Alors que le Conseil national du sida (CNS) appelle à «produire des données épidémiologiques robustes et actualisées», Santé publique France produit des estimations sur des données non exhaustives: 57 % d’exhaustivité quant à la déclaration obligatoire (DO) en 2022 (77 % à l’hôpital et 27 % en ville) obligeant à apporter des méthodes de correction. D’après Françoise Cazein, épidémiologiste à SPF, cette différence entre la ville et l’hôpital s’est accentuée avec le Covid Les données de DO sont complétées par celles du SNDS (système national des données de santé), qui permet d’obtenir le nombre de sérologies remboursées et réalisées par les laboratoires publics et privés, et par celles de la CNAM (dispositif VIH Test depuis janvier 2022).
Santé publique France affirme être consciente des difficultés à réaliser une surveillance exhaustive et précise de l’évolution de l’épidémie avec son hétérogénéité populationnelle et géographique et a entrepris un certain nombre de travaux méthodologiques pour améliorer les données. Ainsi, pour renforcer la surveillance, une réflexion a été engagée en lien avec l’ECDC (European Centre for Disease Prevention and Control), et les recommandations du CNS devraient être prises en compte, a précisé Françoise Cazein.
Baisse des découvertes de séropositivité
Le nombre de découvertes de séropositivité est estimé entre 4 233 [IC95% : 4 139-4 326] (estimation « basse ») et 5 738 [IC95% : 5 588-5 888] (estimation «haute») à partir de 3 326 découvertes de séropositivité en 2022 déclarées au 30 juin 2023 (nombre brut). Entre 2012 et 2022, le nombre de découvertes de séropositivité a diminué de 11% selon les estimations «hautes» et de 21% selon les estimations «basses».

Parmi les personnes ayant découvert leur séropositivité en 2022, 54 % sont des hétérosexuel.le.s (38% né.e.s à l’étranger et 16% né.e.s en France), 41 % sont des HSH (27 % nés en France et 14 % nés à l’étranger), 2 % des personnes trans contaminées par rapports sexuels et 1 % des usagers de drogues injectables (UDI). Moins de 1 % sont des enfants de moins de 15 ans, principalement contaminés par transmission materno-foetale.
Un effet PrEP
Les évolutions à la baisse sont contrastées en fonction des populations : le nombre de découvertes de séropositivité continue à baisser chez les HSH nés en France, qui représentent 27 % des découvertes de séropositivité en 2022, probablement en raison de leur croissante adoption de la PrEP, ose SPF. À l’inverse, le nombre de découvertes continue à augmenter chez les HSH nés à l’étranger et aurait même triplé sur la période 2012-2022.
Plus de la moitié des découvertes en 2022 ont concerné des personnes nées à l’étranger, qu’elles aient été infectées par rapports hétérosexuels ou par rapports sexuels entre hommes, d’où «l’importance de garantir à cette population un accès aux soins et d’intensifier les actions de prévention à leur égard», rappelle SPF alors que la loi Immigration votée par le Sénat mi-novembre restreint l’aide médicale d’État. Les débats autour de la loi vont reprendre le 11 décembre.
La part des découvertes à un stade tardif reste élevée : en 2022, 43% des infections à VIH ont été découvertes à un stade tardif de l’infection (28 % au stade avancé de l’infection, <200 CD4 ou sida). Ces proportions ne diminuent pas depuis plusieurs années. Enfin, l’épidémie affecte différemment le territoire : l’épidémie à VIH reste forte dans les régions d’Outre-mer, et notamment en Guyane. En métropole, le taux le plus élevé est observé en Île-de-France, avec un gradient du centre vers les départements des couronnes franciliennes.