« Je prépare les gens à recevoir une intervention. Ici, pour obtenir de l’aide dans les services addicto ou de santé mentale, il y a une liste d’attente. Si on appelle un centre addicto, vous avez un premier rendez-vous rapidement, mais peut-être qu’il faudra attendre trois-six semaines avant d’entrer en cure. Qu’est-ce qui se passe pendant ce temps ? Nous proposons des interventions de préparation au traitement aux personnes en attente de ce traitement… Nous les préparons pour que cela améliore la rétention dans le soin et le résultat. Une psychologue travaillait avec moi une journée par semaine, et le lundi soir, nous avions un groupe de parole pour les gays chemsexeurs. Ça marchait bien, les gens se passaient notre contact de bouche-à-oreille. Et puis, le Covid…
Pendant cette période, nous avons été contactés par les autorités pour nous occuper des migrants, notamment des gays, persécutés dans leur pays et confinés ici avec leurs compatriotes… Nous avons donc développé une ligne d’appel en plusieurs langues, opérée par 12 volontaires, du lundi au samedi. Ils peuvent appeler et recevoir du soutien. Par ailleurs, nous avons aussi élaboré un livret sur le consentement sexuel, “Règles pour les backrooms et les saunas”. Ce sont des règles non écrites pour expliquer le fonctionnement de ces lieux à des jeunes migrants qui arrivent et qui se retrouvent exploités, entraînés dans le chemsexChemsex Le chemsex recouvre l’ensemble des pratiques relativement nouvelles apparues chez certains hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes (HSH), mêlant sexe, le plus souvent en groupe, et la consommation de produits psychoactifs de synthèse. en pensant que c’est la norme…
Aujourd’hui, nous lançons un nouveau projet chemsex basé sur le succès de cette ligne d’assistance et nos interventions de préparation au traitement. Il s’agit de voir si une ligne d’assistance téléphonique pour les personnes impliquées dans le chemsex serait utile, surtout pour ceux habitant en dehors des grandes villes où la prévalencePrévalence Nombre de personnes atteintes par une infection ou autre maladie donnée dans une population déterminée. du chemsex est tout aussi élevée. Mais où il manque de places pour se faire aider ! Nous aimerions donc voir si cela pourrait combler le vide afin que les gens puissent parler à quelqu’un et se connecter aux soins. J’ai un projet de recherche et d’entretien avec une vingtaine de chemsexeurs pour m’aider à élaborer cet outil. On voit de plus en plus de jeunes concernés par ce phénomène, j’ai été contacté par des étudiants de l’Université de Limburg qui veulent sensibiliser et informer les collégiens.
Par ailleurs, notre application Choices, disponible sur les mobiles, permet d’identifier les services à proximité, qu’il s’agisse de prise en charge de problèmes de drogues et d’alcool, de santé sexuelle et des groupes d’autosupport. C’est ce que j’appelle les soins communautaires, disponibles après les heures normales de travail. Quand tout est fermé, vous nous appelez.
Il faut créer des espaces de discussion sécures pour les gays. Nous vivons dans une ville où la consommation contrôlée de drogues est socialement acceptable. Quand on n’arrive plus à gérer sa consommation, on est stigmatisé par la communauté… C’est à ce moment-là que les gens viennent nous voir : ils veulent se sentir socialement acceptés, ils ont l’impression de ne plus pouvoir gérer et cherchent du soutien pour faire les premiers pas vers un plan pragmatique de prévention. Où est le soutien par les pairs ? Je ne pense pas qu’il soit nécessaire pour intégrer la communauté gay de faire du chemsex, et il faut passer ce message aux jeunes. »