AIDS 2018 — La Prep dans la vraie vie, effets divers

Au premier jour du vrai commencement de la 22e conférence internationale sur le sida à Amsterdam, la prophylaxie pré-exposition (Prep) est à l’honneur. Pas moins de 66 sessions et 200 abstracts lui seront dédiés cette semaine et la première interrogation concerne son implémentation dans la vraie vie. 

Les résultats de l’étude ANRS Prévenir devraient confirmer la volonté du gouvernement hollandais qui vient d’annoncer que la PrepPrEP Prophylaxie Pré-Exposition. La PrEP est une stratégie qui permet à une personne séronégative exposée au VIH d'éliminer le risque d'infection, en prenant, de manière continue ou «à la demande», un traitement anti-rétroviral à base de Truvada®. serait bientot dispensée aux Pays-Bas, et apporter de l’eau au moulin de pays qui la demandent. L’anthropologue suisse Sara Paparini (Graduate Institute of International and Development Studies) a étudié comment la communauté activiste londonienne s’est mobilisée autour du DIY Prep (Do It Yourself) pour accéder au traitement de manière informelle. Selon elle, la Prep induit une notion de responsabilité partagée de la prévention entre les partenaires tout en créant de nouvelles formes de militantisme1The responsibility of PrEP: A qualitative exploration of men who have sex with men’s use of informal PrEP in London.

Compensation du risque chez HSHHSH Homme ayant des rapports sexuels avec d'autres hommes. 

En Australie, ou la Prep est disponible depuis 2014, l’étude VicPrep2Attitudes regarding HIV, PrEP and condom use jointly predict risk compensation among men who have sex with men – findings from the VicPrEP implementation project, Melbourne; http://vicprep.csrh.org/ explore l’acceptabilité du Truvada® et son impact sur la prévention du VIHVIH Virus de l’immunodéficience humaine. En anglais : HIV (Human Immunodeficiency Virus). Isolé en 1983 à l’institut pasteur de paris; découverte récemment (2008) récompensée par le prix Nobel de médecine décerné à Luc montagnier et à Françoise Barré-Sinoussi. mais les résultats présentés à Amsterdam se sont focalisés sur la compensation du risque chez les HSH. De manière évidente, l’usage du préservatif avec les partenaires occasionnels a diminué rapidement parmi les utilisateurs, tous âges confondus. Et ce, d’autant plus lorsque le VIH n’était pas perçu comme une menace et que la Prep était perçue comme importante pour la prévention. Le Dr John de Wit (Utrecht University, Pays-Bas) qui a présenté ces résultats se demande si le message autour de la Prep ne devrait pas être amendé, pour intégrer la prévention des ISTIST Infections sexuellement transmissibles.  en recrudescence, et alors même que la Prep est une alternative au préservatif…

Également en provenance d’Australie, le jeune chercheur Mohamed A. Hammoud du Kirby Institute a mis en évidence des pratiques émergentes chez les HSH pratiquant le chemsexChemsex Le chemsex recouvre l’ensemble des pratiques relativement nouvelles apparues chez certains hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes (HSH), mêlant sexe, le plus souvent en groupe, et la consommation de produits psychoactifs de synthèse. 3The new MTV generation: Using methamphetamine, Truvada and Viagra to enhance sex and stay safe. L’occasion de définir une nouvelle catégorie: la MTV Generation, qui mélange methamphétamines, Truvada® et Viagra dans une stratégie de réduction des risques. La cohorte étudiée montre une augmentation de l’utilisation du Truvada® chez les HSH pratiquant le chemsex, depuis 2015. Les chercheurs suggèrent de promouvoir le Truvada® dans cet usage, surtout si les HSH n’utilisent aucune autre prévention.

Spécificité de la Prep chez les personnes transgenres

Deux études se sont préoccupées des effets de la Prep chez les personnes transgenres, avec des publics et des effets différents. Le travail mené en Thaïlande par Akarin Hiransuthikul (Thai Red Cross AIDS Research Centre) cherchait à étudier les interactions potentielles entre la thérapie hormonale et la Prep, notamment à identifier si les transgenres ne privilégiaient pas la première au détriment de la seconde. L’étude iFact4Drug-drug interactions between the use of feminizing hormone therapy and pre-exposure prophylaxis among transgender women: The iFACT study menée sur un petit échantillon —20 femmes— n’ayant pas reçu de traitement hormonal par injection dans les 6 mois précédents, ni subi d’orchiectomie5amputation chirurgicale d’un ou des deux testicules indique une réduction de 13% de la concentration du ténofovir dans le plasma en présence de la thérapie hormonale, ce qui laisse à penser qu’elle pourrait affecter l’efficacité de la Prep dans cette population. Une autre étude6Altered TDF/FTC pharmacology in a transgender female cohort: Implications for PrEP, impliquant des femmes et hommes transgenres, ainsi que des cisgenres, conclut quant à elle a une diminution de la concentration du ténofovir dans les tissus rectaux. Ces deux études ont été conduites sur de petits échantillons et demandent à être confirmées, mais elles attirent l’attention sur une population discriminée pour laquelle l’efficacité de la Prep pourrait être moindre.