Enjeux de la connaissance des populations LGBTQIA+

Un numéro hors-série de la revue Santé publique s’intéresse à la santé des minorités sexuelles, sexuées et de genre. Édité par François Berdougo, Gabriel Girard et Élise Marsicano (*), il met en avant et discute les enjeux de la connaissance des populations LGBTQIA+ et de leur santé dans une démarche collective.

Distribués en trois parties – abordant la méthodologie des études sur les minorités, la description des réalités de santé, puis les exemples innovants de prise en charge médicale ou en santé – les 29 articles écrits par des auteurs francophones apportent une image en pleine dynamique de la façon de produire des savoirs et des résultats de recherche encore peu ou pas divulgués. Les articles soulignent de manière explicite ou en creux les manques dans ces connaissances, invitant à poursuivre la recherche dans des démarches nouvelles, tant d’un point de vue méthodologique que de la construction même des savoirs, notamment sous la responsabilité ou une très forte implication des personnes directement concernées.

Le trio éditorial propose un véritable programme qui couvre la mise en réseau, la prise en compte des connaissances dans les dispositifs de soin, la recherche, la formation et les interventions en santé et l’intérêt d’une capitalisation des acquis restant encore dispersés. Cette publication collective apparaît en quelque sorte comme un nouveau départ, qui prend ses distances avec le VIH-centrisme, qui s’intéresse à chacun des groupes LGBTQI A+, et en particulier à ceux peu concernés par le VIHVIH Virus de l’immunodéficience humaine. En anglais : HIV (Human Immunodeficiency Virus). Isolé en 1983 à l’institut pasteur de paris; découverte récemment (2008) récompensée par le prix Nobel de médecine décerné à Luc montagnier et à Françoise Barré-Sinoussi. et jusqu’ici peu ou pas du tout pris en compte dans la recherche comme dans les interventions en santé.

Loin du VIH-centrisme

Cette publication, presque un manifeste du besoin de connaissances pertinentes, mais aussi de la vitalité de ce champ, apporte surtout de nombreuses connaissances par des auteurs issus des communautés. Les articles gagnent à être lus pour prendre la mesure de ce qui constitue en quelque sorte une discrimination quand les besoins spécifiques sont ignorés des démarches scientifiques ou des pratiques de soins ou de santé publique. Lecteurs et lectrices verront comment s’applique ici le principe d’universalisme proportionné, prendront la mesure des enjeux de la reconnaissance de l’intersexuation, verront l’augmentation importante des prises en charge en ALD pour dysphorie de genre dans les données de l’assurance maladie dans les dernières années ou encore comment est conduite aujourd’hui une consultation gynécologique non discriminante pour les lesbiennes.

Ces apports sont précieux au moment où l’approche santé sexuelle prend le pas sur le VIH-centrisme, où les multiples effets du stress minoritaire pour tous et toutes, mais aussi pour les minorités dans les minorités, sont de plus en plus reconnus.

  • « Santé des minorités sexuelles, sexuées et de genre », Hors-série n° 2/2022 de Santé publique, édité par François Berdougo, Société française de santé publique ; Gabriel Girard, Sesstim/ Institut des sciences de la santé publique d’Aix-Marseille (Isspam) – InsermInserm Institut national de la recherche médicale. Aix-Marseille Université, Institut de recherche pour le développement – Marseille ; Élise Marsicano, Laboratoire Sociétés, acteurs, gouvernement en Europe (Sage) UMR 7363, Université de Strasbourg.