Quelles orientations pour la Mildeca en 2023?

En quarante ans, la Mildeca a pris différentes formes et appellations… En cette veille d’élection présiden- tielle, l’évolution continue des addictions et des usages nous amène à une forte inquiétude. Cette institu- tion qui a su jouer un rôle majeur, parfois imitée dans différents pays, est aussi un symptôme de la vision sociétale, contextuelle des addictions, et de l’intérêt du pouvoir politique. Plaidoyer pour son retour!

La loi du 31/12/1970 n’avait doté la politique «de la drogue» ni d’unité ni de cohérence. Ce n’est qu’au début du mandat du président Mitterrand, que le décret 82-10 du 8 janvier 1982 créera une mission interministérielle permanente dont la fonction sera «d’orienter et de coordonner les actions d’information et d’éducation sanitaire du public ainsi que la formation des personnes appelées à intervenir dans la lutte contre la toxicomanie», sous la direction du ministère des Affaires sociales et de la Solidarité nationale. En 1985, elle évolue sous le nom de Mission interministérielle de lutte contre la toxicomanie (MILT) et est rattachée au Premier ministre. «Cependant cette révolution était en trompe-l’œil, car la Mission permanente peinerait à jouer son rôle moteur, faute de moyens, pendant plusieurs années»1La politique de la drogue : du vide institutionnel au tournant répressif (1982-1988) Alexandre Marchant, dans « L’Impossible Prohibition » (2018), pages 327 à 361, l’un des symptômes étant le passage de présidents et d’affichages le plus souvent peu efficaces. Ce constat conduira à la créa- tion, en 1989, d’une Délégation générale à la lutte contre la drogue, qui fusionne avec la MILT en 1990 pour devenir la DGLDT.

Les enjeux d’une réponse globale

Dans ces années 19902La politique de la drogue : du vide institutionnel au tournant répressif (1982-1988) Alexandre Marchant, dans « L’Impossible Prohibition » (2018), pages 327 à 361, il devenait urgent, pour réagir face à la catastrophe sanitaire du sidaSida Syndrome d’immunodéficience acquise. En anglais, AIDS, acquired immuno-deficiency syndrome. frappant les toxicomanes injecteurs, d’organiser une réponse globale. Portés d’abord par des généralistes « militants », puis par des prises de position de professionnels en faveur de l’introduction de la méthadone au sein des programmes de soins, les traitements de substitution s’imposeront : en 1994, la Direction générale de la santé proposera l’ouverture de programmes méthadone et un accès moins contraignant à la buprénorphine haut dosage. Cette évolution thérapeutique bousculera aussi les pratiques professionnelles des juges, habitués à voir des toxicomanes en manque et des intervenants sanitaires formés sur le modèle du sevrage et de sa post-cure et d’un accueil centré sur la demande. Elle s’inscrivait dans une politique sanitaire et sociale intégrant enfin les risques infectieux et sociaux. En 1996, en passant sous la responsabilité du premier ministre, la MILDT affiche dans ses statuts ce rôle interministériel qui correspond à ces enjeux d’une réponse globale, dépassant tel ou tel secteur ministériel.

Une évolution remarquée et un tournant

Historique de la coordination interministérielle

Durant cette période s’est opérée ce que Didier Fassin3FASSIN, Didier. 1998. « Les politiques de la médicalisation » dans P. AÏACH et D. DELANOË. L’ère de la médicalisation. Paris, Éditions Economica : 1-14. a appelé une «sanitarisation des politiques publiques»: elle ouvrait à une approche multidisciplinaire des questions d’usage de drogues, dépassant une conception historiquement binaire, entre psychanalyse et pénalisation, donnant une place centrale à la notion de risque et de sa réduction. Le «déverrouillage institutionnel» de 1994-1995 au niveau des pouvoirs publics, souhaitant asseoir la politique française de la drogue sur des fondements scientifiques, a nécessité la mise en place d’outils d’observation de l’évolution des consommations, y compris en population générale, ou de l’arrivée de nouveaux produits sur le marché autant que des pratiques professionnelles dans leur diversité. Ce fut fait avec la création en 1995 de l’Observatoire français des drogues et des toxicomanies (OFDT) avec son réseau Trend, le projet Sintes.

Crédits de la Mildt (en millions de francs)

La nomination de la magistrate Nicole Maestracci en 1998, donne une tonalité et une impulsion nouvelle pour cette politique, tel qu’indiqué dans un rapport du Sénat de 20004Rapport d’information no 28 (Sénat session 2001-2002) de M. Roland du Luart, fait au nom de la commission des finances, sur les crédits de la mission de lutte contre la drogue et la toxicomanie, déposé le 16 octobre 2001: «Dans son rapport, la Cour des comptes avait critiqué à juste titre la succession des présidents à la tête de la MILDT, souvent hauts fonctionnaires ou personnalités politiques dont cette présidence ne constituait pas l’unique fonction. Elle déplorait également l’insuffisante durée du mandat, soulignant que l’institution avait connu douze responsables entre 1982 et 1998 et que le poste de président avait même été laissé vacant de décembre 1995 à avril 1996. La nomination en juin 1998 de l’actuelle présidente a mis fin à cette pratique particulièrement préjudiciable pour l’activité et la crédibilité de la mission: la nouvelle présidente, au dynamisme de laquelle de très nombreux observateurs rendent hommage, est en poste depuis plus de deux ans et occupe cette fonction à temps plein. Votre rapporteur ne peut que l’en féliciter.»

Parallèlement à la dimension «interministérielle», une restructuration du champ d’action va être engagée, illustrée par l’emploi du vocable «addiction» lors de l’élaboration du plan de la MILDT en 1999.

Trois axes forts ont ainsi caractérisé l’action de la MILDT durant cette époque :

Définir une politique des drogues, incluant toutes les substances psychoactives, légales ou non, dont la dimension interministérielle précédemment évoquée s’incarnerait par le rattachement au Premier ministre et par les moyens financiers en regard pour que les différents ministères, réunis et représentés par des chargés de mission, puissent s’accorder ou se répartir les interventions. La production de données scientifiques (dans les différents secteurs ministériels concernés) a permis d’obtenir des définitions, des échelles de gravité, des orientations théoriques en termes de prise en charge…
Produire une parole concernée et engagée, interrogeant les frontières entre les modes d’interventions préventif, répressif, soignant et de réduction des risques (à l’image des «4 piliers» proposés en Suisse). La publication du fascicule Savoir plus, risquer moins et sa diffusion à des millions d’exemplaires et d’un Que sais-je ont contribué à diffuser la «colonne vertébrale» de la connaissance et de la position gouvernementale. Dans cette logique, le budget de la Mission a été porté à près de 300 millions de francs début 2002, correspondant à environ 46 millions d’euros.
Initier une approche «addictologie» centrée sur les comportements, réunissant les professionnels des secteurs «alcool, tabac et drogues» et leur donnant des assises pour un fonctionnement commun5Nicolas Fortané : Genèse d’un problème public : les « addictions ». D’un concept médical à une catégorie d’action publique ou la transformation des drug policies contemporaines . Université Lumière Lyon 2 – Sciences Po Lyon – Triangle UMR 5206, juin 2011. Sous la direction de Jean-Louis
Marie.
. Dans la suite du rapport Henrion qui avait étudié une possible dépénalisation en 1995, et du rapport P.J. Parquet sur la prévention de 1999 insistant sur les dimensions de comportements communs aux usages, d’autres rapports scientifiques, tel le rapport Roques de 19986La Dangerosité des drogues – Bernard Roques (Auteur) rapport au Secrétariat d’État à la santé, janvier 1999 ou le groupe de travail «Rascas» (rapport sur les aspects semblables et les aspects spécifiques des différentes addictions) de 2000-20017Réflexions sur les aspects communs et les aspects spécifiques aux différentes addictions : Rapport dit « Rascas » ;N. Maestracci ; Paris MILDT 2001 vont alimenter cette réflexion. Elle posera les fondations de ce qui se développera ensuite avec la création par la DGS des Csapa, puis des filières d’addictologie hospitalières, des formations et diplômes nécessaires, etc. Ce mouvement se retrouve chez les professionnels, notamment avec la création de la FFA, en 2001, par l’Anit (devenue Fédération Addiction après sa fusion avec la F3A, la Fédération des acteurs de l’addictologie ambulatoire), la SFA, alors présidée par Jean-Dominique Favre, l’ANPA (devenue ANPAA puis Addictions France en 2021), ainsi que par la SFT (Société française de tabacologie).

2007-2022 : un budget et des politiques qui se dispersent
Projet de loi de finances pour 2021 (en millions d’euros) : Direction de l’action du Gouvernement
Mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives (Mildeca) – Sénat

En 2004, alors que Didier Jayle est président de la MILDT, la RdR, encore largement portée par les dispositifs expé- rimentaux financés par des budgets non pérennes, connaît une avancée cruciale avec son insertion dans la loi de Santé publique et dans les textes législatifs qui en découlèrent. Elle permit la création des Centres d’accueil et d’accompagnement à la réduction des risques des usagers de drogues (Caarud). Cette professionnalisation de la RdR, même si elle s’était faite sous couvert de lutte contre les maladies infectieuses, l’introduisait de fait dans le traitement des addictions.

Les tensions résultant de l’intégration des drogues légales, tabac et alcool, dans le champ d’action de la MILDT, ou les réponses à apporter aux travaux de l’OFDT objectivant l’échec de la loi de prohibition de 1970 à contenir la montée des usages de cannabis chez les adolescents (collégiens/lycéens) conduiront, dans le cadre du plan 2004-2008, à des campagnes spécifiques d’information et de sensibilisation aux dangers du cannabis et un dispositif de consultations spécialisées pour les jeunes usagers sera initié (Obradovic, 2009). Initialement nommé «Consultation cannabis et autres substances psychoactives», au risque de minimiser les problématiques d’usage et d’abus d’alcool chez ce même public, il sera pérennisé par la DGS sous l’appellation plus réaliste de Consultation jeunes consommateurs.
Enfin, dans un processus de concertation avec les différents acteurs concernés, l’ouverture de communautés thérapeutiques, expérimentées sous le précédent mandat, permettra de tourner la page d’expériences malsaines tout en revalorisant en France les approches groupales.

Estimé à 46 M d’euros en 2002, le budget de la Mildeca ne cessera de baisser à partir de 2009, ainsi qu’en témoigneront différents rapports officiels (Sénat, IGAS8Igas, Rapport N° 2013-104R / IGA 14-024/13-053/01 / IGSJ 12-14, commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale). Cette perte des moyens et donc de capacités d’action (voir graphique page 31) sera inexorable, au fur et à mesure des lois de finances. Certaines modifications d’affectations (telle qu’une optimisation avec la DGS et l’Inpes avec le budget de Drogue alcool tabac info service, le Fonds addictions) l’expliquent partiellement, mais on ne peut que faire un lien entre cette diminution et la baisse d’influence progressive de la MILDT, même devenue Mildeca. Et elle s’accompagnera d’une réduction de son poids politique et de sa capacité d’innovation stratégique, sur fond d’une conception de l’action dans le champ des addictions qui se perd dans le paradoxe d’une lutte contre la drogue, sous l’angle de l’illusion prohibitionniste, assimilée à une «guerre» et d’une grande complaisance pour les enjeux économiques de l’alcool au nom de la double volonté «de laisser respirer l’économie» et de ne pas «emmerder» les Français9Couteron, Bisiou, Geoffard, Savary «En finir avec la guerre à la drogue», L’Esprit frappeur, 2021.

Deux autres évolutions plus inquiétantes se font jour:

  • l’approche centrée sur les comportements va commencer à s’émousser: la FFA s’était inquiétée que «l’approche qui met au centre les personnes et leurs conduites plutôt que les produits qu’elles consomment» se voit «remise en cause…»10Rapport moral FFA, mai 2003. Le Plan gouvernemental de lutte contre les drogues et les toxicomanies 2008-2011 accentuera une distinction par produit, isolant la cocaïne ou l’alcool, en prévoyant différentes mesures visant à «prévenir les conduites d’alcoolisation massive des jeunes publics et modifier les représentations par rapport à l’alcool» (MILDT, 2008). La difficulté à articuler le commun du comportement d’addiction et le spécifique des risques de chaque produit troublait l’approche globale récemment initiée.
  • L’interministérialité va aussi s’affaiblir11François Beck. Une histoire des mesures des usages de drogues. Le Courrier des Statistiques, 2009, pp.29-37. halshs-00583137. En 2007, l’élection de Nicolas Sarkozy à la présidence de la République se traduit par la nomination d’un nouveau président de ce qui est encore la MILDT, Étienne Apaire. Magistrat, il revendiquera une approche privilégiant «l’application de la loi» et les sanctions, créant notamment un stage payant pour sanctionner les premiers usages12«Sommes-nous dans un organe politique, comme sous la présidence de monsieur Apaire, qui accentue la répression ? Ou alors dans un travail de prévention, de réduction des risques? Il est temps de définir une politique précise». L’Impossible Prohibition, op.cit.. En 2012, Danièle Jourdain Menninger, inspectrice générale des affaires sociales, sera nommée, afin de refaire pont entre les différents «points de vue» ministériels. Elle s’y attachera avec une forte volonté, utilisant une structure toujours composée de représentants des différents ministères. Mais, manquant de moyens pour peser sur les décisions, la Mildeca aura du mal à imposer un point de vue commun aux différents courants du gouvernement, notamment sur l’importance des approches préventives qu’elle défend ou sur les évolutions légales nécessaires. Elle assurera une relance des CJC et de leur mission d’intervention, le déblocage du dossier SCMR, et obtiendra l’inscription de la RdR dans le champ du traitement des addictions dans la loi de Santé de 2016 ainsi que la tenue, la même année, d’une audition publique sur la réduction des risques, coprésidée par Alain Morel et Amine Benyamina.

Après son départ, la Mildeca semble perdre encore plus de moyens et d’impact, la création d’un Fonds Addictions présidé par l’Assurance-maladie –qui compense la baisse des crédits– déplace le centre de gravité de l’expérimentation sur des appels à projets, dans un contexte de concurrence entre acteurs qui nuit à l’intérêt commun et où l’absence d’une parole interministérielle publique forte manquera. Ces dernières années, la Mildeca, portée par le médecin Nicolas Prisse, se centre sur des actions ciblées qu’elle dynamise (comme celles en milieu de travail ou en direction des jeunes…) et finance des projets (en particulier territoriaux) fondés sur la signature de chartes d’action, de plate-formes et de journées thématiques…

Demain, nouvelles élections, nouveaux défis

Dans ce champ des usages, les décisions sont soumises aux pressions de l’opinion publique, aux enjeux des positionnements des partis politiques «de droite ou de gauche», aux lobbyings des acteurs économiques. Ce contexte pèse sur les modifications dans le parcours de prévention et de soins ou dans la loi, qui ne devraient dépendre que d’éléments scientifiquement produits dans la diversité des domaines concernés. D’où la nécessité d’une posture autonome et respectée de la Mildeca, et ce, vis-à- vis de l’ensemble des secteurs impliqués, qu’il s’agisse des ministères régaliens, des ministères en charge des questions économiques, sociales ou de santé et des différents acteurs professionnels. La capacité à faire se croiser les expertises, issues de ces différents secteurs et selon des modalités logiquement différentes, est un élément de l’efficacité des politiques des addictions.

Cette capacité à porter avec force, dans un cadre réellement interministériel, une action politique ET scientifique dans les différents champs de l’action publique reste utile. Cette parole, légitimée et légitime, devrait être référencée au Premier ministre. Car les défis ne manquent pas. Citons par exemple:

  • la poursuite et la diversification des actions de RdRD, dans un contexte où elle se voit contestée, notamment sa fonction d’accompagnement de l’usager. Les nouvelles substances et les nouvelles populations imposent d’innover en proposant de nouveaux outils de prévention, tout en développant les actions déjà validées et efficaces. Les salles de consommation à moindre risque, devenant «haltes soins addictions», sont dans cette situation.
  • l’évolution du système sous la double menace de la paupérisation des carrières des personnels du médico-social et d’une démobilisation des nouveaux professionnels face à ce champ complexe et du départ à la retraite des professionnels les plus engagés.
  • l’équilibre multidisciplinaire de la compréhension et des réponses: l’évolution des consommations, en lien avec l’évolution des populations, la transformation des savoirs biomédicaux et les expériences menées à l’étranger ou en France apportent des éléments de connaissance à intégrer, parfois rapidement, dans des processus décisionnels. La diversité des réponses et des décisions nécessaires, dans des secteurs médicaux et psychothérapeutiques, mais aussi sociaux, économiques, juridiques et techniques, doit composer avec une opinion publique évoluant mais encore fortement marquée par la répression ou la médicalisation. La Mildeca doit pouvoir déplaire pour porter une parole solide et documentée permettant de réguler l’espace intermédiaire, cette zone où se déploie la grande majorité des usages. Et ce n’est pas nouveau: en 2003, le rapport moral de la FFA se concluait sur un appel à la vigilance face au risque de «la réduction de l’addictologie à sa dimension médicale et hospitalière, au détriment de ses dimensions sociales, transdisciplinaire et humaine»13Morel A., Rapport Moral FFA, 2003. Ce point d’équilibre entre sanitarisation et pénalisation de l’usage, entre libéralisation et prohibition du commerce des marchandises particulières que sont «les drogues», pour une régulation conforme aux enjeux de santé, reste en permanence à défendre, comme le montrent les appétits commerciaux14Inserm. Réduction des dommages associés à la consommation d’alcool. Collection expertise collective. Montrouge : EDP Sciences, 2021 qui ont conduit à affaiblir le cadre protecteur de la loi Évin et dont certains se retrouvent autour des enjeux d’une nouvelle politique du cannabis. Et il y a tout juste dix ans, le Livre blanc de l’addictologie française, coordonné pour la FFA par le Pr Michel Reynaud et le Dr Alain Morel, répétait la même alerte: évoquant la société addictogène et ses questions écologiques et bioéthiques, s’inquiétant du «modèle de développement de la société moderne et ses conséquences sur les êtres humains», il affirmait que «les enjeux soulevés par les comportements d’usage, l’offre et la demande, sont sociétaux, économiques, sanitaires, éducatifs, sécuritaires. Ils nécessitent donc une politique globale. L’enjeu des addictions, c’est-à-dire le versant problématique et potentiellement dommageable de ces comportements est, lui, avant tout sanitaire et social»15Livre Blanc de l’addictologie française, 100 propositions pour réduire les dommages des addictions en France, p.13. Ces mêmes enjeux ont conduit récemment à une rupture au sein de la FFA, avec une grande majorité des acteurs de l’action médicosociale représentés par la Fédération Addiction qui n’y siège plus.

La légalisation du cannabis est un autre exemple de dissociation complète entre des logiques de savoir, de santé et des logiques politiques et de la difficulté d’agir de la Mildeca dans ce rôle d’animateur du débat et d’initiateur des réformes. Si elle avait été un acteur central du débat sur l’addictologie, sur la RdR, sur des outils comme le testing, les salles de consommation à moindre risque, les consultations jeunes consommateurs ou la relance de communautés thérapeutiques, la Mildeca n’occupe qu’une place en retrait dans les actuels débats concernant le cannabis. Que ce soit sur l’intérêt de sortir d’une politique de prohibition et de porter une politique de régulation, sur l’instauration d’une filière de cannabis à usage médical ou la commercialisation de produits contenant du CBD, ce sont d’autres acteurs qui ont conduit les débats, au risque de perdre l’équilibre transdisciplinaire nécessaire, les uns privilégiant l’économie, les autres se crispant sur des enjeux de sécurité quand d’autres avaient du mal à sortir de questions de soins.

Nous plaidons pour retrouver ou confirmer la mise en place en 2022 d’une Mildeca, réellement interministérielle permettant une parole unique et forte sur les addictions. Nous plaidons pour que les décisions soient prises non pas sur des critères électoraux, mais sur des éléments solides, biomédicaux, psychologiques et sociaux, argumentant et défendant une orientation et des actions co-construites avec les professionnels et les usagers.