible à l’etravirine (moins de 3 mutations parmi A98G, L100I, K101Q/P/E, K103H/N/S/T, V106A/M, V108I, E138G/K/Q, V179D/E/F/G/I, Y181C/I/V/C/H/L, Y188C/H/L, G190A/C/E/Q/S, P225H, F227C/L, M230I/L, P236L, K238N/T et Y318F).
169 patients ont été présélectionnés et 103 patients ont été inclus. La majorité des patients non-inclus ne présentaient pas les critères virologiques d’inclusion.
Les 103 patients inclus avaient une longue histoire thérapeutique : infection à VIHVIH Virus de l’immunodéficience humaine. En anglais : HIV (Human Immunodeficiency Virus). Isolé en 1983 à l’institut pasteur de paris; découverte récemment (2008) récompensée par le prix Nobel de médecine décerné à Luc montagnier et à Françoise Barré-Sinoussi. connue depuis 17 ans en moyenne, traitée par antirétroviraux depuis en médiane 13 ans. Ces patients étaient en situation d’échec thérapeutique avec un virus présentant des mutations de résistance aux trois principales familles d’antirétroviraux, soit en médiane : six mutations pour les INTI, quatre mutations majeures pour les IP, une mutation pour les INNTI.
Le traitement de base optimisé associé aux trois molécules de l’étude a comporté un ou plusieurs INTI pour 83% des patients et de l’enfuvirtide pour 12%. Le score de sensibilité génotypique (GSS) de ce traitement de base optimisé était faible (> 1 chez seulement 17% des patients).
Un traitement bien toléré
L’analyse des données présentées à Mexico a été effectuée après 24 semaines de traitement : à S24, 90% des patients avaient une charge virale indétectable au seuil de 50 copies d’ARN VIH/ml. La baisse de la charge virale plasmatique a été en médiane de -2,4 log10 copies/ml (soit -1,9 à -2,9).
Dans le même temps, l’augmentation médiane des lymphocytes CD4 a été de +99 cellules/mm3. Le traitement a été bien toléré, seul un patient ayant été contraint d’arrêter le traitement en raison d’un effet indésirable (rash cutané). La seule toxicité biologique a été l’augmentation transitoire et asymptomatique des CPK > 10 fois la normale chez quatre patients qui ont pu poursuivre le traitement de l’étude.
Des caractéristiques immuno-virologiques pas très sévères
L’excellent résultat de cet essai (90% des mesures de charges virales inférieures à 50 copies/ml) doit être nuancé par quelques remarques et être replacé dans le contexte des essais de traitements de sauvetage récemment publiés.
Tout d’abord les patients de l’étude, certes largement prétraités et présentant des virus multimutés, avaient des caractéristiques immuno-virologiques pas très sévères. Pour les CD4 : nadirNadir Chiffre indiquant la valeur minimale enregistrée de la charge virale ou des CD4. = 79/mm3 et valeur médiane à l’inclusion dans l’essai = 255/mm3. La charge virale médiane à l’inclusion était aussi assez faible, à 4 log (3,6-4,6).
Les résultats de l’essai Trio sont supérieurs aux traitements de sauvetage utilisés antérieurement qui introduisaient une ou deux nouvelles molécules :
– Essais Power 1 et 2 pour le darunavir : CV < 50 copies = 45% ;
– Essais Duet 1 et 2 pour darunavir + etravirine : CV < 50 = 56% et 62% ;
– Essais Benchmark 1 et 2 pour le raltegravir : CV < 50 = 63%.
Néanmoins, les populations de patients traités dans ces études différentes ne sont pas strictement comparables.
« Puissant et très efficace »
Un suivi à plus long terme est indispensable pour confirmer que l’efficacité virologique de ce traitement se maintient dans le temps. Les données pharmacologiques sont aussi très attendues pour s’assurer de l’absence d’interactions médicamenteuses. Enfin, les données de tolérance à long terme restent essentielles à fournir pour connaître les éventuels effets secondaires de ces nouvelles molécules.
Après avoir fait part de ces remarques, on peut s’associer à la conclusion du communiqué de presse fourni par l’ANRS : « Sur la base de ces résultats, il est aujourd’hui possible de proposer un traitement puissant et très efficace sur le plan virologique aux patients en situation de multi-échec. L’obtention d’une charge virale inférieure à 50 copies d’ARN VIH/ml constitue désormais chez ces patients l’objectif thérapeutique de référence. Pour la première fois, chez des patients en multi-échec et porteurs d’un VIH multi-résistant, une combinaison thérapeutique inédite présente une efficacité comparable à celle observée chez des patients qui reçoivent un premier traitement. »