Un 6e cas de guérison fonctionnelle du VIH rapporté à l’occasion de l’IAS 2023

Un nouveau cas de rémission du VIH a été présenté en amont de l’ouverture de la conférence internationale scientifique sur le VIH, l’IAS 2023. Si ce patient a bénéficié, comme les cas précédents, d’une greffe de moelle osseuse, le donneur n’était cette fois-ci pas porteur de mutation conférant une résistance naturelle face au VIH.

Logo de l'IAS 2023

Le 6e cas de rémission fonctionnelle a été présenté au public par Asier Sáez-Cirión, responsable de l’unité Réservoirs viraux et contrôle immunitaire à l’Institut Pasteur, et Alexandra Calmy, responsable de l’Unité VIH aux Hôpitaux universitaires de Genève (HUG), quelques jours avant le lancement de la 12e conférence IAS. Ce nouveau cas, qu’on appelle déjà le Patient de Genève, a connu une rémission suite à une greffe de moelle osseuse dans le cadre de son traitement pour le cancer, comme les cinq autres cas connus de guérison probable de l’infection par le VIHVIH Virus de l’immunodéficience humaine. En anglais : HIV (Human Immunodeficiency Virus). Isolé en 1983 à l’institut pasteur de paris; découverte récemment (2008) récompensée par le prix Nobel de médecine décerné à Luc montagnier et à Françoise Barré-Sinoussi. (patients de Berlin, de Londres, de Düsseldorf, de New York et de City of Hope). 

C’est d’ailleurs le consortium IciStem, dont l’équipe d’Asier Sáez-Cirión fait partie, qui avait publié dans la revue Nature Medicine le troisième cas de rémission du VIH après une greffe de moelle osseuse en février 2023, celui du patient de Düsseldorf. Ce nouveau cas fera l’objet d’une présentation orale à Brisbane le 24 juillet.

Pas de mutation de CCR5∆32 chez le donneur

Le patient, qui vit avec le VIH depuis le début des années 1990, a toujours suivi un traitement antirétroviral. En 2018, il a subi une greffe de cellules souches pour traiter une forme agressive de leucémie. La singularité de ce nouveau cas réside dans la provenance de la greffe: cette fois, le donneur ne portait pas la mutation CCR5∆32, contrairement aux donneurs de moelle de toutes les précédentes rémissions. Cette rare mutation génétique confère une résistance naturelle aux cellules face au VIH. 

Par conséquent, les cellules du patient de Genève restent susceptibles d’être infectées par le VIH, même après la greffe. Mais un mois après la greffe, les tests ont révélé que ses cellules sanguines avaient été entièrement remplacées par celles du donneur, accompagnées d’une baisse significative du nombre de cellules infectées par le VIH. Le traitement antirétroviral a été progressivement réduit puis arrêté définitivement en novembre 2021.

Les analyses effectuées au cours des 20 mois qui ont suivi l’arrêt du traitement n’ont révélé aucune particule virale, aucun réservoir viral activable, ni aucune augmentation des réponses immunitaires contre le virus dans l’organisme du patient. 

Ces résultats suggèrent que la greffe a été extrêmement efficace et que toutes les cellules infectées par le VIH ont été remplacées ou éliminées. Une autre hypothèse est que les traitements immunosuppresseurs administrés après la greffe ont eu un effet bénéfique sur le patient, le protégeant de l’infection.

Il est à noter que ces résultats n’excluent pas la possibilité que le virus persiste encore dans l’organisme. Cependant, ils fournissent suffisamment de preuves pour que l’équipe scientifique considère le cas du patient de Genève comme un cas de rémission de l’infection par le VIH.

Un traitement non généralisable

Ce développement offre de nouvelles perspectives sur notre compréhension de l’élimination et du contrôle du VIH, avec des implications potentielles pour l’élaboration de futurs traitements. C’est ce que déclare Asier Sáez-Cirión: «Bien que ce protocole ne soit pas transposable à large échelle à cause de son agressivité, ce nouveau cas apporte des éléments inattendus sur les mécanismes d’élimination et de contrôle des réservoirs viraux, qui seront importants pour l’élaboration de traitements curatifs du VIH».

L’IAS 2023

La 12e conférence IAS sur la science du VIH est sur le point de commencer, à Brisbane, en Australie, et virtuellement, du 23 au 26 juillet 2023. La très influente IAS se tient en alternance avec la Conférence mondiale, et a lieu tous les deux ans. Cette conférence présente les avancées critiques en matière de recherche fondamentale, clinique et opérationnelle sur le VIH, mettant en avant les découvertes qui transforment la science en applications pratiques dans la réponse face au VIH/sida.

Gageons que cette conférence sera l’occasion de rappeler, une fois encore, que ce type de protocole, important en termes de recherche, n’est pas une solution thérapeutique envisageable pour l’ensemble des personnes vivant avec le VIH. La fin de l’épidémie ne sera atteignable que grâce à une mobilisation scientifique, politique et financière en soutien à la mobilisation des communautés et des professionnels de santé, qui mettra l’accent et les moyens nécessaires à rendre la prévention de la transmission du VIH accessible à toutes et tous.

Bibliographie

Absence of viral rebound for 20 months without antiretrovirals after allogeneic hematopoietic stem cell transplantation with wild-type CCR5 donor cells to treat a biphenotypic sarcoma, presentation orale, IAS 2023, Juillet 2023.
Asier Sáez-Cirión, Anne-Claire Mamez, Véronique Avettand-Fenoel, Paul Thoueille, Mitja Nabergoj, Maxime Hentzien, Ellen Mereles Costa, Maria Salgado, Monique Nijhuis, Adeline Melard, Elise Gardiennet, Valérie Monceaux, Caroline Passaes, Anais Chapel, Federico Perdomo-Celis, Annemarie Wensing, Javier Martínez Picado, Sabine Yerly, Mathieu Rougemont, Alexandra Calmy; and ICISTEM study group.