Nanotransporteurs — Applications thérapeutiques des nanotechnologies: Données expérimentales

L’essentiel des nombreuses études sur cette approche de la thérapeutique antirétrovirale a été réalisé à l’aide de modèles cellulaires in vitro ou de modèles in vivo chez l’animal. Plusieurs types de nanotransporteurs ont été utilisés dans ces divers travaux:

Les nanoparticules polymériques

Synthétiques ou semi-synthétiques sont intéressant par la reproductibilité de leur fabrication, leur stabilité et leur capacité à permettre une libération prolongée du principe actif. Les acides poly-lactiques (PLA) et poly-lactiques co-glycoliques (PLGA) ont été autorisés par la FDA pour une utilisation chez l’homme. C’est avec ce type de nanotechnologie qu’il a été possible d’améliorer le ciblage de la zidovudine vers le système lymphoïde digestif avec un augmentation d’un facteur 4 de ses concentrations dans les plaques de Peyer par rapport à la forme non encapsulée. Cependant, lors de la comparaison chez le rongeur de l’administration orale de cette forme versus l’administration intraveineuse il est apparu qu’après prise orale les nanoparticules restaient dans le tractus gastro-intestinal. Une des applications intéressante a été étudiée au niveau vaginal. Elle concerne l’encapsulation dans des PLGA d’un inhibiteur du récepteur CCR5 (PSC-RANTES) afin de le protéger de l’environnement vaginal et de faciliter sa pénétration dans le tissu vaginal et ectovaginal pour atteindre ses cibles virales. Les mesures ex vivo montrent des résultats intéressants avec une augmentation de la concentration tissulaire de près de 5 fois celle de l’inhibiteur non encapsulé tout au long d’une période d’exposition de 4 heures. En effet, la présence de mucus à la surface de certains épithéliums constitue une barrière supplémentaire aux antirétroviraux qui doivent la traverser pour atteindre l’épithélium sous-jacent sous une forme active. Les nanoparticules à base de divers polymères ont la propriété de réduire la clairance  du principe actif au niveau du mucus, améliorant ainsi leur absorption locale et prolongeant leur présence dans le milieu, y compris pour des molécules habituellement peu absorbées. Parmi les systèmes étudiés, les nanoparticules avec hydrophylie et charge électrique (celles à surface neutre sont plus rapidement transportées à travers le mucus) adaptées semblent plus performantes que les mucoadhésives qui sont plus sensibles au taux de renouvellement du mucus et dont l’adhésion mucoïde peut compromettre leur pénétration dans les tissus épithéliaux et sub-épithéliaux. Il a également été montré in vitro que l’encapsulation avec du PLGA de 3 antirétroviraux (LPV/r et EFV) permettait de maintenir les ARVs pendant au moins 28 jours alors qu’en l’absence d’encapsulation ces molécules n’étaient plus détectables après 48 heures. Les nanotechnologies à base de polymères ont également été testés pour leur capacité à pénétrer dans le SNC, site sanctuaire pour le VIHVIH Virus de l’immunodéficience humaine. En anglais : HIV (Human Immunodeficiency Virus). Isolé en 1983 à l’institut pasteur de paris; découverte récemment (2008) récompensée par le prix Nobel de médecine décerné à Luc montagnier et à Françoise Barré-Sinoussi. car très difficilement accessible par les ARVs. Il est en effet probable que les nanoparticules franchissent la barrière hémato-méningée par endocytose/phagocytose et libèrent leur contenu à l’intérieur des cellules. Il a ainsi été montré, in vitro, que la ZDV et la 3TC traversent les cellules endothéliales vasculaires cérébrales (de 8 à 100%) et cela de façon inversement proportionnelle à la taille des nanoparticules qui les contiennent. D’autre part des nanoparticules de PLA chargées avec du RTV et conjuguées avec un peptide viral (TAT) parviennent à échapper à l’action de la Pgp et traverser la BHE grâce a sa fixation sur un récepteur spécifique par un mécanisme endocytose/transporteur indépendant. Ce procédé semble particulièrement intéressant pour les molécules pénétrant très mal dans le SNC comme les IPs. Les résultats in vitro et in vivo montrent d’ailleurs une concentration en RTV dans le SNC atteignant une concentration jusqu’à  800 fois plus élevé qu’avec une solution aqueuse, deux semaines après une injection intraveineuse chez la souris.

Les nanoparticules liposomales

Les liposomes sont des vésicules lipidiques constituées par une bicouche de phospholipides entourant un cœur aqueux qui permet d’encapsuler des molécules hydrophiles tandis que celles qui sont hydrophobes et ampiphiliques peuvent se solubiliser dans la bicouche lipidique. Ils ont la propriété, in vivo, d’être très rapidement captés par le système réticulo endothélial (SRE), ce qui a très vite conduit à leur utilisation comme vecteur de médicaments dans les macrophages. Ainsi la ZDV, composé amphiphilique, a-t-elle était associée à des liposomes, mais sa double attraction par les parties aqueuses et lipidique favorisait sa fuite des liposomes. Une solution pourrait avoir été trouvée en incorporant dans les liposomes une prodrogue de la ZDV (myristate de ZVD), bien plus lipophile, conduisant à un captage liposomal plus significatif et stable et qui a montré chez le rat un allongement important de sa demi-vie d’élimination. Les liposomes sont très rapidement phagocytés par les macrophages du sang. Plusieurs solutions sont à l’étude pour prolonger leur présence dans le sang et leur biodisponibilité intracellulaire. Cela peut s’obtenir par greffage des polymères hydrophiles sur leur surface (comme des PEG), ou mieux encore, en recouvrant celle-ci de fragment reconnaissable par la cible comme le sCD4, forme soluble du ligand naturel de la Gp 120. Enfin des essais ont également été entrepris avec des liposomes portant à la surface du mannose et du galactose ligands naturel des récepteurs à la lectine des macrophages. Là encore ces types liposomes ont montré une captation plus importante dans les cellules et organes du SRE chez le rat. La captation des liposomes par les macrophages semble aussi être être une solution indirecte pour véhiculer un antirétroviral dans le SNC. Il a ainsi été possible, d’augmenter jusqu’à 20 fois la concentration d’IDV dans le SNC de la souris après administration par voie intraveineuse de liposomes chargés en IDV. Les limites des liposomes sont leur faible capacité à héberger des molécules hydrophile du fait du peu de volume aqueux les constituants et les problèmes de stabilité physique et biologique sur le long terme.

Les dendrimères

Il s’agit d’une classe de macromolécules greffées par un motif structural et topologique unique. Ils se caractérisent par une petite taille (<100 nm) un poids moléculaire homogène et qui fixent assez aisément des fragments de ligands, ce qui en fait de bon candidats pour le ciblage d’antirétroviraux. Ils propriétés relèvent surtout d’un cœur polyfonctionnel et d’une surface multivalente capables de fixer de nombreux groupements fonctionnels. En utilisant un tetrapeptide naturel activateur des macrophages la pénétration de l’EFV dans ces cellules est significativement augmentée, in vitro, avec de plus une réduction de la cytotoxicité de ces biosystèmes. De plus, les dendrimères auraient une activité antirétrovirale propre notamment en interagissant avec la boucle V3 de la gp 120. Cela a conduit a la première demande de mise sur le marché à la FDA d’un gel intra-vaginal qui a montré un effet protecteur vis à vis du virus simien chez le singe macaque. Les études cliniques de phase I montre l’absence de passage systémique après administration vaginale. La tolérance du gel s’est révélée excellente. Par contre, certains dendrimères  contenant du galactosylcéramide qui ont une forte affinité pour la boucle V3 de la gp 120 voient leur utilisation limité par un faible index thérapeutique du fait d’une forte cytotoxicité.