Face aux pénuries qui frappent certaines molécules, le gouvernement français a déclaré son intention de sécuriser l’approvisionnement de 450 médicaments «essentiels», parmi lesquels une cinquantaine dont la production devra être relocalisée. La liste a été publiée le 13 juin sur le site du ministère de la Santé et de la Prévention.
Cette déclaration s’inscrit dans une volonté de favoriser des mesures de renforcement des capacités françaises de production de médicaments. La France dépend en effet à hauteur de 60 à 80% des importations, notamment de la Chine, pour la production de médicaments matures (antibiotiques, produits d’anesthésie, etc.). L’année dernière, la France a fait face à une pénurie inédite selon l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM): 3747 ruptures d’approvisionnement ont été signalées en 2022, contre seulement 871 en 2018.
Une liste évolutive mais déjà critiquée
Si l’initiative est globalement considérée comme bienvenue, la composition de la liste fait déjà débat. Pour la revue Prescrire, cette liste «comprend des médicaments inutiles, voire à écarter des soins, et en omet d’autres qui sont réellement essentiels dans de nombreuses situations de soins courantes». Plus encore, «la méthode d’élaboration de cette liste et la gestion des conflits d’intérêts posent problème par leur opacité».
La Société Française de Lutte contre le Sida (SFLS), qui n’a pas été sollicitée pour l’élaboration de cette liste, s’inquiète, elle, «de ne voir apparaître aucun des antirétroviraux ayant fait la preuve de leur efficacité dans le traitement et la prévention de l’infection par le VIH» et rappelle que «l’interruption liée à l’indisponibilité de ces antirétroviraux peut conduire à des situations individuelles et collectives dramatiques».
La SFLS regrette que «plusieurs médicaments qui ne figurent pas sur cette liste ont été reconnus comme essentiels et intégrés dans des plans de santé publique», notamment dans le champ de la santé sexuelle et elle s’étonne que «dans le document du ministère de la Santé et de la Prévention, la santé sexuelle soit réduite aux seules IVG médicamenteuse et contraception d’urgence, en contradiction avec la Stratégie nationale de santé sexuelle (SNSS)».
La liste est présentée comme «évolutive» sur le site du ministère. La SFLS recommande qu’y soient au moins ajoutées une à deux molécules de chaque principale classe d’antirétroviraux, en favorisant «celles qui sont actuellement recommandées en première ligne de traitement et celles dont le brevet est passé dans le domaine public».