Vivre avec le VIH
En France, grâce aux molécules et stratégies les plus récentes, le bénéfice/risque de la mise sous traitement, grâce aux progrès en galénique et en ce qui concerne les effets indésirables, est désormais en faveur des séropositives et séropositifs. Non seulement les experts insistent sur la mise sous traitement précoce, le plus tôt possible après la contamination, mais également sur la mise en place d’un traitement chez toutes les PvVIH quelles que soient les caractéristiques cliniques ou biologiques et notamment le chiffre de CD4.
Le bénéfice individuel est désormais rejoint par le bénéfice de santé publique: comme les traitements limitent la transmission du VIH (TasP), les experts comptent sur l’utilisation large des anti-rétroviraux (ARV) pour infléchir la courbe de l’épidémie. Un objectif ambitieux, puisqu’il faudrait au moins que 90% des PvVIH soient sous traitement pour que l’effet du traitement sur le nombre de contaminations se fasse sentir.
Dans l’idéal, c’est 40 000 personnes de plus qui doivent avoir accès à un traitement, un chiffre contenant les personnes non dépistées (l’épidémie masquée) et les PvVIH pas encore sous traitement.
Si l’infection par le VIH est bien considérée comme une maladie chronique, les PvVIH connaissent un nombre de co-morbidités qui justifie un dépistage, un suivi et des traitements particuliers. Ces maladies sont désormais de plus en plus fréquentes car l’espérance de vie sous traitement augmente régulièrement ; ainsi les cancers représentent désormais environ un tiers des causes de décès des PvVIH. Les hépatites virales chroniques (un quart des PvVIH sont également infectées par l’un des deux virus des hépatites B ou C) et les maladies cardio-vasculaires et métaboliques sont également très fréquentes. La sensibilisation des médecins généralistes à ces co-morbidités doit être favorisée, et si possible intégrée à une démarche de formation.
Enfin, le vieillissement des PvVIH, qui heureusement vivent plus longtemps, appelle à une prise en charge multi-disciplinaire et à une adaptation des structures d’accueil des personnes âgées ou handicapées à cette nouvelle patientèle.
Prévention
En France, malgré des traitements très efficaces, malgré le treatment as prevention (Tasp), l’épidémie reste mal contrôlée. En effet, chaque année, 7000 à 8000 nouvelles contaminations ont lieu, soit une incidence générale de 18 cas pour 100 000 habitants. Evidemment, cette incidence connait des variations selon les populations et les lieux: Dans les départements français d’Amérique (DFA), elle est de 59/100 000, en Guyane de 147/100 000, et chez les hommes ayant des rapports sexuels avec d’autres hommes, de 1000/100 000.
Prévention comportementale, Tasp traitement post-exposition, prophylaxie pré-exposition, les experts insistent sur l’importance de l’utilisation de tous les outils de prévention, composant d’une prévention combinée nécessaire pour réduire le nombre de contaminations.
Dépistage
A peu près 150 000 personnes vivent avec le VIH en France, et on estime que 20%, soit 30 000 personnes, ignorent leur séropositivité. Pour autant, le dépistage systématique tel que proposé dans le Plan national de lutte contre le sida 2010-2014 ne se réalise pas. Les occasions de dépistage n’ont pas été multipliées et les médecins généralistes hésitent à proposer les tests. Le groupe d’Experts 2013 recommande le recours à un dépistage large mais ciblé, à partir de situations cliniques pertinentes, proposé par les médecins généralistes, mais aussi à l’hôpital et «hors les murs», par les associations par exemple. Le dépistage doit être proposé aux personnes appartenant aux populations où la prévalence de l’infection est la plus élevée. Recommandation dont on notera qu’elle tourne le dos aux directives du Plan national de lutte contre le vih/sida et les IST 2010-2014 où l’insuffisance de l’augmentation de l’offre de dépistage est clairement documentée à 2/3 du parcours (4% seulement de tests en plus) .
Dans cet esprit, le rapport recommande a mise à disposition plus large des tests rapides à orientation diagnostique (TROD) et la levée volontaire de l’anonymat dans les Centres de dépistage anonymes et gratuits (CDAG) pour faciliter le recours aux soins.
Le Rapport mentionne également le recours aux autotests, qui doivent d’ajouter aux dispositifs de dépistage existant, en gardant en tête leurs limites (au niveau de la sensibilité et de l’accompagnement au diagnostique, par exemple) suivant en ce sens un récent avis du CNS
Enfin, le groupe recommande l’amélioration du dépistage dans les lieux de privation de libertés.
Par ces recommandations, le groupe défend ainsi le principe qu’en permettant au plus grand nombre de PVVIH de connaitre leur statut sérologique et en leur proposant un traitement dès le diagnostic, on peut limiter grandement l’épidémie.
Le coût de la prise en charge
Le Rapport ne dit pas, et ce n’est pas son rôle, comment parvenir à traduire ces recommandations en politique de santé publique. La question du coût de la prise en charge des PvVIH, par exemple, sera forcément centrale. L’augmentation du nombre de personnes traitées aura un coût, qu’il faudra évaluer, en prenant en compte les bénéfices sur la santé des PvVIH à long terme (moins de pathologies graves), le recours aux génériques et le prix du parcours de soin.
Pour la première fois dans ce type de rapport d’Experts, le groupe de travail a voulu initier une réflexion sur l’aspect médico-économique de la prise en charge et en particulier, comment diminuer le coût de cette prise en charge.
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Renaud Persiaux (AIDES) et Marianne L’Hénaff (ARCAT) qui étaient les deux représentants associatifs au groupe central désignés par le collectif interassociatif TRT-5, font le point pour Seronet. Ils donnent aussi leur avis militant et personnel sur cette mouture 2013.
> Rapport d’experts VIH : le point sur les recommandations françaises 2013, Séronet.info.
Photos, présentations, composition des groupes et déclarations publiques d’intéret des membres du groupe d’experts.