Montpellier — Conférence de l’AFRAVIH: le VIH et les hépatites en Français

Après les conférences de Casablanca en 2010 et Genève en 2012, la Conférence internationale francophone VIH/Hépatites, organisée par l’AFRAVIH (Alliance Francophone des Acteurs de Santé contre le VIH) à choisi Montpellier pour sa 7e édition, du 27 au 30 avril 2014.

Eric Delaporte, directeur de l’unité IRD UMI 233 de l’Institut de recherche pour le développement (IRD) de Montpellier, est le président de cette 7e conférence et rappelle qu’il s’agit du seul forum francophone, pluridisciplinaire, rassemblant recherche, bilans des interventions et acteurs du plaidoyer.

Sur les 1250 personnes inscrites venant de 50 pays différents, l’Afrique francophone est fortement représentée. Une mobilisation qui découle de vrais besoins, pour le professeur Serge Eholié (Hôpital Treichville, Côte d’Ivoire), qui considère que l’Afrique francophone est «défavorisée» dans la lutte contre le VIHVIH Virus de l’immunodéficience humaine. En anglais : HIV (Human Immunodeficiency Virus). Isolé en 1983 à l’institut pasteur de paris; découverte récemment (2008) récompensée par le prix Nobel de médecine décerné à Luc montagnier et à Françoise Barré-Sinoussi.

En effet —et même s’il faut se garder d’une classification binaire—, avec une population plus nombreuse (2,5 fois plus importante), des gouvernements plus mobilisés et surtout des bailleurs de fonds plus puissants, l’Afrique anglophone occupe le devant de la scène continentale de la riposte au sidaSida Syndrome d’immunodéficience acquise. En anglais, AIDS, acquired immuno-deficiency syndrome. La charge viraleCharge virale La charge virale plasmatique est le nombre de particules virales contenues dans un échantillon de sang ou autre contenant (salive, LCR, sperme..). Pour le VIH, la charge virale est utilisée comme marqueur afin de suivre la progression de la maladie et mesurer l’efficacité des traitements. Le niveau de charge virale, mais plus encore le taux de CD4, participent à la décision de traitement par les antirétroviraux. en routine, par exemple, est en train d’être mis en place avec l’aide du Pepfar américain (President’s Emergency Plan for AIDS Relief ou Plan Présidentiel d’Urgence contre le sida) en Afrique de l’Est. On y compte 3 à 4 fois plus de projets thérapeutiques en général.

«Quand on voit la situation dans des pays comme la RDC, la Guinée ou la RCA, on a l’impression de revivre une époque que l’on croyait révolue, décrit le Dr Eric Goemaere, spécialiste du sida à Médecin sans Frontière. Dans nos projets, nous recevons des patients avec des stades avancés de sida qui rappellent ce qu’on voyait avant l’an 2000 dans les pays d’Afrique australe, quand les antirétroviraux étaient à peine disponibles.»

S’exprimant lors de la cérémonie d’ouverture, le Directeur exécutif de l’Onusida, Michel Sidibé a exhorté le monde francophone à se coaliser autour d’un nouveau modèle de leadership et à exploiter les leçons et l’innovation de la riposte au sida pour relever les autres défis de santé au niveau mondiale.

La lutte contre le VHC, nouveau défi

Le dépistage et la lutte contre le VHC est l’un de ces nouveaux défis. Cette année, l’espoir des nouveaux traitements contre le VHC, présentés en session plénière par le professeur Georges Philippe Pageau (CHU Saint Eloi de Montpellier), anime toutes les conversations. L’infection par le virus de l’hépatite C concerne 180 millions de personnes dans le monde, 250 000 en France. Les molécules promettent une guérison à 90%, là où il y a 30 ans on réussissait à soigner 10% des patients.

Isabelle Andrieux-Meyer de Médecins Sans Frontières rappelle que cette efficacité s’accompagne pour l’instant, dans les pays du nord, de tarifs très élevés: 84 000$ (56 000€) pour 12 semaines de traitement, soit 1000$ le comprimé, «pour un coût de production de 2,3$». L’association s’inquiète de l’accès à ces médicaments dans les pays plus pauvres, alors qu’ils représentent déjà un frein à une diffusion massive dans les pays développés.

Et ce n’est pas le seul obstacle rencontré dans la riposte face au VHC. Le dépistage n’a pas été un priorité jusqu’à présent, et les études épidémiologiques sont trop peu nombreuses en Afrique Francophone. Nous ne disposons pas de suffisamment chiffres sur la co-infection VIH/VHC, par exemple.

La Professeure Sinata Koulla-Shiro (l’Université de Yaoundé), secrétaire général du Ministère camerounais de la Santé publique, estime que les personnes co-infectées représentent 8% à 10% des cohortes de recherche ANRS au Cameroun. Le pays connait par ailleurs une prévalencePrévalence Nombre de personnes atteintes par une infection ou autre maladie donnée dans une population déterminée. du VIH de 4,3% sur une population de 20 millions de personnes. Mais les difficultés de prise en charge font que seulement 130 000 personnes sont sous traitement, soit 46% des personnes qui en auraient besoin. Si on se réfère aux nouvelles recommandations de traitements précoce, ce chiffre tombe à 30%. Les crises des pays voisins ont également provoqué un afflux de réfugiés qui doivent être pris en compte dans le calcul du nombre de ces personnes nécessitant une prise en charge.

Le contexte international, la gouvernance et les moyens financiers qu’il faudra mobiliser seront, comme il le sont encore et toujours pour le VIH, décisifs sur ce nouveau front.

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