La mobilisation fédérative à l’heure de la crise sanitaire

Durant cette période inédite, le réseau de la Fédération Addiction s’est mobilisée pour soutenir la continuité des services et ajuster les réponses. Point d’étape.

Dans le cadre de la crise sanitaire liée à la pandémie de coronavirus, dès le 14 mars, le président de la Fédération Addiction adressait un message « flash info » à l’ensemble des membres du réseau indiquant sa préoccupation et le soutien que la Fédération pouvait prodiguer à cette occasion. « Une partie de cette responsabilité repose sur nous ! », écrivait Jean-Michel Delile et de fait la Fédération a rapidement mis ses productions en accès libre. 

Afin de soutenir les acteurs de terrain et permettre des adaptations réglementaires et administratives, elle travaille en lien étroit avec les pouvoirs publics au niveau national et régional et avec son réseau de partenaires associatifs (notamment Aides, la Fédération des acteurs de la solidarité, la Fédération Santé Habitat, l’Uniopss etc.).

Le lien avec les pouvoirs publics 

Dès le 14 mars, la Fédération Addiction a sollicité la Direction générale de la santé (DGS) et la Mildeca pour demander qu’une fiche de recommandations concernant le dispositif addictologie soit produite, et faciliter la circulation des usagers et professionnels dans cette période particulière. Vu l’ampleur des questions à traiter, une cellule de crise hebdomadaire a été mise en place avec la DGS, la Mildeca et la Direction générale de l’organisation des soins (DGOS).

Les délégués régionaux et leurs adjoint.e.s se sont mis en contact avec l’agence régionale de santé (et ses branches départementales) dans le même objectif, et ont structuré des liens entre acteurs régionaux adhérant ou non. Certains se sont également positionnés comme ressources pour les élus des collectivités territoriales.

Par ailleurs, la Fédération Addiction s’est mise en lien avec Addictions drogues alcool info service (Adalis, gérée par Santé Publique France) pour aider au recensement des structures, de leurs modalités d’ouverture actualisées pour orienter au mieux les publics via les numéros verts. Dans le même temps, notre tête de réseau globalise ses données pour disposer d’états des lieux région par région et assurer, quand nécessaire, une interface entre acteurs sur un territoire pour organiser les modalités d’appui du dispositif spécialisé auprès de leurs partenaires (centres hébergement, foyers jeunesse etc.). 

Nous avons obtenu des leviers pour organiser la continuité de service, notamment la garde des enfants tout récemment. Un courrier interassociatif vient d’être envoyé au ministre de la Santé et des Solidarités pour obtenir l’accès au matériel de protection et pouvoir réaliser les tests CovidCovid-19 Une maladie à coronavirus, parfois désignée covid (d'après l'acronyme anglais de coronavirus disease) est une maladie causée par un coronavirus (CoV). L'expression peut faire référence aux maladies suivantes : le syndrome respiratoire aigu sévère (SRAS) causé par le virus SARS-CoV, le syndrome respiratoire du Moyen-Orient (MERS) causé par le virus MERS-CoV, la maladie à coronavirus 2019 (Covid-19) causée par le virus SARS-CoV-2. prochainement, forts de l’expérience du réseau sur les Trod VIHVIH Virus de l’immunodéficience humaine. En anglais : HIV (Human Immunodeficiency Virus). Isolé en 1983 à l’institut pasteur de paris; découverte récemment (2008) récompensée par le prix Nobel de médecine décerné à Luc montagnier et à Françoise Barré-Sinoussi. et VHC.

Des pratiques modifiées qu’il faut soutenir et accompagner

En tant que tête de réseau, la Fédération Addiction travaille principalement à l’accompagnement les pratiques professionnelles mises en place dans l’urgence et qui doivent s’installer dans une durée relative. 

Grâce à l’implication et les retours d’expérience (souvent immédiats) des acteurs du réseau, nous avons construit des outils pour : 

Adapter les modalités de prescription et délivrance de MSO

L’inquiétude des patients stabilisés sur la continuité de leur traitement, refaire des ordonnances tous les 14 jours dans un contexte de confinement et la possibilité d’une montée en charge des demandes d’initialisation nous ont poussés à demander aux pouvoirs publics une adaptation du cadre réglementaire. 

Notre mobilisation collective a été entendue : trois arrêtés ont été pris, concernant les prescriptions et leurs renouvellement.  La Fédération a construit une note d’appui à ces prescriptions.

Mettre en place des téléconsultations 

Maintenir un accompagnement des publics nécessite d’adapter les horaires d’ouverture et d’accueil mais aussi de proposer des suivis à distance. La Fédération propose une série d’outils pour ces consultations à distance, et explore les manières de garantir le respect de la protection des données personnelles (via son groupe Système d’Informations).

La réduction des risques en centres d’hébergement 

Les structures d’hébergement sont confrontées de façon accrue et aigüe à la place de la gestion des consommations, notamment d’alcool. La Fédération s’est donc mobilisée avec ses partenaires pour y répondre via : 

Continuité des traitements pour les sortants de prison 

Particulièrement exposées à un risque de rupture de leur traitement, du fait des mesures de sorties de prison massive et rapides organisées par les pouvoirs publics, les personnes sortant de prison doivent faire l’objet d’une attention particulière. Les intervenants en addictologie (en particulier les Csapa référents à gestion associative) ont été contraints d’arrêter leurs actions en milieu pénitentiaire faute d’accès. La Fédération a écrit à tous les CSAPA référents les invitant à se (re)mettre en lien avec les acteurs du carcéral afin d’assurer le mieux possible cette continuité

Organiser des maraudes

En ces temps inédits, l’aller-vers se révèle indispensable. Les maraudes sont l’un des principaux outils de rencontre avec des publics vulnérables au virus et aux impacts de la crise.

Mais leur organisation s’avère complexe pour intégrer les mesures barrières et protéger les usagers et les intervenants. Grâce à la mobilisation et à l’expertise des acteurs qui les mettent en œuvre, la Fédération a fait paraître une note de synthèse récapitulant l’ensemble de ces précautions (PDF). 

Soutenir les équipes

Dans ce contexte de crise, les modifications de l’activité des services, la rencontre entre des enjeux professionnels et la vie personnelle et le climat relativement anxiogène (confinement/crise sanitaire, risque du contact avec les publics, pression des mesures barrières) mettent les équipes sous tension. Il est donc également essentiel de permettre aux intervenants d’être accompagnés tant que de besoin. Le réseau a donc rassemblé un certain nombre d’informations et de plateformes de soutien aux équipes, et les a diffusées à tous. 

Relancer le débat public sur la place des usages de substances psychoactives  

La question des usages de produits ne concerne pas seulement (loin s’en faut) les usagers des structures et services de soin. Elle est transversale à toutes nos sociétés, et par temps de confinement, suppose également d’être discutée. Et ce d’autant plus pendant ce moment critique, où les plus vulnérables sont parfois « confinés dehors » et sans produit, où les usages se font au domicile, où la solitude peut peser, où le contexte anxiogène peut provoquer des envies débordantes, où les dépendances et usages à risque peuvent se révéler dans le contexte familial, etc. 

Il est donc crucial que le débat public fasse une place à la question des usages, et fournisse des outils, stratégies ou possibilités d’en parler. 

C’est le sens de l’action de la Fédération Addiction qui en lien avec ses partenaires, a fait paraître à ce jour plusieurs tribunes, communiqués de presse et articles. Elle a pu rappeler qu’il « faut assurer une garantie absolue d’approvisionnement en produits de dépendance, pour pouvoir ensuite aider ceux qui le souhaiteront à réduire ou à arrêter. Cela repose sur un constat pragmatique : l’angoisse cardinale de l’addict est celle du manque. Et l’angoisse, le stress sont les moteurs essentiels du besoin irrépressible de consommer, du « craving ». Cette situation d’angoisse du manque est donc non seulement à calmer en soi pour apaiser le patient, mais aussi pour réduire l’intensité du craving et donc les risques de débordements, d’agressivité, de troubles du comportement, de violences, de prises de risques, d’overdoses, etc. Nous avons donc approuvé sans réserve la poursuite de l’approvisionnement en tabac et en boissons alcoolisées, et regretté de n’être pas plus avancés sur une régulation du cannabis. ».