Une nouvelle étude aux urgences avec des résultats exceptionnels
Les résultats viennent d’être publiés : parmi les 367 717 patients ayant consulté les urgences de cet établissement, 69 866 (19%) ont eu un prélèvement sanguin, mais seulement 5 322 patients (7.6%) ont été inclus. Cette proportion relativement faible s’explique par quelques refus, des oublis du personnel médical ou infirmier, ou des problèmes de langue pour le consultant. En effet, bien que le principe soit « l’opt out », s’agissant d’une recherche, la démarche devait être exposée au consultant. Au total, 137 (2.57%) ont été trouvés positifs pour le VIHVIH Virus de l’immunodéficience humaine. En anglais : HIV (Human Immunodeficiency Virus). Isolé en 1983 à l’institut pasteur de paris; découverte récemment (2008) récompensée par le prix Nobel de médecine décerné à Luc montagnier et à Françoise Barré-Sinoussi. 143 (2.69%) pour le VHB, et 152 pour le VHC (2.86%). Parmi ces derniers, 51,1% étaient positifs au VIH, 65,7% au VHB et 46,7% étaient des nouveaux diagnostics. Les taux de « lien aux soins » pour les positifs nouvellement découverts sont 91% pour le VHB, 96 % pour le VHC et 100% pour le VIH.
Les taux de positivité sont ici exceptionnellement hauts si on les rapproche des taux de 2,8 tests pour mille sérologies pour le VIH rapporté par LaboVIH en 2023 en Ile de France1 ou encore des taux de positivité rapportés en CeGIDDCeGIDD Centre gratuit d’information, de dépistage et de diagnostic (CeGIDD) des infections par les virus de l'immunodéficience humaine, des hépatites virales et des infections sexuellement transmissibles. Ces centres remplacent les Centres de dépistage anonyme et gratuit (CDAG) depuis le 1er janvier 2016. en 2022 pour le VHB (1,2%) et pour le VHC (0,7%) dans la cette même région2. Tout aussi impressionnants, les taux de liens aux soins qui doivent leur niveau à une organisation serrée et volontariste au sein de l’hôpital entre les urgences et les services médicaux de l’hôpital. Le lien aux soins est souvent le point faible du parcours de dépistage.
Tester seulement les patients prélevés : une stratégie qui optimise la charge de travail supplémentaire pour les soignants des urgences
La stratégie qui consiste à faire des sérologies seulement chez les consultants prélevés allège la démarche dans des services en surcharge permanente ; les expériences antérieures en Ile de France avaient été réalisées par des tests rapides du VIH, nécessitant une implication et un geste des infirmiers et infirmières qui deviennent incompatibles avec la pression sur les soignants3.
Si des études et des évaluations sont menées dans différents pays (en Espagne, au Danemark et aux Etats-Unis), seule l’Angleterre a intégré en 2022 à son programme d’élimination du VIH et des hépatites le dépistage aux urgences dans les zones à forte prévalencePrévalence Nombre de personnes atteintes par une infection ou autre maladie donnée dans une population déterminée. chez les personnes ayant un prélèvement sanguin et en mène une évaluation extensive en vue de la redéfinition de ce programme4.
Avancer ?
En France, le groupe d’experts, tout en s’affirmant favorable « à la proposition d’un dépistage du VIH et des hépatites B et C aux urgences avec consentement implicite (notification que le test sera réalisé sauf si le patient s’y oppose ou «opt-out») », modère sa position (ou l’affaiblit) en souhaitant « la poursuite des recherches pour mettre en œuvre les interventions les plus efficientes, favoriser la proposition d’un dépistage conjoint du VIH et des hépatites B et C et préciser les populations cibles (affiner les questions de ciblage en fonction des territoires) »5. Sachant que les recherches sur le dépistage du VIH aux urgences ont commencé en 2009, que les résultats ont été publiés depuis plusieurs années et que l’on dispose de nombreux paramètres épidémiologiques affinés, il est peu probable que l’on dispose rapidement de nouvelles informations pour décider ou pas mettre en place ce système de rattrapage.
- ARS Ile-de-France. VIH-IST_TdB_11-Île-de-France_2024_Version Finale-4.pdf ↩︎
- Tamandjou C, Delmas G, Chazelle É, et al Dépistage et diagnostic des hépatites B et C en CeGIDD en 2022, surveillance SurCeGIDD. Bull Épidémiol Hebd. 2024;(16-17):354-63. http://beh.santepubliquefrance.fr/beh/2024/16-17/2024_16-17_3.html ↩︎
- Casalino E, Bernot B, Bouchaud O, et al Twelve months of routine HIV screening in 6 emergency departments in the Paris area: results from the ANRS URDEP study. PLoS One. 2012;7(10):e46437. doi: 10.1371/journal.pone.0046437. Epub 2012 Oct 2. PMID: 23056308; PMCID: PMC3462802.
Crémieux AC, D’Almeida KW, de Truchis P et al. Undiagnosed HIV prevalence based on nontargeted screening in emergency departments. AIDS. 2012 Jul 17;26(11):1445-8. doi: 10.1097/QAD.0b013e328355373f. PMID: 22555169.
Leblanc J, Hejblum G, Costagliola D, et al . Targeted HIV Screening in Eight Emergency Departments: The DICI-VIH Cluster-Randomized Two-Period Crossover Trial. Ann Emerg Med. 2018 Jul;72(1):41-53.e9. doi: 10.1016/j.annemergmed.2017.09.011. Epub 2017 Oct 31. PMID: 29092761. ↩︎ - https://www.gov.uk/government/publications/bloodborne-viruses-opt-out-testing-in-emergency-departments/public-health-evaluation-of-bbv-opt-out-testing-in-eds-in-england-24-month-interim-report ↩︎
- https://cns.sante.fr/sites/cns-sante/files/2024/11/VIH-Prevention-et-depistage_Recommandation_Rapport-dexperts_241118.pdf ↩︎
Référence : Wong C, Le Hingrat Q, Salipante F, Mackiewicz V, Damond F, Larrouy L, Choquet C, Pospai D, Champenois K, Descamps D, Leblanc J, Loubet P, Casalino E, Ghosn J, Bouzid D. Combined screening of human immunodeficiency virus, hepatitis B virus, and hepatitis C virus in an emergency department: The URDEPTRIO cross-sectional study. Acad Emerg Med. 2025 May 14. doi: 10.1111/acem.70060. Epub ahead of print. PMID: 40369975