Comment envisagez-vous de vous impliquer dans le débat sur l’usage des drogues et autres substances psychoactives en France?
Je défendrai une politique pragmatique de prévention des conduites addictives et de réduction des risques et dommages. Les politiques répressives poussent les usager·es de drogues illicites dans la clandestinité et sont inefficaces du point de vue de la santé et de la sécurité publiques. Il faut lever le tabou sur les drogues pour pouvoir en parler, sensibiliser sur leur impact et leurs méfaits, prévenir les addictions, informer ; il faut aider les personnes toxicodépendantes sur le plan médical, sanitaire et psychosocial, et leur garantir un accompagnement bien-traitant. Un maillage territorial de haltes soins addictions (anciennes SCMR) devra être mis en place en proximité des scènes de drogues pour réduire les risques de comorbidités et d’overdoses, mais aussi pour débuter une prise en charge sanitaire et social en commençant par un accompagnement médicalement supervisé des personnes les plus dépendantes pour qu’elles ne restent plus à la rue, ni pour consommer, ni pour vivre.
Je serai sans complaisance avec les lobbies des drogues licites que sont le tabac et surtout l’alcool, dont les dégâts sur la santé continuent à tuer plus que toutes les autres drogues et font l’objet d’un véritable déni.
L’Allemagne a récemment annoncé la légalisation du cannabis, Malte a récemment légalisé l’usage récréatif, le Luxembourg va dépénaliser l’usage récréatif du cannabis… Êtes-vous favorable à la légalisation ou à l’encadrement de la production, importation et commerce du cannabis?
Oui, la légalisation du cannabis est une des mesures que je porte sans ambiguïté. Nous intégrerons le cannabis dans le champ d’application de la loi Évin. Comme dans de nombreux pays précurseurs, l’État encadrera la production et la vente du cannabis en s’appuyant sur des producteurs et des distributeurs strictement encadrés. Les taxes perçues sur les ventes permettront de financer les politiques de santé et de prévention des drogues. La légalisation permettra une diminution de la criminalité, et les forces de police et la justice pourront se concentrer sur des missions prioritaires.
Les salles de consommation à moindre risque ont montré scientifiquement leur intérêt, elles existent depuis longtemps dans d’autres pays en Europe. Elles seront bientôt remplacées par les haltes soins addictions, expérimentées pendant trois ans. Les feriez-vous entrer dans le droit commun ? Quelle solution proposez-vous?
Comme vous le soulignez, les salles de consommation à moindre risque ont fait leurs preuves dans plusieurs pays européens et les résultats de l’expérimentation des salles de consommation à moindre risque (SCMR) à Paris et Strasbourg confirment leur efficacité: baisse des infections au VIHVIH Virus de l’immunodéficience humaine. En anglais : HIV (Human Immunodeficiency Virus). Isolé en 1983 à l’institut pasteur de paris; découverte récemment (2008) récompensée par le prix Nobel de médecine décerné à Luc montagnier et à Françoise Barré-Sinoussi. et au virus de l’hépatite C, des complications cutanées dues aux injections et quasi disparition des overdoses, diminution du nombre de seringues usagées dans l’espace public. Ces enseignements positifs doivent nous inciter à intégrer les SCMR (devenues “halte soins addiction”) dans le droit commun, et de permettre automatiquement leur intégration à des structures existantes (Centres d’accueil et d’accompagnement à la réduction de risques pour usagers de drogues, Caarud et Csapa), voire d’en créer de nouvelles à proximité des scènes ouvertes, quand il n’y a pas de centres de prise en charge.
Proposerez-vous de nouvelles mesures pour limiter l’usage du tabac et de l’alcool?
Le tabac et l’alcool tuent 120 000 personnes par an et représentent un problème de santé publique majeur. Je renforcerai les espaces non-fumeurs, notamment aux abords des écoles ; j’exigerai une vigilance sans faille pour que les lobbies de l’alcool ne puissent détourner les messages de santé publique, contourner les lois, et finalement incitent à consommer.
Je remettrai en place rigoureusement la loi Évin interdisant toute publicité pour l’alcool et les marques d’alcool. Je veillerai particulièrement à la protection de notre jeunesse contre les excès et l’accoutumance à l’alcool.
Enfin la prévention doit être renforcée notamment par des espaces sans tabac devant les écoles, les collèges et les lycées, mais aussi par une éducation préventive sur toutes les drogues licites ou illicites dès le collège.
La cocaïne est largement diffusée dans toutes les classes de la société. C’est un problème majeur de violence et de corruption. Que proposez-vous ?
La cocaïne est une drogue de la performance quand elle n’est pas sous forme de crackCrack Le crack est inscrit sur la liste des stupéfiants et est la dénomination que l'on donne à la forme base libre de la cocaïne. Par ailleurs, ce dernier terme est en fait trompeur, car le mot cocaïne désigne en réalité le chlorhydrate de cocaïne. L'origine du mot 'crack' provient du craquement sonore qu'il produit en chauffant. mais sous cette forme elle devient la drogue du pauvre et de la détresse sociale. Dans les deux cas, son usage peut être très dangereux pour le consommateur, ainsi la réduction des risques doit-elle s’appliquer, y compris sous forme de salles d’inhalation à moindre risque et, pour les usager·es de crack et pour celles et ceux qui deviennent très dépendant·es, un accompagnement social et sanitaire ainsi qu’un hébergement adapté doivent pouvoir être proposés systématiquement.
En outre l’usager·e de crack, comme pour toutes les drogues, ne doit plus être traité·e comme un·e criminel·le, mais comme une personne responsable et quand il/elle devient dépendant·e, on doit le/la considérer comme un·e malade et lui proposer des solutions. La répression française de l’usage n’a fait qu’augmenter la toxicomanie, il est urgent de sortir de cette spirale et d’avoir une politique des drogues responsable et efficace. Dans tous les cas, il faut une information préventive, y compris dans le monde de l’entreprise, qui permette d’avertir des dangers causés par la cocaïne, qui, croit-on souvent encore à tort, serait moins addictive.