Une zoonose endémique
Le virus Crimée-Congo est un Nairovirus infectant de nombreux animaux réservoirs : bétail (zébu), oiseaux (calao, hérons), rongeurs. Sa transmission se fait par des tiques, en particulier celles du genre Hyalomma. Cette zoonose entraîne des avortements et une forte mortalité chez le bétail, particulièrement chez les moutons. Le virus et les tiques vectrices sont répandus en Europe orientale, au Moyen-Orient, en Asie et en Afrique.
La transmission à l’être humain est possible par la piqûre d’une tique adulte infectée, et également par le contact direct avec le sang ou les fluides corporels d’un animal ou d’un être humain infecté (lors de la courte période durant laquelle le virus circule dans le sang). La fièvre hémorragique de Crimée-Congo tient son nom d’une première description de cette maladie en Crimée en 1944, chez des militaires soviétiques, puis au Congo en 1956. L’association des deux noms a donc donné le terme de fièvre hémorragique Crimée-Congo.
Une épidémie en Irak en 2022 a retenu l’attention de l’OMS : entre le 1ᵉʳ janvier et le 22 mai 2022, les autorités sanitaires ont signalé 212 cas de FHCC, dont 115 (54%) étaient des cas suspectés et 97 (46%) des cas confirmés en laboratoire. Il y a eu 27 décès au total, dont 13 dans des cas confirmés en laboratoire [taux de létalité de 13%]. La plupart des cas concernaient des personnes en contact direct avec des animaux, éleveurs de bétail ou bouchers.
Symptômes
Généralement, les symptômes apparaissent de manière brutale et correspondent principalement à de la fièvre, des myalgies (douleurs musculaires), des troubles digestifs, des vertiges, une raideur et des douleurs de la nuque, des douleurs dorsales, des céphalées, une sensibilité des yeux et une photophobie (sensation de gêne provoquée par la lumière). Dans les cas sévères, ces symptômes peuvent être suivis par une hémorragie, un choc et une défaillance multiviscérale.
Traitement et prévention
La ribavirine est le seul antiviral efficace dans la fièvre de Lassa et la fièvre de Crimée-Congo, elle doit être administrée précocement, par voie intraveineuse.
La prévention est limitée à la protection individuelle des professionnels à risque par les répulsifs, car la lutte antivectorielle contre les multiples espèces de tiques est difficile.
Il est important de se protéger contre les piqûres de tiques, en portant des chaussures fermées et des vêtements couvrants de couleur claire afin de mieux repérer les tiques sur le tissu ; de privilégier les balades dans des chemins balisés ; de bien s’inspecter au retour des promenades. En cas de piqûre, il faut détacher immédiatement les tiques fixées à l’aide d’un tire-tique, une pince fine et désinfecter. En cas d’apparition de symptômes dans le mois suivant l’exposition, il faut consulter rapidement un médecin.
La FHCC fait partie des maladies humaines à déclaration obligatoire (DO) au même titre que les autres fièvres hémorragiques virales. Tout cas doit être déclaré par formulaire sans délai dès la suspicion étayée par un infectiologue référent aux autorités sanitaires (agences régionales de santé) par les professionnels de santé.
Surveillance en France ?
Les autorités de santé craignent un risque d’émergence de cas de FHCC, d’autant plus probable que l’extension géographique de la zone d’implantation des tiques devrait être favorisée par les changements climatiques. Les tiques Hyalomma aiment les climats secs et les périodes chaudes. C’est pourquoi on les retrouve en Corse ou dans le pourtour méditerranéen. En octobre 2023, le virus de la fièvre hémorragique de Crimée-Congo (FHCC) a été détecté chez des tiques du genre Hyalomma collectées sur des bovins élevés dans les Pyrénées orientales.
Dans un avis de mai 2023, l’Anses appelait à mettre en place une surveillance des tiques du genre Hyalomma à l’échelle nationale, en priorisant :
- les zones géographiques identifiées comme les plus à risque,
- le développement d’outils permettant de détecter précocement la présence de tiques Hyalomma et la circulation des agents pathogènes qu’elles transmettent notamment du virus de la FHCC et de parasites comme Theileria.
À noter qu’un programme de recherche participative, CiTIQUE, a été lancé en 2017. Coordonné par l’INRAE, il cherche à mieux comprendre l’écologie des tiques et des agents pathogènes qu’elles peuvent transmettre, et d’améliorer la prévention. Les citoyens sont appelés à contribuer à ce programme de recherche, en signalant des piqûres de tiques sur humains ou animaux, partout en France, ou en envoyant la tique aux chercheurs. L’ensemble des données récoltées est compilé et accessible sur ce site.
Sources
Anses, OMS, Santé publique France