A partir des données scientifiques et des nouveaux enjeux de prévention, les commerçants, militants associatifs, journalistes et experts en santé publique et médecins présents ont débattu afin de changer la donne et mieux travailler ensemble en matière de lutte contre le sidaSida Syndrome d’immunodéficience acquise. En anglais, AIDS, acquired immuno-deficiency syndrome. chez les gays. Les échanges visaient à lancer une «ReLovution» dans la lutte contre le VIHVIH Virus de l’immunodéficience humaine. En anglais : HIV (Human Immunodeficiency Virus). Isolé en 1983 à l’institut pasteur de paris; découverte récemment (2008) récompensée par le prix Nobel de médecine décerné à Luc montagnier et à Françoise Barré-Sinoussi. pour aller vers la fin de l’épidémie.
«Si on prend pas soin de notre santé, personne ne le fera pour nous», a expliqué Aurélien Beaucamp, président de AIDES. Les chiffres rappelés par Virginie Supervie, épidémiologiste à l’Inserm, montrent bien que les gays supportent de manière très déséquilibrée le poids de l’épidémie en France: 17 % de prévalencePrévalence Nombre de personnes atteintes par une infection ou autre maladie donnée dans une population déterminée. près de la moitié des nouvelles contaminations (42 %) et 1% des gays deviennent séropositifs chaque année. Dès lors, débattre des enjeux spécifiques des gays devenait une nécessité, pour que chaque acteur puisse comprendre et trouver le rôle qu’il peut jouer pour mettre fin à cette épidémie.
Discussions autour de la prévention diversifiée
La première demi-journée fut celle de l’appropriation et de la vulgarisation de la prévention dites diversifiée, et la nouvelle donne qu’elle engendre: si on combine l’ensemble des outils à disposition (TasP, PrEPPrEP Prophylaxie Pré-Exposition. La PrEP est une stratégie qui permet à une personne séronégative exposée au VIH d'éliminer le risque d'infection, en prenant, de manière continue ou «à la demande», un traitement anti-rétroviral à base de Truvada®. dépistage, TPETPE Traitement (ou prophylaxie) post-exposition. Consiste à prescrire à une personne exposée à l'infection par le VIH, lors d’un accident d’exposition professionnel ou sexuel, une multithérapie d'antirétroviraux, de préférence dans les 4h qui suivent l'accident. préservatifs, etc.), il est possible de stopper la dynamique des contaminations, encore très active chez les gays. L’après-midi était quant à lui consacré à des ateliers thématiques sur des questions prégnantes chez les gays:
- l’émergence du chemsexChemsex Le chemsex recouvre l’ensemble des pratiques relativement nouvelles apparues chez certains hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes (HSH), mêlant sexe, le plus souvent en groupe, et la consommation de produits psychoactifs de synthèse. (sexe sous produits)
- la prise en compte des minorités
- la lutte contre l’homophobie et les autres discriminations
- la prévention 2.0 sur internet.
Pour le chemsex, beaucoup de participants témoignent de leur ignorance sur un phénomène évolutif et qui les inquiète, notamment en termes d’actions de prévention ou de rôle à jouer. Comment faire en cas de problème dans son établissement sans mettre en danger la personne ou la structure, à cause de l’illégalité des produits consommés. Malgré les différences d’informations, tous s’accordent à créer et diffuser le maximum d’information. Le sujet doit émerger dans les structures LGBT, en allant vers les personnes qui pratiquent le chemsex pour ensuite travailler sur la prévention, qui sera fondée sur leurs expériences et témoignages, sans les stigmatiser. «Si on oublie les spécificités des gays pour les toucher, alors on ne touchera personne», explique Didier Jayle, médecin VIH et responsable éditorial de VIh.org.
Doutes et résistances
Mais le concept de prévention combinée ou diversifiée reste assez nouveau et se heurte encore à des résistances ou des doutes. Dans les échanges, la Prep focalise encore des tensions ou des critiques, quant aux effets sur l’utilisation du préservatif. Pour certains, la capote doit rester au centre, c’est l’outil le plus efficace contre toutes ISTIST Infections sexuellement transmissibles. D’autres arguent qu’elle n’a pas réussi à stopper l’épidémie depuis 30 ans et ne peut donc rester l’unique axe.
Tout comme le TasPTasp «Treatement as Prevention», le traitement comme prévention. La base du Tasp a été établie en 2000 avec la publication de l’étude Quinn dans le New England Journal of Medicine, portant sur une cohorte de couples hétérosexuels sérodifférents en Ouganda, qui conclut que «la charge virale est le prédicteur majeur du risque de transmission hétérosexuel du VIH1 et que la transmission est rare chez les personnes chez lesquelles le niveau de charge virale est inférieur à 1 500 copies/mL». Cette observation a été, avec d’autres, traduite en conseil préventif par la Commission suisse du sida, le fameux «Swiss statement». En France en 2010, 86 % des personnes prises en charge ont une CV indétectable, et 94 % une CV de moins de 500 copies. Ce ne sont pas tant les personnes séropositives dépistées et traitées qui transmettent le VIH mais eux et celles qui ignorent leur statut ( entre 30 000 et 50 000 en France). qui, à lui seul, ne suffira pas. «La PrEP n’est pas nécessairement pour tous, mais elle doit être accessible à tous et partout pour ceux qui en ont besoin, a défendu France Lert, épidémiologiste responsable du rapport Vers Paris sans sida», programme de la Mairie de Paris qui se veut précurseur d’une nouvelle approche globale et positive de la santé des personnes les plus vulnérables, dont les gays. C’est donc l’ensemble de la palette qui doit être promue et défendue par les acteurs de la communauté gay, pour se donner les moyens d’atteindre l’horizon de la fin des contaminations pour les HSHHSH Homme ayant des rapports sexuels avec d'autres hommes.
La ReLovution de ce week-end en appelle d’autres, à des échelons locaux et régionaux. Des demandes précises de création d’un socle d’information sur tous ces enjeux, accessible à tous et tous, a été formulé. A suivre.
- Lire le compte-rendu complet sur le site de Aides : Santé sexuelle : un nouveau consensus chez les gays?