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DOSSIER Drogues et RDR4 septembre 2015

La cigarette électronique

La plupart de ces articles sont à retrouver dans notre numéro spécial 74 de Swaps consacré à la cigarette électronique. 

Par la rédaction de vih.org
Vape
Sommaire
  • La cigarette électronique
  • Quand la réduction des risques s’applique aux drogues licites
  • Tout ce qu’on sait en 2014 de la e-cigarette
  • Quel avenir pour le vaporisateur personnel de nicotine?
  • Cigarette éléctronique : L’OMS veut interdire la vente aux mineurs
  • Réflexions d’un bloggeur qui connaît le risque et la santé
  • E-cigarette: Le point de vue de l’État
  • E-cigarette : Le point de vue de l’usager
  • Que savons-nous vraiment de la toxicité de la nicotine?
15 octobre 2014

Dossier E-cigarette — Quand la réduction des risques s’applique aux drogues licites

L’e-cigarette, un changement de paradigme: Intervention d’Alain Morel lors des 3e Rencontres sur la réduction des risques, organisées par la chaire d’addictologie du CNAM, la fédération Addiction, Aides et Vih.org/Swaps.

Par Alain Morel
RDR Tabac Sevrage Tabac Vape

Cet article est présent dans Swaps 74: Dossier e-cigarette

Swaps 74: Dossier e-cigarette

Cette 74e édition de Swaps consacre un dossier à la troisième rencontre sur la réduction des risques organisée par la chaire d’addictologie du Conservatoire national des arts et métiers (CNAM) avec la Fédération addiction, la Fédération AIDES et Swaps sur la e-cigarette. Intéressante par son côté innovant, technologique, électronique, mais surtout par son côté citoyen par lequel elle a fait irruption dans la société. Autant de raisons pour que le CNAM accueille cette première rencontre universitaire sur la e-cigarette. 

Mon intervention sera plus anthropologique que médicale. Il nous faut en effet prendre du recul, surtout dans un domaine qui touche à des comportements où ce qui est le plus fondamental est moins l’arrivée de nouvelles technologies que l’évolution radicale de nos représentations: l’autochangement prend le pas sur l’abstinence imposée. C’est un changement de paradigme. Je vais m’en expliquer.

D’abord, rappelons-nous quels ont été les dogmes et les croyances du XXe siècle qui ont fondé notre «logiciel» de compréhension des phénomènes addictifs et qui influencent encore profondément notre regard aujourd’hui. En premier lieu, rappelons que c’est ce XXe siècle qui a inventé la grande dichotomie entre les produits: d’un côté «la drogue», face obscure, interdite et dangereuse, et de l’autre, la face présentable, nos produits familiers que nous avons promu sur toute la planète. Cette dichotomie entre mauvaises et bonnes drogues a déterminé une dichotomie des politiques: pour les uns, la pénalisation comme instrument principal de prévention, la prohibition, c’est-à-dire l’interdit total jusqu’à l’exclusion des usagers, pour les autres, les produits licites et intégrés dans nos cultures, une simple réglementation, la modération, le bon usage.

La seconde croyance du XXe siècle, c’est la désignation de la «manie» (alcoolo-, morphino-,…) et de la «dépendance» comme problème principal. «Once addict always addict», cette formule du mouvement des Alcooliques Anonymes illustre parfaitement cette conception d’une dépendance-maladie irrévocable, «pour la vie», mortelle. Une maladie dont la seule issue est la coupure définitive avec le produit source de l’emprise et du malheur, c’est-à-dire l’abstinence.

Cette conception est sans doute utile pour des personnes qui trouvent là une façon de protéger leur santé, voire de rester en vie. Mais en affirmant que l’abstinence est la seule voie possible pour toute personne «addicte» et pour tout problème d’addiction, elle est devenue un dogme. Une réponse normative et morale, très peu adaptée dans une société de plus en plus diverse, de plus en plus addictogène, une fausse piste face aux enjeux de prévention et de santé publique, et un échec pour de nombreux traitements. Ce dogme reste pourtant ancré chez nos contemporains, y compris parmi les usagers et de nombreux spécialistes de ces questions.

Une bonne partie des tabacologues et des responsables de la santé publique partagent toujours cette conviction et ne manquent pas de l’appliquer à l’e-cigarette: à leurs yeux, elle n’a d’intérêt, comme les autres «techniques», que pour aider au sevrage.

Pourtant, toutes ces croyances du XXe siècle sont de moins en moins crédibles au regard de ce que nous avons appris durant ces dernières décennies. Les usagers s’aperçoivent que d’autres voies, d’autres façons de penser et d’intervenir, plus adaptées et plus efficaces pour eux, sont possibles. C’est exactement ce qui s’est passé dans le champ des toxicomanies confronté brutalement au sida dans les années quatre-vingt. C’est ce qui se passe à présent dans le champ des drogues licites. Ainsi commençons-nous à ne plus croire qu’il y aurait de bonnes et de mauvaises drogues, mais à constater que toutes provoquent des méfaits et des bienfaits. Ainsi, prenons-nous conscience que si nous nous attelons d’abord à réduire leurs méfaits et les risques de leurs usages, si nous savons mieux réguler nos comportements, nos résultats sont bien meilleurs pour notre santé et notre vie sociale qu’en menant indistinctement une «lutte contre».

L’objet symbolique du XXIe siècle sera-t-il la cigarette électronique?

Dans un article de Libération sur les objets symboliques du XXe siècle, la cigarette de tabac figurait en bonne place. À juste raison quand on mesure son extension dans le monde entier, sa symbolique d’un comportement social valorisé, les milliards de dollars rapportés, les millions de morts occasionnés, et tout cela en à peine un siècle! Mais cette image s’effrite aujourd’hui et c’est la cigarette électronique qui devient l’objet symbolique des nouvelles pratiques sociales, du changement de paradigme. D’autres objets sont significatifs des mêmes changements dans l’addictologie.

Dans le domaine des «toxicomanies», on peut citer la seringue stérile ou la méthadone, deux objets emblématiques de la réduction des risques pour les usagers injecteurs d’héroîne. On a vu combien la création d’une salle de consommation à moindre risque pour usagers de drogues a cristallisé les mêmes polémiques que le «shoot propre» d’il y a vingt ans. La méthadone a ouvert la voie de la substitution, c’est-à-dire l’utilisation d’une «drogue» pour un traitement de la dépendance qui n’exige plus de passer par le sevrage. Ce qu’essayaient de faire les usagers par eux-mêmes depuis longtemps (rappelons-nous l’usage de la codéine par de nombreux toxicomanes avant la mise sur le marché de la méthadone en France).

Aujourd’hui, l’alcoologie connaît une histoire comparable avec le «phénomène baclofène». Un médicament myorelaxant utilisé de façon empirique par un cardiologue qui essayait de se sortir lui-même de son alcoolisme. Il s’est aperçu qu’à partir d’une certaine dose il ne ressentait plus l’envie d’alcool mais pouvait en boire sans excès. Très vite de nombreux usagers et des médecins généralistes ont suivi cette voie, et ce traitement est prescrit aujourd’hui à des dizaines de milliers de personnes, suscitant des réserves, voire des oppositions des alcoologues. Comme pour la substitution, comme pour la e-cigarette, le baclofène est au centre de forums où s’échangent des informations, des conseils pratiques entre usagers et professionnels, et où se fédèrent les combats pour faire valoir leur expérience et leurs résultats. Comme la méthadone, le baclofène n’est pas le fruit de la recherche fondamentale, il n’est pas garanti a priori sans effets secondaires et sans risque. On n’en sait pas plus sur le baclofène à haut dosage et ses conséquences que sur la e-cigarette. Mais on en savait encore moins sur la buprénorphine à haut dosage (Subutex®) quand elle a été mise sur le marché pour la première fois comme médicament de substitution en 1996. Il y a d’ailleurs eu quelques problèmes (injections, mélanges…). Pour autant, on savait
déjà que les bénéfices étaient très largement supérieurs à ces risques. On le sait aussi pour la e-cigarette.
La e-cigarette a la particularité d’être un phénomène social qui dépasse le cercle des dépendants et médecins. Des millions de personnes l’ont expérimentée, et ce en quelques années, des petits magasins poussent comme des champignons, il en est question partout. Les discussions au bureau, en famille ou entre amis tournent souvent autour d’elle: comment l’utiliser, le plaisir, arrêter ou pas, etc. Tous ces échanges ont un impact sur le développement et l’évolution des pratiques.

Ces trois exemples sont en tout cas très symboliques de ce qui se passe au plus profond de la société. Ces «outils» ne font pas disparaître la dépendance, mais permettent d’en diminuer très fortement les dommages. Dans chaque cas, les associations d’usagers jouent un rôle central, en valorisant la dimension conviviale et d’autosupport, en montrant la construction des savoirs des usagers. Autant de signes du changement de paradigme: la réduction des risques, ça marche!

Pourquoi ça marche?

Pour le savoir, je vais m’inspirer du psychologue américain Stanton Peele et vous poser quatre questions. Première question: quelle est la substance la plus addictive que nous ayons sur le marché? C’est le tabac, de l’avis de tous les scientifiques. Deuxième question: qui, parmi vous, a fumé ou fume encore du tabac? Vous êtes une bonne majorité de la salle à répondre par l’affirmative, vous êtes donc une majorité à avoir une expérience personnelle du produit le plus addictif. Troisième question: parmi ceux qui ont répondu, quels sont ceux qui considèrent qu’ils ont arrêté le tabac? Une bonne moitié a levé la main et a donc réussi à arrêter le produit le plus addictif. Dernière question: parmi les personnes qui ont arrêté le tabac, quelles sont celles qui ont eu recours à une intervention extérieure pour cela (médecin, tabacologue, etc.). Aujourd’hui vous êtes deux, mais c’est toujours une toute petite partie. L’autochangement est donc le facteur principal des modifications de comportements, même par rapport au produit le plus addictif. Vous le saviez?

Ce test fonctionne à chaque fois, et toujours dans les mêmes proportions. Il démontre une chose essentielle mais passée sous silence: la très grande majorité des fumeurs parvient à arrêter le tabac par elle-même. La conséquence est capitale: pour aider les usagers à gérer leur addiction et à arrêter le tabac s’ils le veulent, la priorité est de leur donner les outils pour le faire eux-mêmes, à leur façon, le plus facilement possible. Certains ont besoin d’un accompagnement plus spécifique, voire d’un traitement, mais c’est une minorité. La RdR est efficace parce qu’elle permet aux usagers de s’approprier leur pouvoir d’agir sur leur plaisir, sur les risques qu’ils prennent et sur leur santé.

C’est exactement les raisons du succès de la e-cigarette: elle donne aux fumeurs un pouvoir d’agir sur eux-mêmes et sur leur addiction sans les priver du plaisir. Elle permet à l’usager de réaliser le changement au niveau qu’il choisit, elle peut faciliter l’arrêt1Borgne A. Quand on est fumeur, il faut vapoter. Entretien du 8 octobre 2013 à l’occasion du colloque THS à Biarritz. mais facilite d’abord la réduction des risques. Elle répond le mieux aux besoins des usagers comme le montre les enquêtes de satisfaction, mieux que les patchs et autres substituts, mieux que tous les traitements de sevrage. Elle est facilement adoptée, y compris dans les dépendances les plus graves. N’oublions pas que les personnes «addictes» aux drogues meurent davantage du tabagisme et de l’alcoolotabagisme que d’autres types de consommation. Il en est d’ailleurs de même pour les malades mentaux qui subissent de plein fouet la mortalité liée au tabac. Prendre en compte la question du tabac en addictologie comme en psychiatrie est essentiel. Or la e-cigarette facilite l’alliance entre usagers et professionnels pour cela. Les professionnels sont en effet souvent des utilisateurs de tabac et partagent facilement leur expérience de la e-cigarette avec les patients. Dans certains centres, on organise des groupes, on met en commun les informations récentes. Ici aussi, tout ce qui participe à la réflexion collective est productif de changements favorables à la santé.

Certes, aucun des outils de réduction des risques ne peut se prévaloir d’une inocuité totale à long terme. Mais opposer ce fait à leur mise à disposition du public, c’est méconnaître ce qu’est la réduction des risques et c’est dénier les immenses progrès qu’ils apportent. La prudence est utile pour ne pas tomber dans des excès d’enthousiasme, pas lorsqu’elle aboutit au blocage, traduisant alors la peur du changement.
Ce n’est pas toujours simple, mais il nous faut abandonner les dogmes du XXe siècle, changer notre regard et notre façon d’aborder les choses. Il nous faut distinguer la notion de soin de celle d’arrêt. Cela ne veut pas dire que la question de l’arrêt ne se pose pas, mais que les soins ne se limitent pas et ne commencent pas par la question de l’arrêt. Ce changement de paradigme heurte certains et peut être mal compris. L’arrivée des traitements de substitution aux opiacés en France, au début des années 1990, avait suscité les mêmes controverses, justement parce qu’ils venaient contredire les dogmes de la désintoxication à tout prix et de «la guerre contre la drogue». Mais leur impact très positif tant sur les personnes que sur la santé publique a mis tout le monde d’accord.

Ce que nous dit la science sur les effets et les limites de nos outils de réduction des risques doit être pris en compte. Attention cependant à la science qui se fait en dehors des réalités humaines, en dehors des pratiques sociales. La science des comportements ne se fait pas dans les laboratoires, elle se fait avec les personnes concernées, avec les usagers. à l’inverse, n’attendons pas tout de la RdR, elle ne répond pas à tous les problèmes et ne se substitue certainement pas à l’éducation préventive. Cette éducation qui nous rend responsables et acteurs, y compris face aux risques des addictions.

14 octobre 2014

Dossier E-cigarette — Tout ce qu’on sait en 2014 de la e-cigarette

Que sait-on de la cigarette électronique, de cet appareil qui a réalisé des ventes fabuleuses pour les derniers cadeaux de Noël? Peut-on encore parler de cigarette électronique? L’évolution du matériel a fait changer de concept, on ne fume plus, on vapote et c’est complètement différent.

Par Gerard Mathern
RDR Tabac Sevrage Tabac Vape

Cet article est présent dans Swaps 74: Dossier e-cigarette

Swaps 74: Dossier e-cigarette

Cette 74e édition de Swaps consacre un dossier à la troisième rencontre sur la réduction des risques organisée par la chaire d’addictologie du Conservatoire national des arts et métiers (CNAM) avec la Fédération addiction, la Fédération AIDES et Swaps sur la e-cigarette. Intéressante par son côté innovant, technologique, électronique, mais surtout par son côté citoyen par lequel elle a fait irruption dans la société. Autant de raisons pour que le CNAM accueille cette première rencontre universitaire sur la e-cigarette. 

L’utilisation en est très différente de celle séquencée d’une cigarette de tabac. Et cette distanciation existe aussi entre le vapoteur et le fumeur. Si vous voulez insulter un vapoteur, vous le traiter de fumeur, vous verrez ce qu’il va se passer. Il n’y a pas de fumée, mais de la vapeur, qui est un brouillard de microgouttelettes qui se transforment en quelques secondes en gaz.

L’utilisation en est très différente de celle séquencée d’une cigarette de tabac. Et cette distanciation existe aussi entre le vapoteur et le fumeur. Si vous voulez insulter un vapoteur, vous le traiter de fumeur, vous verrez ce qu’il va se passer. Il n’y a pas de fumée, mais de la vapeur, qui est un brouillard de microgouttelettes qui se transforment en quelques secondes en gaz.

Pour la première fois, on a aussi des organisateurs qui s’organisent.

Ils vont sur des forums. En ce qui concerne le matériel, on a une évolution avec un abandon progressif de ce qui ressemblait à une cigarette conventionnelle et, en même temps, une amélioration des performances de ces appareils qui ne dispensent plus la même quantité de nicotine qu’autrefois.

«Autrefois, c’était il y a deux ans!»

On ne peut plus comparer le vapoteur d’il y a deux ans à celui d’aujourd’hui. Il faut désormais prendre en compte la grande variabilité du matériel dans les études scientifiques. La première cigarette électronique ressemblait à une cigarette, le bout s’allumait en rouge ou en bleu quand on aspirait, l’aspiration déclenchait un microprocesseur qui chauffait la résistance et vaporisait le liquide.

Aujourd’hui, on a d’autres appareils, certains sont imposants, comme ceux fabriqués à Saint-étienne en titane, d’autres ont un petit écran où on peut lire différents éléments, et d’autres présentent différentes subtilités.

Quelle est l’utilisation actuelle?

On s’aperçoit que les vapoteurs utilisent des vapoteurs personnalisés (VP) à forte concentration de nicotine (18mg), ce qui montre que ceux qui l’utilisent ont besoin de nicotine. En ce qui concerne les arômes préférés, chacun peut composer son menu, dans la journée des arômes de tabac, de fruits, de menthol, il y a à peu près 150 arômes identifiés.
Les questions qui se posent sont: quels sont les dangers à court terme, directs et indirects? Quelle est la fonction d’une e-cigarette actuellement chez un fumeur?

Dangers directs

Qu’y a-t-il dans les liquides? Il y a du propylène glycol qui, on le sait, n’est pas toxique. Ce produit est utilisé dans les cosmétiques, en agroalimentaire et en pharmacie puisque le Foradil®, médicament pour les asthmatiques, en contient.

Le glycérol vient compléter l’action du propylène glycol en tant que produit dispersant, ce dernier n’est pas toxique en dessous de 250°C ; or, on ne les atteint pas avec la e-cigarette. En ce qui concerne les arômes alimentaires, il n’y a pas de combustion, donc pas de transformation de ces produits que l’on connaît bien. Il y a éventuellement 2% d’alcool, ce qui peut poser des problèmes chez les anciens buveurs ou chez la femme enceinte, mais on sait que certains e-liquides ne contiennent pas d’alcool du tout. Il y a eu des controverses, comme avec l’article de 60 millions de consommateurs, qui montrait que les produits étaient 9 à 450 fois moins concentrés dans la vapeur des e-cigarettes que dans le tabac conventionnel. On sait qu’il n’y a pas de monoxyde de carbone (CO), pas de goudrons en tant que produit qui conduit à la combustion. Les études réalisées, de plus en plus nombreuses, montrent qu’il n’y a pas de cytotoxicité, ni de toxicité pour le système cardiovasculaire.

Il n’y a pas d’effets adverses connus, en particulier sur le système adverse respiratoire.

Bullen et al.1Bullen C, Howe C, Laugesen M et al. Electronic cigarettes for smoking cessation: a randomised controlled trial. Lancet 2013;382:1629-37. ont montré qu’il n’y avait pas d’effets sur l’arbre respiratoire. Les doses de composés organiques volatils (COV) contenus dans ces produits ne sont pas reconnues dangereuses par la médecine du travail.

Dangers potentiels

Existe-t-il une expérimentation et un usage chez les non- fumeurs? Le danger étant de faire rentrer les non- fumeurs dans le tabagisme. Les études internationales à ce sujet ont montré que l’usage prolongé est extrêmement limité chez les non-fumeurs.

… indirects

Quant au vapotage passif, c’est un point important, il n’y a pas de CO dans une cigarette électronique, le monoxyde de carbone étant le toxique de l’arbre artériel. Quant aux COV, il y en a, mais les doses sont extrêmement faibles.

Et les jeunes

Y a-t-il un risque de les faire rentrer dans le tabagisme ? De nombreuses études ont été effectuées, dont une en Pologne, une autre en Angleterre, et qui montre que très peu de jeunes essayent et ceux qui le font sont les «essayistes», c’est-à-dire les ados qui essayent tout, qui ensuite basculent vers toute autre chose et qui, de toutes façons, auraient essayé le tabac, la chicha, le cannabis, etc. Nous n’avons pas de données sur l’usage régulier des jeunes, ni sur l’addiction à la cigarette par les jeunes, ni sur l’évolution du tabagisme chez les jeunes. On ne peut donc démontrer ni le négatif ni le positif de la cigarette électronique.

Impact sur le tabagisme

Parmi les vapoteurs, 97 % sont des fumeurs, et ils nous disent bien que leur envie de fumer disparaît ou diminue de manière significative, mais peu d’auteurs se sont consacrés à ces travaux.

Quelle est la fonction actuelle ? Tout d’abord la réduction des risques, puisque toutes les études montrent que les fumeurs ont réduit leur quantité de tabac à fumer et aussi leur taux de produits toxiques inhalés. Comme l’ex- pliquait J. Le Houzec, diminuer le nombre de cigarettes fumées dans la journée ne veut pas dire diminuer le nombre de toxiques inhalés, le fumeur va simplement moduler son mode de «fume». Quand on utilise la e-cigarette on ne va pas surtitrer les cigarettes que l’on va fumer après. Donc la cigarette électronique peut participer, et des études le montrent, à la réduction des risques.

Une étude très intéressante de Caponnetto2Caponnetto P, Polosa R, Auditore R et al. Smoking Cessation and Reduction in Schizophrenia (SCARIS) with e-cigarette: study protocol for a randomized control trial. Trials 2014;15:88. sur des schizophrènes, qui, en général, fument beaucoup, certains vont jusqu’à sept paquets par jour (le schizophrène meurt surtout du cancer du poumon), montre que la e-cigarette réduit de moitié la consommation de tabac dans la journée.

En ce qui concerne le sevrage, nous sommes dans l’inconnu scientifique. L’étude de Bullen1, publiée en 2013, méthodologiquement bien construite, n’a pas montré grand-chose, le matériel était très ancien, le suivi était téléphonique, un peu aléatoire et uniquement fondé sur le déclaratif, la population était très hétérogène. Dans les trois populations envisagées : vapotage avec 16 mg de nicotine, substitut nicotinique avec timbre à 21 mg et cigarette électronique placebo l’étude a montré qu’il n’y avait pas de différence significative entre les trois popu- lations. Cette étude a éventuellement montré qu’on était au même niveau que les substituts nicotiniques, mais sans grande fiabilité.

La méta-analyse de Dawkins et al.3Dawkins L, Turner J, Crowe E. Nicotine derived from the electronic cigarette improves time-based prospective memory in abstinent smokers. Psychopharmacology (Berl) 2013;227:377-84. a montré qu’environ trois quarts des vapoteurs ne fument plus ou beaucoup moins depuis qu’ils utilisent le VP. C’est un point important. Quatorze pour cent avaient réduit significativement le nombre de cigarettes fumées.

J.F. Etter4Etter JF. La vérité sur la cigarette électronique. Fayard. 2013. a montré que 76% vapotaient quotidiennement et fumaient moins de cigarettes de tabac. On sait aussi que lorsqu’on commence à vapoter, dans la plupart des cas, on continue.

Le VP aujourd’hui et la tabacologie

Les tabacologues ont pendant longtemps ignoré, snobé la cigarette électronique. Et ce sont les patients qui les ont sensibilisés, je peux en témoigner.

Vraisemblablement, ce n’est pas un produit gadget. Faut-il le considérer comme un médicament comme en Angleterre, où le statut du médicament n’est pas le même qu’en France? Faut-il le considérer comme un produit du tabac? L’industrie du tabac commence à y travailler de façon insidieuse. Pour le moment, c’est un produit de consommation courante qui est entre les deux, qui a un prix modéré, avec une souplesse d’acceptation de l’innovation technique, comme le disait D. Jayle. Mais, évidemment, il ne faut pas exclure les contrôles de qualité, de fabrication. Ce qui est intéressant, ce sont les prospectives du groupe financier américain Wells Fargo, qui ont montré qu’en 2020, le nombre de vapoteurs sera équivalent à celui des fumeurs. Et que le chiffre d’affaires des vapoteurs va dépasser celui des fumeurs à la fin de la décennie.

On va donc avoir une pression très forte sur ce marché. à la fin 2013, on avait prévu 1,8 milliard de dollars de chiffres d’affaires aux états-Unis, c’est ce qui s’est réalisé. On prévoit à la fin de la décennie 10 milliards de dollars et si les grands fabricants s’y mettent, on va doper le marché. Comment vont réagir les cigarettiers? Ils commencent à investir massivement. L’industrie pharmaceutique? Elle est étrangement absente. L’état? On ne sait pas, mais on va vite voir. Le VP, on l’a dit, est un produit entre 10 et 250 fois moins risqué que la cigarette, comment va-t-on prendre en charge des gens qui ont une pratique, sans problème de santé mentale, économique, sociale et sanitaire, c’est un problème éthique qu’il faut essayer d’aborder. Le statut de la nicotine serait-il à revisiter? Sûrement. La vigilance de toute façon est nécessaire.

L’avenir c’est quoi? D’abord, il faut observer. Observer le développement de cet usage massif d’un produit, qu’on aurait pu considérer comme un gadget, mais qui, finalement, ne l’est pas. En étude continue, on mesure ses effets, les premières remontent à trois ans, nous n’avons qu’un recul modéré sur ce dispositif. Ensuite, il faut affiner nos connaissances, et rester vigilants sur des dérives possibles. Aux états-Unis, certains savent utiliser leur cigarette électronique avec des bidouillages un peu dangereux. Surtout avec l’appropriation par l’industrie du tabac, on risque de voir apparaître dans les e-liquides des produits plus addictogènes, et là, il faudra revoir le discours.

En conclusion, pour la première fois, un dispositif nous a été imposé par nos patients, il ne vient ni de la pharmacie, ni de la médecine, ni de la science. Ce retard de prise en charge par la pharmacologie nous pose problème. C’est sous la pression imposée par les patients que l’on a dû revoir notre position initiale, qui était dubitative, voire de rejet. Quant à l’avenir, on peut penser qu’il se fera sur les marchés avec tout ce que cela comporte.

14 octobre 2014

E-cigarette — Quel avenir pour le vaporisateur personnel de nicotine?

L’utilisation du vaporisateur personnel (VP) de nicotine, appelé plus couramment cigarette électronique ou e-cigarette, a pris une ampleur inattendue. 

Par Jacques Le Houezec
RDR Tabac Sevrage Tabac Vape

Cet article est présent dans Swaps 74: Dossier e-cigarette

Swaps 74: Dossier e-cigarette

Cette 74e édition de Swaps consacre un dossier à la troisième rencontre sur la réduction des risques organisée par la chaire d’addictologie du Conservatoire national des arts et métiers (CNAM) avec la Fédération addiction, la Fédération AIDES et Swaps sur la e-cigarette. Intéressante par son côté innovant, technologique, électronique, mais surtout par son côté citoyen par lequel elle a fait irruption dans la société. Autant de raisons pour que le CNAM accueille cette première rencontre universitaire sur la e-cigarette. 

Comme l’a montré récemment l’enquête de l’Observatoire français des drogues et des toxicomanies (OFDT), entre 8 et 9 millions de Français l’auraient déjà essayé et 1 à 2 millions l’utiliseraient quotidiennement.

Malheureusement, les autorités sanitaires et les gouvernements proposent de l’encadrer trop sévèrement. En Europe, la Directive sur les produits du tabac qui vient d’être adoptée propose de limiter la concentration en nicotine des liquides à 20 mg/ml (une dose trop faible pour environ 25% des fumeurs), d’exclure la plupart des vaporisateurs actuels (réservoir de 2 ml maximum) et d’introduire des standards proches de l’industrie pharmaceutique (déposer un dossier qui ressemble à une autorisation de mise sur le marché [AMM]).

De même, aux États-Unis, la Food and Drug Administration (FDA) propose une réglementation qui est dénoncée par nombre d’experts comme trop contraignante (voir le site de l’AIDUCE).

Si ces réglementations sont mises en œuvre, cela se traduira pour les fumeurs les plus dépendants par un fort risque de retourner vers la cigarette, ou de ne jamais la quitter. Pour l’instant, en France, la situation n’est pas la pire, et l’Office français pour la prévention du tabagisme (OFT) vient même de publier des recommandations à destination des professionnels de santé (voir mon post du 30 avril).

2 septembre 2014

RDR — Cigarette éléctronique : L’OMS veut interdire la vente aux mineurs

Les experts de l’OMS estiment que sa consommation pose de «graves menaces» pour les adolescents et soulignent également un danger pour les fœtus, se prononçant pour une interdiction dans les espaces publics fermés. Une position qui n’est pas partagée par tous les spécialistes. 

Par Charles Roncier, Vih.org
OMS RDR RDR Tabac Vape

Dans un document de travail publié le mardi 26 août 2014 en vue de la réunion des Parties de la Convention cadre (CCLAT) qui aura lieu du 13 au 18 octobre à Moscou, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) recommande d’interdire la vente de cigarettes électroniques aux mineurs. 

L’agence reconnait pourtant que «l’exposition réduite à des substances toxiques que permet l’utilisation d’inhalateurs électroniques de nicotine bien réglementés par des fumeurs adultes réguliers en remplacement complet des cigarettes a des chances d’être moins toxique pour le fumeur que les cigarettes classiques. (…) Toutefois, on ignore actuellement l’importance de la réduction des risques.»

Une position non supportée par les données scientifiques existantes

Le Dr Jacques Le Houezec dénonce cette position sur son blog et affirme que «le problème est que rien de ce qui est avancé par Stan Glantz, ou par ce rapport largement inspiré, n’est supporté par les données scientifiques existantes».

Selon lui, «ni l’hypothèse de la porte d’entrée en tabagisme des jeunes, que même les données du CDC, utilisées par Glantz, ne montrent pas lorsqu’on les analyse vraiment, ni d’ailleurs les données françaises (Paris sans tabac) ou anglaises (STS), ni la dangerosité de la nicotine exagérée comme toujours, ni l’exposition passive au VP, ne sont basés sur des preuves solides, mais des données déformées et utilisées dans le but de faire peur et d’atteindre un objectif pré-établit».

Sur Europe 1, Jacques le Houezec a rappelé que «le premier danger, c’est la cigarette».

William Dab, Médecin, épidémiologiste, professeur titulaire de la chaire d’Hygiène et Sécurité du Cnam, la prudence soit cependant rester de mise: 

Pour l’heure, il est prématuré de confirmer la réputation que les fabricants de ces dispositifs cherchent à promouvoir quant au fait qu’ils seraient une alternative moins risquée que le tabac. On peut admettre que pour les fumeurs, la substitution est préférable. Mais l’industrie du tabac qui investit massivement dans l’e-cigarette va s’appuyer sur cet argument pour toucher de nouveaux publics et ceci justifie à mon sens les mises en garde.

— e-cigarettes : un écran de fumée?, Des risques et des Hommes.

A lire également

La 74e édition de notre revue Swaps consacre un dossier à la troisième rencontre sur la réduction des risques organisée par la chaire d’addictologie du Conservatoire national des arts et métiers (CNAM) avec la Fédération addiction, la Fédération AIDES et Swaps sur la e-cigarette.

7 octobre 2014

Tabac — Réflexions d’un bloggeur qui connaît le risque et la santé

Poser les termes du débat tel qu’il se pose dans la société. Avec un passé de chercheur et de décideur, faire la synthèse entre les connaissances scientifiques et les décisions de santé publique est intéressant. Mon blog «Des risques et des hommes» (NDR : Hors-ligne en 2024) du monde.fr est accessible depuis un an et est un lieu de réflexion, de débat et de pédagogie du risque, plus qu’un lieu de prise de positions. Dans le domaine du risque, on est le plus souvent dans l’incertitude. Comment une société comme la nôtre, comment nos systèmes de décision publique se comportent-ils face à des situations incertaines?

Par William Dab
Santé publique Vape

Cet article est présent dans Swaps 74: Dossier e-cigarette

Swaps 74: Dossier e-cigarette

Cette 74e édition de Swaps consacre un dossier à la troisième rencontre sur la réduction des risques organisée par la chaire d’addictologie du Conservatoire national des arts et métiers (CNAM) avec la Fédération addiction, la Fédération AIDES et Swaps sur la e-cigarette. Intéressante par son côté innovant, technologique, électronique, mais surtout par son côté citoyen par lequel elle a fait irruption dans la société. Autant de raisons pour que le CNAM accueille cette première rencontre universitaire sur la e-cigarette. 

Les deux grands magazines qui s’adressent aux consommateurs : 60 millions de consommateurs et Que choisir ont mis la e-cigarette en une de leur revue de septembre 2013 et l’on peut voir la confusion qu’ils font entre la notion de danger et celle de risque. Ces deux grands mensuels d’information réfutent le fait que la cigarette électronique soit inoffensive. On explique aux étudiants que le danger est une propriété intrinsèque d’une substance, que le risque est la proba- bilité que le danger se réalise, et que ce risque est fonction de la dose et de la concentration. Sur le blog «Des risques et des hommes», le «post» du 29 septembre 2013 a suscité des centaines de commentaires (reproduit ci-dessous). Pour introduire le débat, il est question de la prise de position de l’Institut national de la santé publique du Québec (INSPQ), meilleur document disponible en français en matière de pédagogie. Celui de l’OFDT est également un document de bonne qualité, mais celui de l’INSPQ est plus synthétique.

Premier constat : les lacunes de l’information

Les études publiées apportent des informations par- tielles sur les composants de la e-cigarette, les informations disponibles concernent plus particulièrement la cigarette électronique avec nicotine. La Food and Drug Administration (FDA), dans son analyse, précise que la e-cigarette contient des hydrocarbures aromatiques polycycliques, c’est-à-dire des goudrons. Surtout, et ce point est crucial, le fait que la sécurité sanitaire et nos outils d’évaluation des risques n’arrivent pas à suivre le rythme de l’innovation est intéressant. Pour être un partisan du principe de précaution, je n’en ai jamais fait un principe d’innovation, mais un principe d’innovation maîtrisée. Dans notre société, il y a une évolution des technologies incomparablement plus rapide que notre capacité d’évaluer les risques:

– il n’existe aucune norme de fabrication;
– des impuretés et des contaminants chimiques synthétiques ont été détectés;
– l’étiquetage ne reflète pas toujours le contenu des cartouches de la e-cigarette.

Deuxième constat sur l’impact sanitaire

Les connaissances actuelles ne nous permettent pas d’évaluer l’efficacité de la cigarette électronique en matière d’aide à la cessation du tabac. C’est un produit de très grande consommation, il est dangereux, moins que la cigarette, mais il se développe sans aucune capacité d’information du consommateur sur les risques et bénéfices. 

Plusieurs plaident pour une autorisation de mise sur le marché (AMM), mais la cigarette électronique n’est pas considérée comme un médicament. D’autres pensent que ce produit, qui permet de quitter le tabac, est encadré alors que la cigarette de tabac est en vente libre. Il est étonnant qu’un produit se propageant à une telle vitesse et comportant des dangers pour la consommation soit si peu documenté.

Le meilleur service que l’on peut rendre aux consommateurs, c’est de leur fournir les informations les plus justes possibles et puis leur faire confiance pour gérer leurs risques, ce qui ne veut pas dire que ce produit ne doit pas être encadré par la loi et le règlement. La e-cigarette représente donc un défi de la gestion des risques, que nous avons à affronter de plus en plus souvent. La science n’a actuellement pas de réponse aux ques- tions que l’on se pose. En tant qu’épidémiologiste, un risque individuel, si faible soit-il, devient non négligeable pour la santé publique lorsque des millions de personnes y sont exposés. Les autorités ne pourront pas rester sans rien décider et ne peuvent pas laisser ce produit se diffuser aussi vite alors qu’on sait si peu de chose à court et à moyen termes.

Quelle vision québécoise de la cigarette électronique?

Texte publié le 29 septembre 2013, sur le site «Des risques et des hommes».

Le vif débat dans ce blog (82 commentaires à ce jour) sur les dangers, les risques et les bénéfices de la e-cigarette et la meilleure façon d’encadrer sa rapide diffusion m’ont incité à chercher ce qu’il en était dans d’autres pays proches de nous. Je remercie Hélène Valentini de l’Institut National de Santé publique du Québec (INSPQ) de m’avoir signalé un rapport récent qui est une bonne synthèse des connaissances et des incertitudes sur ce sujet.

Le premier constat concerne les lacunes de l’information disponible : « Les études publiées jusqu’à maintenant apportent des informations partielles sur les composantes contenues dans la CE. Les informations disponibles concernent principalement la CE avec nicotine, alors qu’elles sont très peu nombreuses à propos de la CE sans nicotine. Il n’existe aucune norme de fabrication associée aux CE. Ainsi, des impuretés et des contaminants chimiques synthétiques ont été détectés dans des CE. L’étiquetage ne reflète pas toujours le contenu réel des cartouches des CE. De la nicotine a été détectée dans des produits étiquetés sans nicotine. »

Le deuxième constat est relatif à l’impact sanitaire pour lequel « les connaissances actuelles issues de la littérature scientifique ne nous permettent pas d’estimer les effets sur la santé associés à la consommation de CE, avec ou sans nicotine. » Le rapport souligne un point qui a été évoqué plusieurs fois parmi les commentaires : « la variabilité des différents produits et les limites des études actuelles ne permettent pas de faire quelque constat ou conclusion généralisable que ce soit concernant l’efficacité des CE comme aide à la cessation tabagique. »

Plusieurs lecteurs plaident pour que la e-cigarette fasse l’objet d’une procédure d’autorisation de mise sur le marché comme s’il s’agissait d’un médicament. D’autres pensent qu’il serait paradoxal qu’un produit permettant de quitter le tabac soit ainsi encadré alors que la cigarette est en vente libre. Les données disponibles montrent qu’à ce stade, il s’agit d’une opposition entre des opinions qui ne peuvent pas être étayées par des arguments scientifiques.

Plus important me semble-t-il est qu’un produit se diffusant à une telle vitesse et comportant des dangers pour les consommateurs soit si peu documenté. C’est une nouvelle illustration du décalage qu’il y a entre le rythme de l’innovation et la capacité d’évaluer les dangers et les risques.

Le rapport québécois souligne à juste titre que « la priorité consiste à caractériser le profil d’innocuité de ce produit dans un usage à long terme… Les effets sur la santé des produits chimiques inclus dans les solutions liquides des CE avec et sans nicotine, c’est-à-dire le propylène glycol ou la glycérine, et même les additifs, n’ont pas fait l’objet d’un examen rigoureux. De plus … certains utilisateurs de CE inhalent plus fortement ou profondément la CE comparativement à la cigarette de tabac. Cette aspiration soutenue, associée à un usage répété sur une longue période de temps de ces produits chimiques, n’a pas été étudiée. Une autre considération à propos des CE avec nicotine relève du fait que les conséquences sur la santé de l’usage des CE en combinaison avec la cigarette de tabac ne sont pas encore connues. »

Je sais que ceux qui pensent que la e-cigarette est préférable au tabac (je suis enclin à leur donner raison) considèrent que ceux qui évoquent ses dangers sont des suppôts de l’industrie du tabac. Mais je me méfie de ces jugements interprétatifs. Le meilleur service que l’on peut rendre aux consommateurs est de leur fournir les informations les plus justes possible et de faire confiance à leur intelligence pour gérer leurs risques. Ce qui ne veut pas dire que ces produits ne doivent pas être encadrés au plan collectif par la loi et le règlement.

Le rapport de l’INSPQ comporte un argument qui n’a pas été encore avancé à ma connaissance : « Les CE pourraient porter atteinte aux efforts de prévention de l’usage du tabac et possiblement être des « passerelles » vers le tabagisme ou la dépendance à la nicotine. » L’usage du conditionnel est le bienvenu et cette question est légitime.

Ce blog n’a pas vocation à se spécialiser sur ce sujet. Personnellement, je n’ai aucune expérience ni compétence particulière dessus. Mais la e-cigarette incarne bien les défis de la gestion des risques des innovations que nous aurons à affronter de plus en plus souvent. Ces défis demandent des débats au-delà des cercles des spécialistes. La diversité et la pertinence des commentaires reçus ici montrent que cette approche n’est pas utopiste.

15 octobre 2014

Sevrage tabagique — E-cigarette: Le point de vue de l’État

Très mobilisé sur les politiques en matière d’addiction, aujourd’hui, Pascal Melihan-Cheinin est responsable d’une sous-direction où l’addiction demeure un sujet important avec bien d’autres. Comment l’état va répondre aux inquiétudes naturelles d’une partie importante de la population? Voici son intervention lors des 3e Rencontres sur la réduction des risques, organisées par la chaire d’addictologie du CNAM, la fédération Addiction, Aides et Vih.org/Swaps, en qualité de sous-directeur à la direction générale de la Santé (DGS).

Par Pascal Melihan-Cheinin
RDR Tabac Sevrage Tabac Vape

Cet article est présent dans Swaps 74: Dossier e-cigarette

Swaps 74: Dossier e-cigarette

Cette 74e édition de Swaps consacre un dossier à la troisième rencontre sur la réduction des risques organisée par la chaire d’addictologie du Conservatoire national des arts et métiers (CNAM) avec la Fédération addiction, la Fédération AIDES et Swaps sur la e-cigarette. Intéressante par son côté innovant, technologique, électronique, mais surtout par son côté citoyen par lequel elle a fait irruption dans la société. Autant de raisons pour que le CNAM accueille cette première rencontre universitaire sur la e-cigarette. 

Le rôle de l’état n’est pas le plus simple dans ce dossier: nous sommes confrontés à un phénomène émergent qui interroge également nos schémas de pensée, non seulement pour les professionnels de l’addictologie, mais aussi pour nous dont le métier est de concevoir des politiques de santé, en particulier sur la manière d’encadrer les activités qui peuvent avoir un impact sur la santé et les comportements.

Ce phénomène est récent, en effet. Les premiers signalements reçus sur la cigarette électronique datent de 2006. Depuis cette date jusqu’à aujourd’hui, les questions posées sont radicalement différentes. Jusqu’à une période récente, il s’agissait d’un phénomène encore limité. Dans des réunions européennes, certains états membres considéraient que la cigarette électronique devait être considérée comme un produit du tabac dont il fallait interdire l’usage en public, d’autres voulaient les classer comme médicament. En France, nous avancions de manière progressive en posant des questions. Ainsi, la recommandation de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) de 2011, qui recommande de solliciter une autorisation de mise sur le marché comme médicament suivant des seuils, apparaît comme une position assez sage avec le recul.

Il s’agit d’un produit nouveau qui ressemble à une cigarette, ce qui pousse à dire qu’il faudrait l’encadrer comme une cigarette. Mais la cigarette électronique n’est pas un produit du tabac. Par ailleurs, nombreux sont les témoignages faisant part d’un intérêt pour réduire le tabagisme; si quelques études présentent des résultats encourageants, aucune donnée suffisante pour que les autorités sanitaires puissent conclure clairement et recommander ce produit pour le sevrage tabagique. Nous restons donc à la recherche d’information. C’est pourquoi la Direction générale de la santé (DGS) a financé

le travail de l’OFT, qui a été un moment important dans l’histoire de la cigarette électronique dans notre pays. Depuis la parution de ce rapport, les connaissances ont progressé avec des articles sur les différentes études (américaine, tchèque, néozélandaise, etc.). Les recommandations du National Institute for Health and Care britannique sur la cigarette électronique de l’été 2013 montrent qu’il y a une insuffisance de connaissances sur le sujet et préconise d’utiliser les substituts nicotiniques en première intention. D’ailleurs, les recommandations françaises toutes récentes ne sont pas très éloignées de celles des Britanniques.

Ces dernières années, les ventes de cigarettes reculent, même en tenant compte du marché frontalier (80 à 90 % restent un marché domestique). Il y a eu un renchérissement des prix qui, dans le contexte économique actuel, joue beaucoup sur le consommateur que reste le fumeur. Ce dernier voit apparaître un produit de consommation courante qui fait sans doute écho et qui a un sens beaucoup plus puissant que de se dire «je suis malade, je vais dans une pharmacie ou je vais voir un médecin pour être soigné, pour me sevrer». Le fumeur reste, dans son acte de consommation, un consommateur avant d’être un malade. La question de la cigarette électronique a également mis en lumière les évolutions de nos modes de pensée. Nous sommes passés d’une époque où nos pensées pouvaient être régies par des ecclésiastiques, puis par des intellectuels, aujourd’hui, ce sont plutôt les bloggeurs avec un accès à la parole d’autant plus libre et facile qu’il est plus difficile de la contrôler.

Les questions fondamentales pour le ministère de la Santé

Pour le ministère de la Santé, en particulier la DGS, la question la plus immédiate reste celle de la sécurité sanitaire. Les autres intervenants de cette journée ont dû évoquer davantage la prévention des addictions, mais la question de sécurité sanitaire est très importante. Quelle est la sécurité de ces produits ? On entend dire que les produits de 2006 et ceux d’aujourd’hui ne sont pas les mêmes, que tous les mois le paysage change. Or, nous, autorités sanitaires, nous n’avons pas, aujourd’hui, de photographie de ce marché qui permettrait vraiment de dire ce qu’il y a dans ces produits.

Il faudra sans doute prévoir des prescriptions techniques minimales, car il s’agit de manipulation d’un liquide riche en nicotine, et la question de la sécurité sanitaire reste donc importante, notamment pour les enfants. Nous sommes alertés très régulièrement sur l’empaquetage des médicaments, sur les blisters, etc.
La composition des produits constitue un des points essentiels pour pouvoir en appréhender la sécurité. Nous avons financé le laboratoire national de métrologie et d’essais (LNE), établissement public chargé des campagnes de «fumage», c’est-à-dire de fournir une analyse des produits du tabac à tous les fabricants de tabac pour vérifier le rendement potentiel, en goudrons notamment, et en nicotine. Le LNE est chargé par le ministère de la Santé d’étudier un panel important de cigarettes électroniques et leur composition pour améliorer notre compréhension du phénomène.

L’autre question est la place de la cigarette électronique par rapport aux médicaments d’aide à l’arrêt du tabac. Avec un coût social du tabac de 47 milliards d’euros, si on réduit la consommation de tabac, c’est toujours des gains à prendre. Le tabac contient du monoxyde de carbone, des goudrons. Les cigarettes électroniques ne contiennent pas ces substances. Certains disent même qu’il y a une absence de nocivité avec la cigarette électronique, mais nous ne disposons encore d’aucun élément tangible.
La question aussi très importante est celle de l’impact sur les jeunes. Les cigarettes électroniques, notamment à base de nicotine, pourraient-elles avoir constitué une initiation au tabagisme ? Si certaines études ont posé la question, nous n’avons pas encore de réponse. Le marketing, la richesse créative du produit pourraient avoir un impact en termes d’initiation. C’est la théorie de l’escalade, très forte dans beaucoup d’esprits et nous ne disposons d’aucun élément pour la contredire.
Toutes ces questions, que ce soit au niveau du législateur, national ou européen, nous amènent à apporter des réponses partielles, qui ne peuvent pas être définitives. Sans dévoiler l’intimité des négociations entre états, il y a eu des positions différentes au niveau européen. Ainsi sur la question fondamentale du statut e ces produits, certains états membres de l’Union européenne voulaient que les e-cigarettes soient considérées comme des médicaments. Portée par une minorité de nos partenaires européens, cette position aurait pu l’emporter. Celle de la France était très différente. En effet, dans certains états, les substituts nicotiniques sont vendus hors pharmacies. En France, nous ne pouvons déroger au monopole du pharmacien d’officine. L’impact sur l’accessibilité de ces produits aurait donc été énorme car ils n’auraient pu être vendus qu’en pharmacie.

Dans ce dialogue entre les gouvernements, la commission et le Parlement européen, avec son avis du 8 septembre 2013, ont émis une position qui a un sens : on interdit la publicité, on encourage l’interdiction de vente aux mineurs – sur ce point, Mme Marisol Touraine, ministre des Affaires sociales et de la Santé, l’avait annoncé antérieurement à l’occasion de la journée mondiale sans tabac 2013 –, car ce produit peut être une incitation à l’initiation1Cette disposition a été introduite dans la loi no 2014-344 du 17 mars 2014 relative à la consommation..

Autre levier pour protéger les jeunes : l’interdiction de publicité; elle est prévue par le projet de directive. La ministre de la Santé a annoncé une circulaire pour réaffirmer des principes importants et éviter des dérives dont nous sommes témoins. Ainsi, la publicité pour la cigarette électronique ne doit pas encourager au tabagisme. Si ce n’est pas un médicament, on ne peut pas faire croire le contraire dans une publicité.

Le projet de directive européenne présente donc un équilibre raisonnable, avec un net renforcement de l’encadrement sans pour autant calquer totalement la législation en vigueur pour les produits du tabac.
L’administration doit également s’organiser pour améliorer nos connaissances sur plusieurs domaines, notamment sur l’importance du phénomène. La France dispose d’outils, qui sont les enquêtes de prévalence en particulier le baromètre santé de l’INPES. On devrait, avant 2015, disposer de données échantillonnées, fiables. On disposera à ce moment-là d’une photographie complète de l’importance du phénomène, permettant de le décrire. L’Observatoire français des drogues et des toxicomanies questionnera les jeunes de 17 ans lors de sa prochaine enquête dont les résultats seront connus en 2015.

Enfin, pour l’addictologie, la cigarette électronique constitue un phénomène intéressant qui rappelle la théorie de la guérison spontanée. On n’en parle pas beaucoup mais, dans le champ des addictions, certains s’arrêtent par eux-mêmes sans l’aide d’un médecin.

Il est intéressant de réfléchir sur comment la cigarette électronique permet d’interroger nos conceptions en matière de prévention et de prise en charge des addictions.

15 octobre 2014

Sevrage tabagique — E-cigarette : Le point de vue de l’usager

Intervention de Brice Lepoutre lors des 3e Rencontres sur la réduction des risques, organisées par la chaire d’addictologie du CNAM, la fédération Addiction, Aides et Vih.org/Swaps.

Par Brice Lepoutre

Cet article est présent dans Swaps 74: Dossier e-cigarette

Swaps 74: Dossier e-cigarette

Cette 74e édition de Swaps consacre un dossier à la troisième rencontre sur la réduction des risques organisée par la chaire d’addictologie du Conservatoire national des arts et métiers (CNAM) avec la Fédération addiction, la Fédération AIDES et Swaps sur la e-cigarette. Intéressante par son côté innovant, technologique, électronique, mais surtout par son côté citoyen par lequel elle a fait irruption dans la société. Autant de raisons pour que le CNAM accueille cette première rencontre universitaire sur la e-cigarette. 

Tout d’abord, un petit historique de mon parcours pour ceux qui ne me connaissent pas. J’ai commencé à fumer à 15 ans et consommaient quatre cartouches par mois (40 paquets/mois), mon arrêt le plus long a été de 12 heures avant de replonger.

J’ai découvert la cigarette électronique à la télévision au moment du durcissement de la loi évin. À la suite de la démonstration d’un vendeur, pour le journal télévisé. Les revendeurs n’étaient pas nombreux à l’époque. Quelques mois plus tard, j’ai pris rendez-vous avec l’un d’eux, et j’ai essayé. Le concept m’a plu et surtout la sensation dans la gorge était présente, à ma grande surprise. Cette sensation était pour moi indispensable. Avec la première génération de cigarette électronique, les premières 48 heures ont été difficiles, un vrai junky en manque… Je me suis acharné et ça a marché.

En 2008, je me suis lancé dans un forum sur la e-cigarette pour que les vapoteurs puissent s’aider et s’organiser, on était 200, nous échangions, nous dépanions,… le matériel d’il y a 5 ans n’était pas le même qu’aujourd’hui. Il fallait bricoler la résistance, la sortir avec un trombone, le eliquide n’existait pas, nous le faisions nous-mêmes en pressant les cartouches à la main pour en extraire le liquide et le poser directement sur la résistance. Aujourd’hui, ce forum est devenu le plus gros forum européen sur le sujet. Il compte 60 000 membres, près de 3 millions de messages et un million de visiteurs par mois. Quand on a compris qu’au niveau européen, on allait nous empêcher de vapoter, qu’on allait brider la vape et la rendre inefficace, on a décidé de créer, avec l’aide d’un administrateur d’un autre forum, l’Association des usagers de cigarette électronique (Aiduce) en 2013, il y a un an. Nous avons monté cette association, car aux yeux des pouvoirs publiques et des médias, nous n’étions personnes. Des consommateurs réunis autour de forums, ça ne compte pas. Seule une association permet d’avoir l’oreille nécessaire.

Les actions d’Aiduce

Aussitôt créée, de nombreux médias ont commencé à s’intéresser à notre association et ont pris contact avec nous. On a été contacté pour participer au rapport de l’Office français de prévention du tabagisme (OFT). Notre participation a été cruciale et a permis d’asseoir notre sérieux. Nous avons lancé une pétition contre la législation européenne qui a récolté 40 000 signatures, nous éditons un magazine d’information téléchargeable gratuitement sur notre site Internet (http://www.aiduce.fr/). On participe actuellement à l’observatoire de la cigarette électronique avec 60 millions de consommateurs, qui, à la suite de leur article, a pris contact avec nous pour recueillir notre point de vue. À la même table, des utilisateurs et des distributeurs sont réunis sous l’égide de l’Institut national de la consommation (INC) et de l’OFT : Aiduce et le Collectif des acteurs de la cigarette électronique (Cace). Il faut savoir que les vendeurs vont participer financièrement à tout ce qu’on va mettre en place.

L’expérience des vapoteurs

Quelle est la motivation du fumeur de tabac à passer à la cigarette électronique? D’abord le prix. C’est un argument qui ressort souvent sur les forums. En moyenne, un consommateur de tabac dépense 2600 euros par an, avec le même ratio, on tombe à 480 euros par an avec la cigarette électronique. C’est vraiment le premier argument. On avait fait un sondage sur le forum en demandant si le vapotage revenait plus cher que le tabac, auriez-vous essayé? La grande majorité répondait non. Ensuite, c’est la santé. Il s’agit bien souvent de fumeurs qui n’arrivaient pas à arrêter, qui étaient conscients des méfaits du tabac sur leur corps. Ils se savaient condamnés et l’assumaient. La santé n’avait plus le même prix. La cigarette électronique leur a permis quelque chose de magique qui est de sortir la tête haute du tabac. Je ne suis plus fumeur de tabac et j’ai le truc qui me le permet.

On pourrait parler de « vapologie » Les plaisirs peuvent être customisés en fonction des besoins de chacun et de l’humeur du jour alors qu’avec le tabac, toutes les cigarettes ont à peu près le même goût. La cigarette électronique se rapproche davantage du vin, il y a une variation de plaisirs en fonction du moment. Un liquide se déguste, et on peut choisir l’arome dont on a envie pour un instant choisi.

Temps et mode d’adaptation

L’étude de Bullen1Bullen C, Howe C, Laugesen M et al. Electronic cigarettes for smoking cessation: a randomised controlled trial. Lancet 2013;382:1629-37., qui a démontré que la cigarette électronique était égale aux patchs en matière d’efficacité, m’a beaucoup servi. Elle démontrait que la cigarette électronique médicalisée, comme le souhaitait l’Europe, ne fonctionnait pas. Ce n’est pas la réalité du terrain. Une bonne cigarette électronique s’adapte à chacun et, sur le forum, 74 % ont réussi à arrêter le tabac. On retrouve ces chiffres dans l’étude de Dawkins2awkins L, Turner J, Crowe E. Nicotine derived from the electronic cigarette improves time-based prospective memory binabstinentsmokers.Psychopharmacology (Berl) 2013;227:377-84. ou chez J.F. Etter3EtterJF.Lavéritésurlacigarette électronique. Fayard. 2013..

Il y a aussi des personnes qui continuent de fumer du tabac tout en vapotant, sur le forum, ils sont 14 % qui fument occasionnellement du tabac et 13 % qui fument du tabac tous les jours. Il y a aussi des revenants des cigarettes électroniques de première génération qui avaient abandonné, car le matériel était trop compliqué, ils souhaitent toujours arrêter de fumer du tabac, donc il tente à nouveau la cigarette électronique.
Comment choisir son équipement? Vapoter implique un équipement : la batterie qui amène du courant, des atomiseurs, il en existe des centaines de différents qui, eux, vont rendre les liquides, donc le goût et la sensation, différents. Il y a les composés de l’atomiseur, la résistance, qui est faite de différente manière, et la fibre qui va absorber, le tout donnant des rendus différents. Il y a de multiples possibilités de matériels qui peuvent correspondre à chaque personne. Pour les e-liquides, le dosage en nicotine est différent, il va de 0, 6 mg, 12 mg à 18 mg, on peut avoir des proportions différentes de propylène glycol/glycérine végétale (50/50, 75/25, etc.), on peut avoir des composés supplémentaires comme l’alcool et puis les arômes. La cigarette électronique universelle n’existe pas.

Il faut trouver l’assemblage de liquide et de matériel qui convient à chacun. C’est important de conserver cette grande variété de choix si on veut que ce produit reste efficace dans l’arrêt du tabac.

Le rôle des forums Ilfautrappelerqu’ilestimportantdetoujours vérifier l’indépendance des propos qui sont tenus sur les blogs et forums, il faut rester vigilant, car certains sont faux. C’est valable pour tout, votre machine à laver, votre frigo, etc.

Les forums jouent un rôle très important dans l’aide à l’arrêt du tabac et pour ne pas y retomber. On y trouve une communauté soudée, de l’aide et du soutien. De 200 personnes il y a 5 ans, on compte 1 million de visiteurs par mois aujourd’hui. Le fait de faire partie d’une communauté avec un soutien fait partie du succès de la cigarette électronique.

Les vendeurs ont un rôle important aussi, ils ne sont pas que des vendeurs, ils conseillent, ils doivent trouver les mots justes.

Multiplier les choix pour réduire les risques

Depuis six ans, le produit a évolué à une vitesse fulgurante qui a permis une veille sanitaire. On a désormais une bonne qualité de produit. Une communauté qui a du poids, qui traque les moindres ingrédients et qui a son mot à dire face aux industriels. Les industriels savent très bien qu’ils risquent d’être boycotter et de fermer boutique si la qualité que souhaite le consommateur n’est pas présente.

Même en Chine, on a réussi à faire pression. En Italie, l’un des fabricants de liquide a accepté un compromis européen qui ne nous va pas, il risque de le payer cher. Partout dans le monde, les usagers font pression sur les fabricants.

Le choix est aussi le succès de la cigarette électronique, tout le monde peut y trouver son bonheur. En six ans, on se retrouve avec des centaines de modèles de cigarettes électroniques consommables. La technologie a évolué grâce aux «moddeurs» qui, dans leur garage, fabriquent des « mods », de nouvelles cigarettes électroniques personnalisées. Si la technologie est efficace, elle est reprise par des usines dans le but d’améliorer les produits grand public.

Pour nous, consommateurs, il est important de conserver la multiplicité des choix si on veut que les gens poursuivent l’arrêt du tabac grâce à la cigarette électronique. Nous devons même l’encourager, ainsi que le développement des produits, contrairement à ce qu’a voulu faire l’Europe en décembre 2013. La médicalisation de la cigarette électronique aurait été sanitairement catastrophique. Il est important de rassurer et d’encourager les fumeurs de tabac à passer à la cigarette électronique et non de leur faire peur.

13 octobre 2014

Dossier E-cigarette — Que savons-nous vraiment de la toxicité de la nicotine?

Un point sur la nicotine: Il faut tout d’abord démystifier la nicotine. La e-cigarette est utilisée avec la nicotine, beaucoup de vapoteurs s’en servent pour arrêter de fumer.

Par Jacques Le Houezec
Addiction Nicotine Sevrage Tabac Vape

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Swaps 74: Dossier e-cigarette

Cette 74e édition de Swaps consacre un dossier à la troisième rencontre sur la réduction des risques organisée par la chaire d’addictologie du Conservatoire national des arts et métiers (CNAM) avec la Fédération addiction, la Fédération AIDES et Swaps sur la e-cigarette. Intéressante par son côté innovant, technologique, électronique, mais surtout par son côté citoyen par lequel elle a fait irruption dans la société. Autant de raisons pour que le CNAM accueille cette première rencontre universitaire sur la e-cigarette. 

Il y a de plus en plus d’études et d’informations concernant la e-cigarette de plus en plus fiables et, il faut le rappeler, les dangers de la e-cigarette sont considérablement moindres que ceux du tabac. Quand on a un produit qui permet aux fumeurs d’arrêter de fumer, il faut prendre cette vision en compte en termes de santé publique.
La fumée de tabac est très complexe, la dépendance est entretenue en partie par la nicotine, mais il y a d’autres substances dans la fumée qui y participent. 

Trop souvent, on a associé les dangers du tabac à la consommation de nicotine et on associe la nicotine aux maladies liées au tabagisme. Or, les dangers viennent des composés cancérigènes, du monoxyde de carbone, et des gaz oxydants contenus dans la fumée. Les produits les plus dangereux sont les produits fumés, ceux qui viennent de la combustion du tabac. On sait que les produits du tabac qui ne subissent pas de combustion, comme par exemple le Snus en Suède, sont moins dangereux. Ce n’est pas la nicotine en soi qui est dangereuse, c’est le fait d’inhaler la fumée, produit de combustion du tabac.

Le fumeur sait gérer la dose de nicotine qu’il s’administre, il sait très bien moduler sa façon de fumer pour obtenir la dose de nicotine qu’il souhaite1Le Houezec J. Role of nicotine pharmacokinetics in nicotine addiction and nicotine replacement therapy: a review. Int J Tuberc Lung Dis 2003;7(9):811-9.. Il faut savoir que la nicotine est une substance extraordinaire, puisqu’elle permet, selon ses besoins, à la fois de se stimuler ou, à l’inverse, de se calmer, d’avoir un effet de sédation. C’est juste une question de dose, elle stimule à petite dose, elle inhibe à haute dose. Un fumeur est capable de le moduler, bouffée par bouffée sur une cigarette.

En ce qui concerne la cigarette légère, l’Europe en a interdit les termes depuis 2003 et cela grâce à une étude2Jarvis MJ, Boreham R, Primatesta P, Feyerabend C, Bryant A. Nicotine yield from machine-smoked cigarettes and nicotine intakes in smokers: evidence from a representative population survey. J Natl Cancer Inst 2001;93(2):134-8. qui montrait que, quels que soient le type de cigarette (les chiffres reproduits sur les paquets de cigarette, qui sont le résultat d’une machine à fumer, ne veulent strictement rien dire) et le rendement de nicotine indiqué sur le paquet, un fumeur va rechercher environ 1 mg de nicotine.

Dans une cigarette, il y a entre 12 et 14 mg de nicotine et un fumeur, en fonction de sa façon de fumer, va tirer entre 1 et 3 mg. 

Le vapoteur va apprendre avec la cigarette électronique à faire la même chose et à moduler ses besoins en nicotine. Le débat actuellement est de savoir s’il faut limiter la nicotine dans les liquides. En France, l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps), devenue l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM), recommande de ne pas autoriser plus de 20 mg/ml sauf en déposant une autorisation de mise sur le marché (AMM) et en devenant un médicament. Le débat se pose au niveau européen.

Une étude3Benowitz NL, Zevin S, Jacob P 3rd. Suppression of nicotine intake during ad libitum cigarette smoking by high-dose transdermal nicotine. J Pharmacol Exp Ther 1998;287(3):958-62., réalisée aux états-Unis sur des fumeurs à qui on avait mis 1, 2 ou 3 patchs, et qui avaient la possibilité de continuer à fumer, avait clairement montré que les fumeurs savent titrer la nicotine. Lorsque les fumeurs avaient un apport de 63 mg de nicotine par les patchs, ils tiraient 1,6 mg de nicotine alors que ceux qui n’avaient pas de nicotine par les patchs (placebo, sans nicotine) tiraient 2,5 mg par cigarette.

Le potentiel addictif de la nicotine est déterminé par la façon dont elle est absorbée. La nicotine pénètre dans l’organisme par le même chemin que l’oxygène et atteint le cerveau très rapidement. Lorsqu’elle est fumée, la cigarette est le produit du tabac le plus addictogène, celui qui créé une dépendance la plus forte. Inhaler une substance psychoactive est plus rapide que se l’injecter en intraveineuse. C’est pour cette raison, entre autres, que le crack est beaucoup plus addictif que la cocaïne pris sous une autre forme.

L’inhalation est vraiment le facteur clé de la dépendance

C’est aussi pour ça que la cigarette électronique fonctionne, justement parce que la nicotine va prendre le même chemin que celui dont les fumeurs ont l’habitude. Ils vont pouvoir passer d’un produit à l’autre, parce que le mode de consommation de la nicotine est similaire. Avec les substituts nicotiniques, la nicotine pénètre plus lente- ment dans l’organisme, que ce soit à travers la peau, la muqueuse buccale, que lorsqu’elle est fumée. Avec un tabac à chiquer, on a une situation intermédiaire, le tabac contient une concentration en nicotine plus forte et a une capacité d’absorption plus aisée.

Ce qui créé la dépendance, c’est le décalage entre la concentration de nicotine dans le sang veineux (périphérique) et celle dans le sang artériel, qui va amener la nicotine au cerveau1. Lorsqu’on utilise des substituts, l’absorption est plus lente, donc il n’y a pas ce décalage. Seule l’inhalation permet cette forte concentration au niveau cérébral.

Qu’en est-il avec la cigarette électronique?

Dans une étude publiée récemment4Farsalinos KE,Spyrou A,Tsimopoulou K, Nicotine absorption from electronic cigarette use: comparison between first and new-generation devices. SciRep2014;4:4133., le Dr Farsalinos a comparé les cigarettes électroniques de première génération, qui ressemblaient à des cigarettes, à des systèmes plus performants avec une batterie plus puissante et un système de vaporisation plus efficace. Il a étudié le com- portement des vapoteurs en reproduisant pendant les cinq premières minutes l’équivalent d’une consommation de tabac.

Il leur a fait prendre dix bouffées avec la cigarette électronique pour reproduire ce qui se passe avec une cigarette. Une cigarette se fume en général en cinq minutes et en dix bouffées. Puis il les a laissé vaper comme ils le souhaitaient pendant une heure.

Par rapport à ce qui se passe avec une cigarette,les e-cigarettes de première,puis de deuxième génération produisent une nicotinémie bien moins importante et beaucoup moins rapide que a cigarette. Au bout des cinq minutes, on est au tiers de ce que l’obtient avec une cigarette.

Il faut vaper 35 minutes pour obtenir la même dose de nicotine obtenue en cinq minutes avec une cigarette. On a une absorption pulmonaire qui satisfait le fumeur, mais on a aussi un produit qui est loin de la cigarette pour apporter la nicotine au cerveau.

L’autre point est la toxicité de la nicotine. On entend beaucoup de choses et depuis très longtemps. Or, si elle était si importante, on l’aurait rencontrée avec les fumeurs.
En ce qui concerne les symptômes de surdosage, tous les fumeurs les connaissent: les nausées font arrêter la consommation. C’est la même chose avec la cigarette électronique. Au niveau de l’utilisateur, il n’y a pas de danger de toxicité. Le danger de toxicité pourrait provenir du contact de la nicotine avec la peau, en particulier lors- qu’on verse le liquide dans le réservoir de la cigarette électronique. Pendant plus de 150 ans, on a répété que la dose létale de la nicotine était environ de 30 à 60 mg sans en connaître la source. Un pharmacologue autrichien, Bernd Mayer, a fait une vraie recherche, et dans les vieux textes allemands, il a réussi à sourcer ces expériences. Elles ont été faites par des médecins qui se sont auto-administrés des doses de nicotine et ont établi une dose létale tout à fait arbitraire, puisqu’elle était plus faible chez l’homme que ce que l’on a observé chez le rat, la souris ou le chien. Plusieurs publications ont permis de montrer que cette dose létale n’est pas de 60 mg mais au moins 20 fois supérieure, soit 500 mg à 1 000 mg de nicotine absorbée, et non pas ingérée. La dernière tentative de suicide rapportée, chez une patiente de psychiatrie, qui avait ingéré 1500 mg de nicotine, n’a pas conduit à une issue fatale!

Sommaire
  • La cigarette électronique
  • Quand la réduction des risques s’applique aux drogues licites
  • Tout ce qu’on sait en 2014 de la e-cigarette
  • Quel avenir pour le vaporisateur personnel de nicotine?
  • Cigarette éléctronique : L’OMS veut interdire la vente aux mineurs
  • Réflexions d’un bloggeur qui connaît le risque et la santé
  • E-cigarette: Le point de vue de l’État
  • E-cigarette : Le point de vue de l’usager
  • Que savons-nous vraiment de la toxicité de la nicotine?
IAS 2015 à Vancouver
Dépistage du VIH : les autotests enfin disponibles
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