Amélioration majeure des paramètres de santé liés à l’âge des PVVIHPVVIH Personne vivant avec le VIH au fil du temps: une cohorte sur 18 ans
Alejandro Garcia Hospital Ramón y Cajal, Madrid, Spain
La cohorte espagnole présentée ici comporte 18659 patients avec une étude sur 3 périodes. Différentes comorbidités ont été étudiées, ainsi que la polymédication. L’objectif est d’observer l’évolution des évènements non sidaSida Syndrome d’immunodéficience acquise. En anglais, AIDS, acquired immuno-deficiency syndrome. au cours du temps. Les caractéristiques de la cohorte était les suivantes: âge médian de 35 ans à l’entrée, 80% hommes, près de 60% MSM, diminution progressive des UDI.

Résultats: il y a une nette diminution des évènements au cours des 3 périodes étudiées, avec 3,4% d’évènements sévères non sida dans la premières période (2006-2011), 2,6% dans la 2nde (2012-2017) et 2,1% dans la dernière (2018-2023).
On voit le poids des comorbidités augmenter avec l’âge, mais en rapportant l’âge à chaque période, on ne constate pas de différence entre les 3 périodes. Ce sont donc des données donc plutôt rassurantes: les PVVIH de 2024 sont plus en forme que celles de 2015 !
Traitement immédiat versus différé et évenements cardiovasculaires chez les PVVIH: essai START
Nila J. Dharan University of New South Wales Sydney, Sydney, Australia
START est une très vieille étude (publiée en 2015) conduite auprès de 4684 patients dans 35 pays et comparant traitement immédiat versus traitement différé chez des PVVIH non-immunodéprimées. Les résultats de START ont conduit à la mise en place du traitement ARV universel du fait de la diminution des évènements non-sida dans le bras traitement précoce, particulièrement les évènements cardiovasculaires (ECV). Tous les patients du bras traitement différé avaient été mis sous traitement ARV suite aux premiers résultats de l’étude (arrêtée avant la fin du recrutement prévu).

Les résultats présentés ici sont ceux du suivi long terme: on ne voit pas de différence significative en termes d’évènement cardiovasculaire sauf chez les femmes, mais le nombre d’évènements est très faible (2 dans le groupe traitement précoce versus 11 dans le groupe traitement retardé, surtout AVC).
En conclusion: sur le long terme les évènements cardiovasculaires sont rares dans cette étude et le traitement immédiat n’est pas associé à une réduction des ECV. Cela n’est pas très étonnant compte tenu du jeune âge à l’inclusion et du niveau élevé de CD4.
Épidémiologie de la maladie coronaire chez les PVVIH en Ouganda
Mark J. Siedner Massachusetts General Hospital, Boston, MA, USA
Les données des pays industrialisés montrent clairement un sur-risque cardiovasculaire chez les PVVIH, mais on dispose de peu de données dans les pays à ressources limitées. Les risques cardiovasculaires en Afrique sont différents de ceux que l’on retrouve dans les pays industrialisés, avec plus d’insuffisance cardiaque et d’HTA et moins de coronaropathie.
Le but de cette étude est d’évaluer le risque coronarien dans une population rurale d’Ouganda, en comparant les données chez les PVVIH et non VIHVIH Virus de l’immunodéficience humaine. En anglais : HIV (Human Immunodeficiency Virus). Isolé en 1983 à l’institut pasteur de paris; découverte récemment (2008) récompensée par le prix Nobel de médecine décerné à Luc montagnier et à Françoise Barré-Sinoussi. Étude difficile à mener car le Coroscan n’est pas l’examen le plus disponible en Ouganda !
Résultats: 289 personnes séronégatives ont été comparés à 287 PVVIH, qui pour la plupart avaient une infection contrôlée. En pratique, très peu de coronaropathies avec une absence totale de plaque dans plus de 90% de la population étudiée, VIH ou non-VIH. On note un tout petit sur-risque de plaque de 3-4% chez les PVVIH, sans savoir s’il est significatif, car la puissance de l’étude ne le permettait pas.
Plaque, inflammation, myocardiopathie subclinique et évènements CV majeurs dans la sous étude «Mécanismes» de REPRIEVE
Steven Grinspoon Massachusetts General Hospital, Boston, MA, USA
Les personnes vivant avec le VIH ont un risque accru de maladies cardiovasculaires (ASCVD) et de fragilité. L’étude REPRIEVE a montré que la pitavastatine réduit de 36% le risque d’événements cardiovasculaires majeurs (MACE).
Les patients ont ensuite été suivis pendant plus de 6 ans et sont communiqués ici dans des analyses plus précises sur les facteurs de risque d’évènements cardiovasculaires sévères (MACE) étudiés dans REPRIEVE : âge, Atherosclerotic Cardiovascular Disease Risk Score (ASCVD), High-sensitivity C-reactive protein (hs CRP), interleukin-6 (IL6), High-sensitivity Troponin T (hSTNT), plaque totale et non calcifiée (la présence de plaque non calcifiée est très prédictive de MACE). Les marqueurs de l’inflammation sont aussi prédictifs.
Quand on compare les deux bras, il y a une petite tendance à un meilleur effet de la statine quand il y a des plaques non calcifiées ou des marqueurs inflammatoires plus élevé, mais on constate vraiment peu de différences.
La fragilité est associée à une augmentation des évènements cardiovasculaires mais ne parait pas modifier l’effet de la pitavastatine
Kristine M. Erlandson University of Colorado Anschutz Medical Campus, Aurora, CO, USA
Cette analyse post-hoc de la même étude REPRIEVE visait à examiner l’effet de la fragilité sur les MACE et l’efficacité de la pitavastatine selon le niveau de fragilité. Un peu plus de 7700 participants (40-75 ans) ont été randomisés entre pitavastatine (4 mg) et placeboPlacebo Substance inerte, sans activité pharmacologique, ayant la même apparence que le produit auquel on souhaite le comparer. (NDR rien à voir avec le groupe de rock alternatif formé en 1994 à Londres par Brian Molko et Stefan Olsdal.) La fragilité a été mesurée en trois catégories: non-fragile (68%), pré-fragile (28%), fragile (4%).

L’incidence des MACE augmentait avec la fragilité: 4,51/1000 personnes-années (PY) chez les non-fragiles, 9,88/1000 PY chez les pré-fragiles et 14,39/1000 PY chez les fragiles. Le risque de MACE était 1,72 fois plus élevé chez les pré-fragiles et 2,15 fois plus élevé chez les fragiles (p <0,0001).
La fragilité ne semble pas influer sur l’effet de la pitavastatine.
Valeur pronostique de l’accélération de l’âge épigénétique chez les PVVIH ayant une infection bien contrôlée
Patricia Martínez-Martín La Paz University Hospital, Madrid, Spain
L’accélération de l’âge épigénétique (EAA) a une valeur pronostique dans la population générale, mais son rôle chez les PVVIH ayant une charge viraleCharge virale La charge virale plasmatique est le nombre de particules virales contenues dans un échantillon de sang ou autre contenant (salive, LCR, sperme..). Pour le VIH, la charge virale est utilisée comme marqueur afin de suivre la progression de la maladie et mesurer l’efficacité des traitements. Le niveau de charge virale, mais plus encore le taux de CD4, participent à la décision de traitement par les antirétroviraux. durablement indétectable reste incertain. Différents biomarqueurs épigénétiques peuvent être utilisés (NDR : et ils sont nombreux !)

Cette étude rétrospective porte sur 120 PVVIH suivies pendant 10 ans, avec analyse de la méthylation de l’ADN sanguin pour six biomarqueurs épigénétiques du vieillissement. Les événements cliniques analysés incluaient des maladies liées à l’âge (diabète, hypertension, ostéoporose, cataractes, démence) et des événements graves non liés au sida (SNAEs). Les participants majoritairement masculins (76,6 %), âge médian 44,6 ans, suppression virologique depuis 7,5 ans, 77 % fumeurs actuels ou anciens.
Au total, 70 événements ont été enregistrés: 23 liés à l’âge, 20 SNAEs et 27 combinés. Les différents scores épigénétiques donnent des résultats différents en fonction des évènements: une augmentation d’un an du score GrimAge Acceleration (GrimAA) et PhenoAge Acceleration (PhenoAA) était associée à un risque accru de SNAEs de 9% (p=0.014) et 6,7% (p=0.04), respectivement. GrimAA et PhenoAA étaient associés à un risque multiplié par 4 de cancers non-classant sida (p=0.014) et par 6,5 pour GrimAA (p=0.003). GrimAA était lié à un risque multiplié par 5 de décès (p=0.032).
Les autres biomarqueurs (Horvath, Hannum, DNAmFitAge, DNAmTL) n’étaient pas significativement associés aux événements étudiés.
En conclusion, GrimAA est un biomarqueur prédictif des SNAEs, NADCs et de la mortalité chez les PVVIH ayant un bon contrôle virologique, et pourrait être utilisé pour évaluer les risques à long terme dans cette population.
Le sémaglutide stabilise l’age épigénétique chez les PVVIH lipohypertrophiques
Michael J. Corley Weill Cornell Medicine, New York, NY, USA
Le sémaglutide, un agoniste du GLP-1, réduit le poids et améliore les maladies cardiométaboliques. Son impact sur le vieillissement épigénétique accéléré lié au VIH reste inconnu. Cet essai clinique randomisé, en double insu, évalue ses effets sur le vieillissement épigénétique chez des personnes atteintes de lipohypertrophie associée au VIH. Comme dans l’étude précédente, des algorithmes d’horloges épigénétiques de 1ère, 2ᵉ et 3ᵉ génération ont été utilisés pour estimer l’âge biologique et son évolution (par analyse de la méthylation de l’ADN sanguin) chez 84 participants (45 sous sémaglutide, 39 sous placebo) pendant 32 semaines. L’âge moyen était de 49,2 ans, 35 % de femmes, BMI moyen 34,3 kg/m², et CD4+ moyen de 794 /mm³.

Dans le groupe placebo, l’accélération annuelle de l’âge épigénétique est de 1,9 à 2,7 ans selon les horloges utilisées. Dans le groupe sémaglutide, on constate une stabilisation ou une légère diminution du vieillissement épigénétique (-0,04 à -0,58 an/an), variable selon les horloges.
La réduction du vieillissement épigénétique était significative pour PCGrimAge (p=0.02) et DunedinPACE (p=0.02). Un PCGrimAge élevé au départ était associé à une plus grande perte de BMI sous sémaglutide (p=0.02).
En pratique, le sémaglutide ralentit le vieillissement épigénétique chez les PVVIH atteintes de lipohypertrophie et ces résultats suggèrent un effet potentiel sur le vieillissement biologique, sans qu’on connaisse sa durabilité.
Le letermovir améliore le profil immunologique et les scores fonctionnels liés à l’âge chez les PVVIH traitées
Sara Gianella Weibel, University of California San Diego, La Jolla, CA, USA
Le but de cet essai clinique est de savoir si l’utilisation du letermovir chez des PVVIH permet de réduire l’inflammation. Une augmentation très significative du sTNFR2 à 8 semaines chez les personnes recevant le letermovir a amené à arrêter les inclusions précocement pour futilité. On ne dispose donc des données que des 40 premiers patients qui ont poursuivi le traitement jusqu’à ß, au lieu des 120 prévus initialement.

Les marqueurs inflammatoires s’améliorent dans le groupe letermovir par rapport au groupe contrôle: diminution significative des marqueurs inflammatoires IL-6R (-10 %, p<0.001) et IL-1b (-29 %, p=0.005) dans le groupe letermovir, réduction des titres d’IgG anti-CMV (-28 %, p<0.001) et des CD8 (-119 cellules/mm³, p=0.024), avec une augmentation du ratio CD4/CD8 (+14 %, p=0.008). Enfin, on note une amélioration de la force physique dans le groupe letermovir, le test de la chaise est amélioré de 1,7 secondes par rapport au groupe contrôle (-15 %, p=0.002). Le grip strength, la vitesse de marche et score de fragilité de Fried étaient également améliorés mais de façon non significative. Cette amélioration était corrélée à la réduction des marqueurs inflammatoires IL-1b et IL-6R et à l’augmentation du ratio CD4/CD8.
En pratique, le letermovir semble d’abord induire une inflammation, mais a ensuite entraîné une réduction soutenue de l’inflammation, une amélioration immunologique (CD4/CD8) et une meilleure fonction physique. Ces résultats suggèrent que la suppression du CMV asymptomatique pourrait ralentir le vieillissement immunologique et fonctionnel des PVVIH.
L’oratrice a qualifié ses résultats de « Résultats les plus probants des 20 dernières années », mais avec seulement 40 patients, on a un peu du mal à se joindre à son enthousiasme. D’autres études vont être nécessaires pour infirmer ou confirmer, d’autant plus que le Dr J.-P. Routy de Montréal, dans la séance de questions, a signalé un essai identique venant de se terminer (avec seulement 3 mois de letermovir) et n’ayant retrouvé aucun effet.
Cet article a été précédemment publié sur le site du COREVIH Bretagne à l’occasion de la CROICROI «Conference on Retroviruses and Opportunistic Infections», la Conférence sur les rétrovirus et les infections opportunistes annuelle où sont présentés les dernières et plus importantes décision scientifiques dans le champs de la recherche sur le VIH. 2025. Nous le reproduisons ici avec l’aimable autorisation de l’auteur.