Prévention — Efficacité partielle d’un moyen de prévention: comment communiquer?

Les nouvelles approches de prévention du VIH incluent les vaccins, les microbicides, la circoncision et le traitement antirétroviral en tant que prévention, comprenant le traitement des personnes atteintes, la prophylaxie pré-exposition (PrEP) et la prophylaxie post-exposition (PEP). On attend de ces nouvelles technologies de prévention (NTP) d’importants impacts en terme de santé publique. Mais ces moyens n’offrent qu’une protection partielle contre le VIH. Dans le rapport L’efficacité partielle et l’adoption de nouvelles technologies de prévention biomédicale (pdf, 424Ko), les Canadiens de CATIE soulèvent deux questions:

– Quelle est la meilleure façon de promouvoir l’utilisation d’un moyen de prévention offrant une protection limitée afin d’obtenir les effets souhaités sur la santé de la population?
– Comment communiquer sur le fait que ces moyens ne sont que partiellement protecteurs pour éviter que les individus les perçoivent comme des «solutions miracles» et qu’ils continuent donc à employer d’autres stratégies plus efficaces et établies?

Les Canadiens ont passé en revue la littérature sur des moyens de prévention à efficacité partielle dans d’autres domaines que le VIHVIH Virus de l’immunodéficience humaine. En anglais : HIV (Human Immunodeficiency Virus). Isolé en 1983 à l’institut pasteur de paris; découverte récemment (2008) récompensée par le prix Nobel de médecine décerné à Luc montagnier et à Françoise Barré-Sinoussi. comme les ceintures de sécurité et les casques, les vaccins ou les moustiquaires (prévention du paludisme). L’efficacité perçue d’une technique est essentielle à son adoption. Une personne qui pense que la ceinture de sécurité ne la protègera pas vraiment lors d’un accident, a moins tendance à l’attacher. La perception du niveau de risque encouru est aussi une composante importante de l’usage d’un moyen de protection. Quelqu’un qui imagine avoir peu de risque d’accident, sur un trajet familier par exemple, peut ne pas boucler sa ceinture à cette occasion.

Bon nombre d’influences sociales interviennent dans l’adoption d’un moyen de prévention par une personne : la famille, les amis, le(s) partenaire(s), les réseaux sociaux au sens large, les relais de prévention et les professionnels de santé. Ces derniers ont un rôle important dans la réaction aux nouvelles approches de prévention et dans leur adoption. L’opinion d’un médecin sur un moyen et son efficience peut déterminer sa propension à le recommander. Ses compétences et son aisance à aborder des sujets sensibles avec ses patients ont aussi leur part. Ces professionnels sont donc des destinataires clés des messages concernant les NTP.

La compensation du risque, c’est-à-dire le fait qu’une personne, se croyant pleinement protégée par une technique, adopte de ce fait des comportements à risque accru, constitue une importante préoccupation en ce qui concerne les NTP. Les premiers résultats des études n’indiquent aucune preuve de compensation du risque. Mais ces conclusions proviennent d’essais réalisés dans un environnement contrôlé et accompagnés d’un counseling adéquat. Qu’adviendra-t-il dans le « monde réel »?

La communication sur les NTP: modulée et combinée

Il en découle que la façon de communiquer sur les NTP du VIH constituera un défi de taille lors de leur mise en œuvre à grande échelle. Les messages devront se révéler suffisamment positifs pour que des personnes veuillent utiliser ces moyens, mais pas au point qu’elles réduisent ou abandonnent d’autres moyens plus efficaces. Les messages dans d’autres domaines (la vaccination, par exemple) ont tendance à mettre l’accent sur l’information et l’éducation: fournir les faits médicaux ou scientifiques afin que les personnes puissent faire un choix avisé. Les critiques d’une telle approche soulignent le besoin de comprendre non seulement les faits scientifiques mais la pluralité des facteurs contextuels ayant une incidence sur l’adoption ou non du moyen proposé.

Deux axes ressortent de l’étude de la littérature sur le sujet :

– Les messages devront être modulés selon leur cible (personnes atteintes, entourage, réseaux sociaux, professionnels de santé…) après recherche et consultation de ces publics, de façon à ce que les messages soient pertinents et adaptés. Sans quoi ils seront probablement ignorés.
– Les NTP doivent faire l’objet d’une promotion combinée à un discours global de prévention, afin qu’elles ne soient pas perçues comme des stratégies autosuffisantes entièrement efficaces, mais plutôt comme un outil à utiliser en combinaison avec d’autres moyens plus efficients, tels que l’usage systématique de préservatifs.

Le rapport conclut qu’il existe peu de données probantes disponibles concernant l’adoption des NTP à l’extérieur d’essais cliniques contrôlés, ce qui rend difficile l’appréhension de la manière dont leur efficacité partielle sera comprise lorsqu’ils seront utilisés dans le «monde réel». Peu de recherches ont été menées sur les moyens les plus efficaces de communiquer sur le concept d’efficacité partielle. «Les recherches formatives, qui ont pour but de comprendre les comportements, les besoins et les intérêts de la population cible, joueront un rôle clé dans l’obtention d’une compréhension sommaire de la façon dont les populations cibles réagiront à l’idée de technologies partiellement efficaces. De plus, il faudra systématiquement surveiller et mettre à jour ces compréhensions une fois ces NTP mises à l’essai, approuvées et rendues accessibles.»

> L’efficacité partielle et l’adoption de nouvelles technologies de prévention biomédicale (pdf, 424Ko) / A. P. Lombardo, CATIE (Réseau canadien d’info-traitements sida). – Janvier 2011. – 57 p.