Le premier, surnommé le «Patient de la ville de l’Espoir» d’après le centre de cancérologie de Los Angeles où il a reçu sa greffe il y a 3 ans et demi, est un homme américain de 66 ans, séropositifSéropositif Se dit d’un sujet dont le sérum contient des anticorps spécifiques dirigés contre un agent infectieux (toxo-plasme, rubéole, CMV, VIH, VHB, VHC). Terme employé, en langage courant, pour désigner une personne vivant avec le VIH. au VIHVIH Virus de l’immunodéficience humaine. En anglais : HIV (Human Immunodeficiency Virus). Isolé en 1983 à l’institut pasteur de paris; découverte récemment (2008) récompensée par le prix Nobel de médecine décerné à Luc montagnier et à Françoise Barré-Sinoussi. depuis 1988, qui a subi une greffe de moelle osseuse pour traiter sa leucémie aiguë myéloïde (LAM), déclarée en 2018.
Cette approche a déjà été utilisée avec succès chez 3 autres personnes vivant avec le VIH au moment de la greffe. L’idée est d’utiliser des cellules souches provenant d’un donneur porteur d’une mutation génétique lui conférant une résistance naturelle au VIH. Ainsi, les médecins ont décidé d’interrompre la prise d’antirétroviraux deux ans après sa greffe et ce nouveau patient n’a pas eu de traitement spécifique au VIH depuis 17 mois.
Le premier cas de guérison fonctionnelle avait été présenté en novembre 2008. Timothy Ray Brown, d’abord connu comme «le patient de Berlin», était ainsi devenu la première personne à être guérie du VIH suite à une greffe de moelle osseuse. Il est décédé en 2020 douze ans après, des suites d’une leucémie, sans qu’une trace du VIH ne soit jamais retrouvée dans son corps.
Bien qu’importante pour le patient, et scientifiquement, cette solution thérapeutique est trop compliquée et dangereuse pour être utilisée à grande échelle et n’est proposée qu’à des personnes déjà atteintes à un grave problème de santé nécessitant une greffe de moelle (généralement, une leucémie).
Une autre piste pour la rémission
Le deuxième cas présenté est celui d’une rémission fonctionnelle : Il s’agit est celui d’une femme espagnole de 59 ans –surnommée la patiente de Barcelone– qui a bénéficié en 2006 d’un traitement innovant pour renforcer la réponse immunitaire. Son traitement antirétroviral a en effet été interrompu après avoir bénéficié pendant 11 mois de quatre médicaments destinés à amorcer le système immunitaire pour mieux combattre le virus. Quinze ans après, son système immunitaire contrôle seul la réplication du VIH et la patiente est donc considérée en rémission.
Cette femme avait été diagnostiqué pendant sa primo-infectionPrimo-infection Premier contact d’un agent infectieux avec un organisme vivant. La primo-infection est un moment clé du diagnostic et de la prévention car les charges virales VIH observées durant cette période sont extrêmement élevées. C’est une période où la personne infectée par le VIH est très contaminante. Historiquement il a été démontré que ce qui a contribué, dans les années 80, à l’épidémie VIH dans certaines grandes villes américaines comme San Francisco, c’est non seulement les pratiques à risques mais aussi le fait que de nombreuses personnes se trouvaient au même moment au stade de primo-infection. avant que le VIH ne s’installe trop profondémment dans les réservoirs. Elle avait rapidement rejoint un petit essai clinique testant des thérapies immunomodulatrices, dans le cadre duquelle elle a d’abord reçu un traitement antirétroviral standard de lopinavir/ritonavir, fumarate de ténofovir disoproxil et lamivudine pendant neuf mois plus un traitement de courte durée de cyclosporine A (un médicament immunosuppresseur). Ensuite, son traitement a été suspendu pendant un moment et un facteur de stimulation des colonies de granulocytes et de macrophages (un agent stimulant la production de globules blancs) et de l’interféron-alpha (une cytokine produite par le système immunitaire inné en réponse à des expositions environnementales, notamment des infections virales.) ont été utilisés.
La situation est légèrement différente des patients greffés puisque le VIH est toujours présent dans le corps de la personne, il n’a pas été éradiqué mais il est contrôlé grâce à l’action de ses cellules NK mémoire et ses lymphocytes T gamma-delta CD8. Ces mécanismes de contrôle sont différents de ceux déjà observés chez les «contrôleurs élite», ces personnes vivant avec le VIH (environ 1 sur 200) dont le système immunitaire peut contrôler le virus sans traitement. (Elle a d’ailleurs connu une phase aiguë de primo-infection.)
Des études supplémentaires seront nécessaires pour comprendre le succès de cette nouvelle thérapie chez cette patiente. Les chercheurs ne savent pas à l’heure actuelle si cette stratégie thérapeutique est applicable chez d’autres personnes vivant avec le VIH. Elle a d’ailleurs échoué chez tous les autres participants de l’essai initial.
Ces réussites, bien qu’importantes pour l’avancement de la recherche sur l’éradication du VIH, ne doivent pas nous faire perdre notre sang froid. D’abord, pour ces quelques réussites, ces stratégies ont connu des dizaines d’échecs. Et face à cette poignée de guérisons et rémissions fonctionnelles, ce sont encore 38 millions de personnes qui attendent une cure définitive pour leur infection au VIH.