Le Covid-19 sous surveillance : retour d’expérience

Le Covid a non seulement perturbé la modernité technologique, les économies mondiales, la rationalité et la santé mentale de la population, il a aussi forcé la surveillance épidémiologique à s’adapter… Démonstration avec le Bulletin épidémiologique hebdomadaire du 5 novembre 2024.

SI-DEP, VAC-SI, Surv-ESMS… Ces acronymes ont rythmé les publications pendant la pandémie de CovidCovid-19 Une maladie à coronavirus, parfois désignée covid (d'après l'acronyme anglais de coronavirus disease) est une maladie causée par un coronavirus (CoV). L'expression peut faire référence aux maladies suivantes : le syndrome respiratoire aigu sévère (SRAS) causé par le virus SARS-CoV, le syndrome respiratoire du Moyen-Orient (MERS) causé par le virus MERS-CoV, la maladie à coronavirus 2019 (Covid-19) causée par le virus SARS-CoV-2. 19. Santé publique France consacre le BEH du 5 novembre 2024 aux « Systèmes d’information face à la pandémie de Covid-19 : défis majeurs et héritages », un important numéro d’une cinquantaine de pages qui relate la mise en place des dispositifs ou leur adaptation dans l’urgence sanitaire, pour orienter les décideurs et mettre en place la stratégie « tester, alerter, protéger » et freiner la propagation du virus. Un document de référence pour tous ceux qui s’intéressent aux systèmes de suivi des alertes en santé et leur impact sur la population et le système de santé.

« Plusieurs défis majeurs ont dû être relevés : 1) collecter et analyser de vastes quantités de données quasi exhaustives pour décrire la circulation virale au niveau territorial ; 2) fournir des indicateurs fiables et actualisés quotidiennement, dans le but de permettre une prise de décision rapide et éclairée ; 3) intégrer une vision longitudinale des données », peut-on lire dans l’éditorial de ce numéro, signé par Laëtitia Huiart, qui fut directrice scientifique de Santé publique France d’octobre 2020 à août 2024, et Caroline Alleaume, responsable à l’agence.

Volume des données à traiter, transparence, interconnexion entre les systèmes d’information, pseudonymisation… Les défis liés à la création ex nihilo d’outils sont explorés dans le BEH. Ainsi, SI-DEP, le système d’information de dépistage populationnel, a été mis en place le 13 mai 2020 de manière réactive, deux mois après la disponibilité des tests, pour recevoir d’une façon automatisée tous les résultats des tests (PCR, antigéniques) effectués quotidiennement par l’ensemble des laboratoires publics et privés, ainsi que les professionnels de santé habilités (France hexagonale et départements d’outre-mer)…

Taux d’incidence et taux de dépistage,
France entière (données au 30 juin 2023) fournies par Si-DEP, « Système d’information de dépistage populationnel » créé pour monitorer le taux de dépistage Covid de la population

Des dispositifs ex nihilo ou adaptés

VAC-SI, le système d’information issu de Vaccin Covid, constituant la base de données des vaccinations contre la Covid-19Covid-19 Une maladie à coronavirus, parfois désignée covid (d'après l'acronyme anglais de coronavirus disease) est une maladie causée par un coronavirus (CoV). L'expression peut faire référence aux maladies suivantes : le syndrome respiratoire aigu sévère (SRAS) causé par le virus SARS-CoV, le syndrome respiratoire du Moyen-Orient (MERS) causé par le virus MERS-CoV, la maladie à coronavirus 2019 (Covid-19) causée par le virus SARS-CoV-2. a, lui aussi, été créé rapidement, mais a connu plusieurs développements pour prendre en compte les lieux de résidence, suivre les vaccinations des professionnels de santé et des résidents en Ehpad… tout en gérant l’appariement avec les bases SI-DEP et SI-VIC. SI-VIC est un système déclenché pour les situations exceptionnelles. Créé en 2015 dans le contexte des attentats islamistes pour assurer l’identification et le dénombrement des victimes, offrir une visibilité de l’impact de l’événement sur l’offre de soins et faciliter l’accompagnement des victimes et de leurs proches, SI-VIC a été enrichi de données individuelles et médicalisées pour assurer le suivi en temps réel des hospitalisations liées au Covid à un moment où la saturation des capacités hospitalières constituait un indicateur majeur pour la gestion de la pandémie.

Un autre système d’information créé dans le sillage de la canicule de 2003 – où urgences et services funéraires ont été saturés – SurSaUD® (Surveillance syndromique des urgences et des décès), transmet quotidiennement de façon automatisée, sans sélection, les informations sur les recours aux urgences (Oscour), à SOS médecins (SOSM) et les décès. Il a été nécessaire d’ajouter à l’existant de nouveaux codes caractérisant les recours pour Covid et les diffuser dans l’ensemble du système d’urgence pour assurer un traitement homogène et fiable des recours pour Covid. Ainsi, 722 services d’urgences, 62 associations de SOS médecins, 15 062 communes et 1 400 hôpitaux documentent SurSaUD.

De nouveaux outils

Les établissements médicosociaux, au premier rang desquels les Ehpad, ont été dramatiquement percutés par le Covid. Il n’existait pas de système d’information épidémiologique pour ces établissements. Surv-ESMS a été mis en place dans tous ces établissements qui comportaient un hébergement, pour suivre la situation des personnes hébergées et des personnels et produire quotidiennement des indicateurs d’atteintes par le Covid et de décès. Cette mise en place dès mars 2020 et son adaptation progressive ont été un défi dans des établissements mal dotés et mal entraînés aux outils informatiques qu’exige un tel système.

Pour approcher l’exhaustivité et la représentativité de l’information obtenue en temps réel, il s’agit maintenant de tester la fiabilité des indicateurs issus des systèmes d’information. Orchidée (Organisation d’un réseau de centres hospitaliers impliqués dans la surveillance épidémiologique et la réponse aux émergences) va « tester la production réactive d’indicateurs spécifiques à partir des entrepôts de données de santé des établissements hospitaliers ».

« Notre capacité à capitaliser sur les systèmes d’information déployés pendant la crise de la Covid-19 est cruciale pour moderniser plus généralement nos systèmes de surveillance de routine », conclut l’éditorial. Car la pandémie, qui a aussi révélé des impacts sociaux différenciés, et des impacts à long terme, notamment sur la santé mentale, suggère un besoin de systèmes de surveillance plus inclusifs et interconnectés pour anticiper de futures crises de santé publique dans une perspective « Une seule santé ».