Une étude1Impact of accessing care at an advanced stage on mortality in PWH in France (2002-2016) Potard Valérie, Gassama Malamine, Lanoy Emilie, Abel Sylvie, Bani Sadr Firouze, Bregigeon Sylvie, Caby Fabienne, Denis Blandine, de Truchis Pierre, Martin-Blondel Guillaume, Piroth Lionel, Ursenbach Axel, Costagliola Dominique, Grabar Sophie for the ANRS CO4 FHDH Late presentation study group souligne une nouvelle fois l’importance du diagnostic précoce, pour diminuer le fardeau de l’infection à VIHVIH Virus de l’immunodéficience humaine. En anglais : HIV (Human Immunodeficiency Virus). Isolé en 1983 à l’institut pasteur de paris; découverte récemment (2008) récompensée par le prix Nobel de médecine décerné à Luc montagnier et à Françoise Barré-Sinoussi. et améliorer le pronostic vital des personnes nouvellement diagnostiquées. Sophie Grabar, médecin de santé publique à l’Inserm et à l’hôpital Saint-Antoine (AP-HP, Sorbonne université) est revenue lors d’un point presse de l’ANRS-MIE le 14 mars sur un travail présenté à la CROI 2024, qui explorait l’impact sur la mortalité d’une prise en charge tardive des personnes atteintes par le VIH entre 2002 et 2016 (.pdf du poster). Si des travaux ont déjà souligné l’impact délétère de la prise en charge tardive sur la survie des PvVIHPVVIH Personne vivant avec le VIH cette nouvelle étude visait à évaluer l’impact des thérapeutiques, par exemple les inhibiteurs d’intégrase introduits en 2014.
Les chercheurs ont analysé les données de la cohorte hospitalière ANRS-CO4 (FHDH). Ont été incluses 64 400 personnes, nouvellement prises en charge pour une infection VIH-1 entre 2002 et 2016, et ayant bénéficié au moins d’un suivi avant le 31 décembre 2021. Parmi elles, 28,4% étaient prises en charge à un stade avancé, (- de 200 CD4 ou une pathologie classant-sida); 20% étaient à un stade intermédiaire (entre 200 et 350 CD4) et 51% à un stade précoce, défini par soit une primo-infectionPrimo-infection Premier contact d’un agent infectieux avec un organisme vivant. La primo-infection est un moment clé du diagnostic et de la prévention car les charges virales VIH observées durant cette période sont extrêmement élevées. C’est une période où la personne infectée par le VIH est très contaminante. Historiquement il a été démontré que ce qui a contribué, dans les années 80, à l’épidémie VIH dans certaines grandes villes américaines comme San Francisco, c’est non seulement les pratiques à risques mais aussi le fait que de nombreuses personnes se trouvaient au même moment au stade de primo-infection. soit +350 CD4.
Peu d’amélioration depuis 2014
Les chercheurs ne mettent pas en évidence de réduction du risque de décès avant ou après 2014: l’incidence cumulée de décès à 5 ans était de 6 % pour les personnes atteintes du sidaSida Syndrome d’immunodéficience acquise. En anglais, AIDS, acquired immuno-deficiency syndrome. de 4,2% pour les personnes avec moins 50 CD4, 2,5% pour celles qui avaient entre 50 et 200 CD4, et 0,9% pour celles qui étaient prises en charge à un stade précoce. Sophie Grabar précise: «Les personnes prises en charge au stade sida avaient un risque de décès multiplié par 18 dans les six premiers mois, et encore multiplié par deux, quatre ans après cette prise en charge. Pour les personnes avec moins de 50 CD4, le risque de décès dans les six premiers mois était dix fois plus élevé que celles prises en charge à un stage précoce, risque encore multiplié par sept pour les personnes entre 50 et 200 CD4.»
De son côté, Yazdan Yazdanpanah, directeur de l’ANRS-MIE, résume: «Si vous êtes diagnostiqués tôt, vous avez moins de 1% de risques de mourir dans les cinq ans; si vous arrivez au stade sida, c’est quasiment 6%.» Et les deux médecins de rappeler que les choses restent «dramatiquement les mêmes». «Malgré les politiques de dépistage et l’accès aux soins assez favorable en France, la prise en charge à un stade avancé reste fréquente, avec peu d’amélioration depuis 2002, conclut Sophie Grabar. Et un accès tardif aux soins reste associé à un risque accru de décès, même après quatre ans de suivi.»
Cette étude souligne donc une nouvelle fois l’importance du diagnostic précoce. Et elle nous rappelle que, si l’importance de ce dernier est souvent évoqué pour réduire l’exposition au VIH produite par des personnes infectées sans le savoir, le diagnostic précoce bénéficie directement d’abord et avant tout à la personne concernée; le bénéfice populationnel ne venant que par surcroît.