Cet article a été publié dans le Swaps n°72 qui propose un dossier spécial consacré aux « Nouveaux Produits de Synthèse »
Pourquoi vous êtes-vous engagé dans la Commission mondiale qui a recommandé en 2011 une toute autre politique internationale concernant les drogues ?
Aleksander Kwasniewski. La raison principale regarde directement la politique suivie dans mon pays en la matière. Beaucoup de gens m’ont montré et convaincu, en particulier les responsables de l’Open society (la très influente fondation de Georges Soros, ndlr), que la législation que nous avions mise en place sous ma présidence en Pologne était non seulement inefficace, mais avait surtout des conséquences extrêmement néfastes. J’ai donc accepté de devenir membre de la Commission. J’ai alors fait une déclaration qui a eu un certain retentissement dans mon pays puisque j’ai dit que la loi adoptée pendant mon mandat, qui poursuit les usagers de drogues et le fait de détenir une petite quantité, avait été tout simplement une erreur. Et j’ai ajouté que même les présidents peuvent se tromper et que, dans ces cas-là, il vaut mieux qu’ils le reconnaissent…
Pourquoi était-ce, d’après vous, une erreur ?
A.K. J’ai regardé les chiffres : depuis l’adoption de la loi, 400000 personnes ont été condamnées en Pologne, soit plus de 30000 par an. Ce sont en grande majorité des jeunes qui, avec ces condamnations, partent très mal dans la vie. Certes, la majorité d’entre eux ne vont pas en prison, même si cela arrive pour un petit nombre, mais ils ont désormais un casier judiciaire… C’est dramatique à cet âge et nous avons ruiné un grand nombre de vies. Mais surtout, nous ne sommes absolument pas parvenus à réaliser les objectifs que nous croyions pouvoir atteindre avec cette loi : les consommations, en particulier chez les jeunes, n’ont cessé d’augmenter en Pologne et les drogues n’ont jamais été aussi faciles à se procurer. Je crois d’ailleurs que vous connaissez la même situation en France, avec une loi du même type !