Cet article a été publié dans Transcriptases n°149 Spécial Washington 2012, réalisé en partenariat avec l’ANRS.
Résultats à la semaine 96 de l’étude 145 :
elvitegravir (EVG) versus raltégravir (RAL) chez des patients prétraités1Elion R. et al, “Efficacy and safety results from a randomized, double blind, active controlled trial of elvitegravir (once-daily) versus raltegravir (twice-daily) in treatment-experienced HIV-positive patients: long term 96-week data”, TUAB0105
Les résultats à 96 semaines de suivi de cette étude comparant l’elvitégravir (EVG) en une prise par jour au raltégravir (RAL) en deux prises par jour, en association à un inhibiteur de protéase boosté par le norvir pleinement actif et à un autre agent chez des patients prétraités en échec (charge virale ≥1000 copies/ml et résistance à au moins deux classes d’antirétroviraux) ont été rapportés. Pour mémoire, l’analyse des résultats à S 48 (critère principal, % de patients présentant une CV <50 copies/ml) avait confirmé l’hypothèse de départ de non infériorité (59% – EVG contre 58% – RAL ; p=0,001). L’ensemble des 712 patients randomisés et traités (354 pour l’EVG et 358 pour le RAL) ont été pris en compte pour l’analyse de la tolérance à S 96. Pour l’analyse de l’efficacité (351 patients dans chaque bras), 10 patients ont été exclus en raison de violations du protocole. A S 96, le pourcentage de patients présentant une CV <50 copies/ml est de 48% dans le bras EVG contre 45% dans le bras RAL (différence : 2,6% ; IC : 95%=-4,6 ; 9,9). La restauration immunologique est également comparable dans les deux bras (respectivement +205 et +198 cellules/mm3). Un échec virologique a été constaté chez 22,8% des patients du bras EVG et 27,4% de ceux du bras RAL, avec une faible incidence de développement de mutations de résistance aux inhibiteurs de l’intégrase dans les deux bras (7%). En termes d’événements indésirables, le pourcentage d’EI sérieux est similaire dans les deux bras (respectivement 20,1 et 23,5%), de même que les EI de grade 3/4 (24,3 et 23,7%) ou les sorties d’étude pour EI (3,1 et 4,2%). Les élévations des ASAT/ALAT de grade 3/4 ont été moins fréquentes dans le bras EVG : respectivement 2% et 6%, et 2% et 5%. Au total, ces résultats de suivi à long terme (S 96) confirment ceux obtenus à S 48 avec une efficacité et un profil de tolérance de l’EVG comparable à celui du RAL.
Données poolées de l’analyse à la semaine 48 des études Echo et Thrive2Cohen C. et al. Abstract TUPE 023
L’objectif de cette analyse poolée était d’évaluer l’efficacité et la tolérance de la rilpivirine (RPV) (n=248) comparé à l’efavirenz (EFV) (n=256) associée à tenofovir/emtricitabine (TDF/FTC) chez des adultes infectés par le VIH-1, naïfs de traitement antirétroviral (ARV), ayant une charge viraleCharge virale La charge virale plasmatique est le nombre de particules virales contenues dans un échantillon de sang ou autre contenant (salive, LCR, sperme..). Pour le VIH, la charge virale est utilisée comme marqueur afin de suivre la progression de la maladie et mesurer l’efficacité des traitements. Le niveau de charge virale, mais plus encore le taux de CD4, participent à la décision de traitement par les antirétroviraux. à l’inclusion ≤100000 copies/ml. Parmi les 544 patients inclus, 75% étaient des hommes, d’âge médian 36 ans. La charge virale médiane initiale était de 4,5 log copies/ml, et le taux médian de CD4 de 279/mm3. Les résultats montrent que pour les patients ayant une charge virale initiale ≤100000 copies/ml, l’association RPV+FTC/TDF est non inférieure à l’association EFV+FTC/TDF avec une réponse virologique (CV <50 copies/ml) supérieure (90% contre 85%). Dans les deux bras, la réponse virologique était plus basse d’environ 20% lorsque la compliance était ≤95% contre >95%. Les taux d’échecs virologiques sont bas : 4,2% pour RPV+FTC/TDF et 2,3% pour EFV+FTC/TDF. L’augmentation moyenne des CD4 était comparable (respectivement de 202 et 195 cellules/mm3). Il y avait peu d’arrêts de traitement liés aux effets indésirables (2% dans le groupe RPV+FTC/TDF contre 6% dans le groupe EFV+FTC/TDF). Les données de résistance ont également été présentées. L’analyse des résistances en cas d’échec montrent, pour les deux groupes, un pourcentage identique de mutations sur les inhibiteurs non nucléosidiques de la transcriptase inverse (INNTI) et/ou les inhibiteurs nucléosidiques de la transcriptase inverse (INTI). Ces résultats favorables sont en faveur de l’utilisation de l’association Rilpivirine +FTC/TDF chez des patients naïfs de traitement avec une charge virale initiale ≤100000 copies/ml, ce qui correspond au texte de l’autorisation de mise sur le marché (AMM) de ce STP (pour Single Tablet Regimen).
Résultats à S 96 de l’étude A4001078 : MVC + ATV/r chez les patients naïfs avec tropisme CCR53Mills A. et al., “Once-daily maraviroc in combination with ritonavir-boosted atazanavir in treatment-naïve patients infected with CCR5‑tropic HIV-1 (study A4001078): 96‑week results”, TUAB0102
Cette étude randomisée de phase IIb a évalué l’efficacité et la tolérance d’une association maraviroc (MVC) + Atazanavir/ritonavir (ATV/r) chez 121 patients naïfs infectés par un VIHVIH Virus de l’immunodéficience humaine. En anglais : HIV (Human Immunodeficiency Virus). Isolé en 1983 à l’institut pasteur de paris; découverte récemment (2008) récompensée par le prix Nobel de médecine décerné à Luc montagnier et à Françoise Barré-Sinoussi. à tropisme CCR5 répartis en deux bras de traitement administrés en une prise par jour : ATV/r 300/100 mg + MVC 150 mg (n=60) ou ATV/r 300/100 mg + TDF/FTC 200/300 mg (n=61). Le critère principal était le pourcentage de patients présentant une CV <50 copies/ml à S 48. Ce sont les résultats de suivi à S 96 qui ont été présentés à l’IAC : le pourcentage de patients présentant une CV <50 copies/ml est de 67,8% dans le bras MVC contre 82,0% dans le bras TDF/FTC (CV <400 copies/ml : respectivement 78% et 83,6%). Un échec virologique a été constaté chez cinq patients (trois dans le bras MVC, deux dans le bras TDF/FTC). Aucune mutation génotypique ou phénotypique de résistance et aucun changement de tropisme n’ont été identifiés, et ce, dans les deux bras. La restauration immunologique est également comparable dans les deux bras : +239,8 cellules/mm3 (MVC) et +264 cellules/mm3 (TDF/FTC). Concernant le profil de tolérance, la diminution de la clairance de la créatinine à S 96 par rapport aux valeurs à l’inclusion est de -0,5ml/mn dans le bras MVC et de -18ml/mn dans le bras TDF/FTC. La diminution de l’activation sur les cellules CD3+ CD8+ CD38+ était plus importante à S 48 dans le bras MVC et, enfin, les marqueurs sériques de remodelage osseux (phosphatase alcaline osseuse, propeptide n-terminal du procollagène) étaient moins élevés dans le bras MVC à S 48 et S 96. Au total, ces résultats sont mitigés sur l’efficacité virologique pour l’association MVC + ATV/r ; ce qui explique peut-être que, dans l’étude de phase III (804 inclusions prévues) qui a débuté en septembre 2011, l’ATV/r a été remplacé par le darunavir (DRV/r).
Etude 103. «Quad» versus efavirenz/tenofovir/ftc (EFV/TDF/FTC) chez les patients naïfs :
résultats à la semaine 484Sax P. et al. Abstract TUPE028
L’objectif de cette étude était d’analyser l’efficacité des deux stratégies selon la charge virale à l’inclusion. Sept cent patients nord-américains, naïfs de traitement ARV avec une charge virale ≥ 5000 copies/ml, une clairance à la créatinine >70 ml/min et une sensibilité à l’EFV, au FTC, et au TDF ont été randomisés selon un schéma 1:1 pour le QUAD (truvada/ftc/cobicistat/elvitegravir) ou l’association EFV/FTC/TDF en QD. Quatre-vingt-neuf pour cent étaient des hommes, avec une charge virale médiane en baseline à 4,76 log10 c/ml (33% avec ARN VIH 1 >100000 c/ml). L’objectif principal était le pourcentage de patients avec une CV <50 copies/ml à S 48. Les résultats montrent que la réponse virologique dans le groupe Quad (88%) est non inférieure à l’association EFV/FTC/TDF (84%) à S 48. Selon que les patients avaient une charge virale en baseline élevée (>100000 c/ml) ou basse (≤100000 c/ml), les taux de réponse étaient comparables pour le Quad (respectivement 84% et 90%) et EFV/FTC/TDF (82% et 85%, respectivement). Les taux d’échecs virologiques à S 48 sont de 7% dans les deux bras et l’augmentation moyenne des CD4 est de 239 cellules/ml dans le groupe Quad et 206 cellules/ml dans le groupe EFV/FTC/TDF (p=0,009). Les taux d’arrêt de traitement pour effets indésirables étaient identiques dans les deux groupes (Quad : 4%, EFV/FTC/TDF : 5%). Il n’y avait pas de différence dans les fréquences d’effets indésirables de Grade 3 et 4. La diminution médiane de la clairance de la créatinine est plus importante dans le groupe Quad du fait de la présence du boost cobicistat, que dans le groupe EFV/FTC/TDF (-14,3 contre -3,0 ml/min à S 48, p<0,001). Les augmentations de cholestérol total, HDL et LDL à S 48 sont en revanche significativement plus basses dans le groupe Quad par rapport au groupe EFV/FTC/TDF (p≤0,001). Dans cette étude de phase III comparant deux traitements en monoprise à S 48, le Quad a démontré une non infériorité face à EFV/FTC/TDF, avec donc un bon profil de tolérance.
Résultats de l’étude Merit5Cooper D.A. et al., “Five-year efficacy and safety of maraviroc versus efavirenz, each in combination with zidovudine/lamivudine, in treatment-naive HIV 1 infected patients: open-label extension of the randomized, double-blind merit study” TUPE026 (2011)
L’étude Merit est une étude randomisée, en double-aveugle, multicentrique de phase IIB/III, qui a inclus des patients naïfs de traitement ARV, âgés ≥16 ans) avec tropisme CCR5, avec une CV initiale ≥2000 copies/ml. Les patients ont reçu MVC 300 mg en QD (une fois/jour), MVC 300 mg en BID (deux fois/jour), ou EFVEFV L'éfavirenz (EFV) est un médicament antirétroviral, analogue non nucléosidique inhibiteur de la transcriptase inverse (nNRTI), utilisé pour le traitement de l'infection par le VIH. Cette molécule est commercialisée sous le nom de Sustiva ou Stocrin et est disponible sous forme de comprimés ou de capsules. 600 mg en QD, associé dans tous les cas à zidovudine/lamivudine 300 mg/150 mg BID. Dans cette étude, le maraviroc (MVC) a démontré une efficacité et une tolérance comparables à l’efavirenz (EFV) dans l’étude Merit sur une période de 96 semaines. Après la visite à S 96 du dernier patient inclus, l’aveugle était levé et les patients pouvaient être inclus à nouveau dans une étude ouverte sur trois ans. Les données rapportées concernent cette phase d’extension sur cinq ans. Les objectifs comportaient le pourcentage de patients avec une charge virale <50 et <400 copies/ml et l’évolution du taux de CD4 par rapport à l’inclusion. Les résultats montrent que sur 917 patients randomisés, 895 ont été traités (MVC QD=177 ; MVC BID=311 ; EFV=303). Le pourcentage de patients ayant obtenu une charge virale <50 copies/ml est comparable dans les bras MVC BID et EFV, et à S 240 (MVC BID 50,8% et EFV 45,9%). MVC QD avait été arrêté suite à une analyse intermédiaire. Où il apparaît que le maraviroc en association présente une efficacité comparable à cinq ans à celle de l’efavirenz chez des patients naïfs de traitement avec une souche VIH-1 à tropisme CCR5.
Etude Spirit :
maintien du contrôle de la réplication virale et amélioration du profil lipidique après switch pour FTC/RPV/TDF6Palella F. et al., “Spirit study: switching to emtricitabine/rilpivirine/tenofovir df (FTC/RPV/TDF) single-tablet regimen (STR) from a ritonavir-boosted protease inhibitor and two nucleoside reverse transcriptase inhibitors (NRTIS) maintains HIV suppression and improves seru”, TUAB0104
Cette étude internationale randomisée menée en ouvert a évalué l’efficacité et la tolérance d’un switch, chez des patients recevant : [1] IP/r + ; [2] INTI, depuis au moins six mois et contrôlés virologiquement (CV <50 copies/ml), pour une association FTC/RPV/TDF. Ont été randomisés 476 patients, selon un schéma 2 :1, pour recevoir FTC/RPV/TDF en une prise par jour (n=317) ou poursuivre leur traitement à base d’IP/r (n=159). Le critère principal de cette étude de non-infériorité (marge de 12%) était le pourcentage de patients présentant une CV <50 copies/ml à S 24 et une analyse de l’évolution du profil lipidique a été également réalisée. Les caractéristiques des patients à l’inclusion étaient comparables entre les deux bras de traitement (86% à 91% d’hommes, âge médian de 42 à 43 ans, entre 2,6 et 2,9 d’ancienneté de traitement ARV, médiane des CD4 entre 576 et 600 cellules/mm3). Les résultats sur le critère principal confirment l’hypothèse de départ de non-infériorité : 93,7% (FTC/RPV/TDF) contre 89,9% pour le bras contrôle (IC 95% = -1,6% ; 9,1%). Cette efficacité est retrouvée dans les deux bras, quel que soit le niveau de charge virale (< ou ≥100000 copies) : respectivement 95% (FTC/RPV/TDF) contre 89,2% (IP/r + 2 INTI) et 95,5% (FTC/RPV/TDF) contre 92,3% (IP/r + 2 INTI). Le pourcentage d’échecs virologiques (CV ≥50 copies/ml à S 24 ou arrêt de l’administration du traitement de l’étude avec CV ≥50 copies/ml) est plus faible dans le bras FTC/RPV/TDF (0,9% – 3 patients contre 5% – 8 patients dans le bras IP/r + 2 INTI). Le développement d’une résistance a été constaté chez deux patients du bras FTC/RPV/TDF (M184I ; M184I, V90I, L100I, K103N) contre un dans le bras IP/r (M184V). Pour les 17 patients (5,4%) du bras FTC/RPV/TDF présentant un virus porteur de la mutation K103N à l’inclusion (résistance transmise), 100% présentaient une CV <50 copies/ml à S 24. Enfin, un bénéfice significatif a été observé concernant l’évolution du profil lipidique (cholestérol total, LDL-c et triglycérides, ratio CT/HDL-c) dans le bras FTC/RPV/TDF en comparaison au bras contrôle. Le switch FTC/ RPV/TDF permet une amélioration significative du score à dix ans de risque de Framingham à S 24 en comparaison à IP/r + 2 INTIs (p=0,001).
Scénarios pour une estimation des besoins en antirétroviraux dans le traitement et la prévention de l’infection par le VIH
Nombre de personnes éligibles à un HAART (pour Highly Active Anti-Retroviral Therapy) dans les pays à faibles et moyennes ressources : |
||||
11 millions | 15 millions | 23 millions | 25 millions | 32 millions |
1 |
2 |
3 | 4 | 5 |
CD4 < 200 | CD4 < 350 | CD4 < 350 + TasPTasp «Treatement as Prevention», le traitement comme prévention. La base du Tasp a été établie en 2000 avec la publication de l’étude Quinn dans le New England Journal of Medicine, portant sur une cohorte de couples hétérosexuels sérodifférents en Ouganda, qui conclut que «la charge virale est le prédicteur majeur du risque de transmission hétérosexuel du VIH1 et que la transmission est rare chez les personnes chez lesquelles le niveau de charge virale est inférieur à 1 500 copies/mL». Cette observation a été, avec d’autres, traduite en conseil préventif par la Commission suisse du sida, le fameux «Swiss statement». En France en 2010, 86 % des personnes prises en charge ont une CV indétectable, et 94 % une CV de moins de 500 copies. Ce ne sont pas tant les personnes séropositives dépistées et traitées qui transmettent le VIH mais eux et celles qui ignorent leur statut ( entre 30 000 et 50 000 en France). | CD4 < 500 | tous VIH+ |
Recommandé jusqu’à 2010 |
Recommandé depuis 2010 |
Augmentation du TasP |
fonction des niveaux de preuve à venir (GRADE review) |
Test and treat |
Source : OMS |
Tous niveaux de CD4 : couples sérodiscordants, femmes enceintes, populations à risque |
Remerciements : La lettre de l’infectiologue, Jean-Philippe Madiou et Stéphane Chadapaud