La PrEP, toujours KO du Covid-19

Les nouvelles données publiées à l’occasion de la Journée mondiale de lutte contre le sida 2021 par le groupement EPI-PHARE confirment que la baisse du recours à la PrEP constatée lors de la crise sanitaire n’a pas été compensée par les nouvelles initiations.

La mise à jour des données d’utilisation de la prophylaxie pré-exposition (PrEP) au VIHVIH Virus de l’immunodéficience humaine. En anglais : HIV (Human Immunodeficiency Virus). Isolé en 1983 à l’institut pasteur de paris; découverte récemment (2008) récompensée par le prix Nobel de médecine décerné à Luc montagnier et à Françoise Barré-Sinoussi. par le Truvada® ou ses génériques, extraites des données du SNDS par EPI-PHARE, était attendue. Elle nous permet de savoir si la baisse drastique des nouvelles initiations de PrEPPrEP Prophylaxie Pré-Exposition. La PrEP est une stratégie qui permet à une personne séronégative exposée au VIH d'éliminer le risque d'infection, en prenant, de manière continue ou «à la demande», un traitement anti-rétroviral à base de Truvada®. observée en 2020 a été compensée au sortir des premières années de crise sanitaire mondiale et des confinements.

Le groupement scientifique EPI-PHARE a été créé fin 2018 par l’agence nationale de la sécurité des médicaments et des produits de santé (ANSM) et la caisse nationale d’assurance maladie (Cnam). Il réalise, pilote et coordonne des études de pharmaco-épidémiologie à partir des données du Système National des Données de Santé (SNDS).

Malheureusement, ces chiffres révèlent un infléchissement marqué et durable dans la dynamique de diffusion de la PrEP en France, malgré la reprise qui semblait se dessiner au début de l’été 2021. La France comptait ainsi 26812 utilisateurs de PrEP au 30 juin 2021, et un total de 42159 personnes ont initié une PrEP (sans forcément la continuer), entre le 1er janvier 2016 (date d’autorisation de la PrEP en France) et le 30 juin 2021.

Comme le formulent très bien les auteurs du rapport d’étude: «Ces chiffres actualisés mettent en évidence un infléchissement marqué et durable dans la dynamique de diffusion de la PrEP en France depuis le début de l’épidémie de COVID-19Covid-19 Une maladie à coronavirus, parfois désignée covid (d'après l'acronyme anglais de coronavirus disease) est une maladie causée par un coronavirus (CoV). L'expression peut faire référence aux maladies suivantes : le syndrome respiratoire aigu sévère (SRAS) causé par le virus SARS-CoV, le syndrome respiratoire du Moyen-Orient (MERS) causé par le virus MERS-CoV, la maladie à coronavirus 2019 (Covid-19) causée par le virus SARS-CoV-2. »

Nombre total d’utilisateurs d’une PrEP par Truvada® ou génériques (en initiation ou en renouvellement) en France
entre le 1er Janvier 2016 et le 30 Juin 2021, par semestre.

Comment a évolué le nombre d’utilisateurs de la PrEP en France ?

En 2020, le nombre total d’utilisateurs de la PrEP (en initiation ou en renouvellement de traitement)  est passé de 19714 au premier semestre à 23359 au second semestre, soit une augmentation de +18%. A la fin du premier semestre 2021, l’augmentation n’était plus que de 15%, avec 26812 personnes sous PrEP, au total. Si on regarde l’année d’avant la crise sanitaire mondiale, soit 2019, la progression du nombre d’utilisateurs était d’environ +25% entre le premier et le second semestre. Avec l’arrivée du CovidCovid-19 Une maladie à coronavirus, parfois désignée covid (d'après l'acronyme anglais de coronavirus disease) est une maladie causée par un coronavirus (CoV). L'expression peut faire référence aux maladies suivantes : le syndrome respiratoire aigu sévère (SRAS) causé par le virus SARS-CoV, le syndrome respiratoire du Moyen-Orient (MERS) causé par le virus MERS-CoV, la maladie à coronavirus 2019 (Covid-19) causée par le virus SARS-CoV-2. l’augmentation du nombre de prépeurs n’était plus que de 7% au premier semestre 2020. 

Nombre de personnes ayant initié un traitement par Truvada® ou génériques pour une PrEP
entre le 1er janvier 2016 et le 30 juin 2021, par mois

Entre le 1er janvier 2016 et le 30 juin 2021, 42159 personnes ont initié une PrEP, dont 12 408 (29%) au cours de la dernière année de suivi, entre le 1er juillet 2020 et le 30 juin 2021. Durant la première période de confinement de la population française, du 17 mars au 10 mai 2020, le nombre mensuel d’initiations de PrEP s’était effondré pour atteindre 618 en mars 2020 (soit une chute de -37% par rapport à la moyenne des mois de janvier et février 2020), 247 en avril (-75%) et 474 en mai (-52%). En comparaison, ce nombre était en constante augmentation entre le premier semestre 2016 et le second semestre 2019, au cours duquel 919 personnes par mois en moyenne avaient commencé la PrEP.  

Après le déconfinement, les initiations ont repris en juin 2020, avec 914 initiations, puis se sont stabilisées au cours du second semestre 2020 à un niveau proche de celui observé avant le début de l’épidémie, avec 966 initiations par mois en moyenne. En 2021, le nombre d’initiations a augmenté au premier semestre, avec 1054 initiations par mois en moyenne entre février et mai 2021, puis 1466 initiations en juin 2021. Mais ces augmentations récentes ne permettent pas de retrouver les niveaux de déploiement de la PrEP observés avant la dernière pandémie mondiale. 

Qui prend la PrEP ?

L’écrasante majorité des personnes ayant commencé la PrEP sont des hommes, principalement des hommes ayant des rapports sexuels avec d’autres hommes (HSH), de 36 ans en moyenne, résidant en Ile-de-France ou dans une grande métropole. La proportion de bénéficiaires de la CMU complémentaire (indicateur de situation socio-économique défavorable) ou de l’AME, indicateurs de précarité, est faible parmi eux. L’usage de la PrEP ne s’est donc pas étendu au cours de la dernière année aux autres populations exposées face au VIH qui devraient pouvoir en bénéficier, comme les personnes résidant dans les DOM, les personnes s’injectant des drogues, les travailleurs et travailleuses du sexe, entre autres. 

Caractéristiques sociodémographiques des personnes ayant initié un traitement par Truvada® ou génériques pour une PrEP entre le 1er janvier 2016 et le 30 juin 2021, globalement et par période.

Sur l’ensemble des personnes ayant initié une PrEP entre janvier 2016 et fin juin 2021, 18721 (44%) résidaient en Ile-de-France (26% à Paris, 12%, en petite couronne et 6% en grande couronne. Dix pourcents résidaient en Auvergne-Rhône-Alpes, 9% en Provence-Alpes-Côte d’Azur (PACA) et 8% en Occitanie. 

Nombre (%) de personnes ayant initié un traitement par Truvada® ou génériques pour une PrEP
entre le 1er janvier 2016 et le 30 juin 2021 selon la région de résidence, globalement et par période.

Notons qu’on remarque toutefois, qu’au cours de la période la plus récente, les initiations de PrEP ont concerné un peu plus souvent qu’auparavant des jeunes âgés de moins de 35 ans, des personnes résidant en dehors de l’Ile-de-France ou des grandes métropoles, et des bénéficiaires de la CMU complémentaire. Ainsi par exemple, la part des moins de 25 ans est estimée à 21% au premier semestre 2021, alors qu’elle était de 11% en 2016-2017.

Augmenter les initiations grâce à la PrEP en ville

Tout n’est pas sombre. L’augmentation de ces chiffres d’initiations confirme la demande et l’intérêt de la PrEP dans le cadre d’une stratégie de prévention. Il faut désormais développer son accès, et ça devrait être le cas dans les mois qui viennent : depuis juin 2021, tous les médecins peuvent désormais prescrire et initier la PrEP.  Pour répondre au besoin de formation des médecins généralistes, la Société française de lutte contre le sidaSida Syndrome d’immunodéficience acquise. En anglais, AIDS, acquired immuno-deficiency syndrome. (SFLS) et ses partenaires ont d’ailleurs développé une plateforme gratuite ouverte à distance : formaprep.org.

La poursuite de l’étude des données du SNDS nous permettra de savoir quel est l’impact de l’autorisation de l’initiation de la PrEP en médecine de ville. Il faut espérer qu’une plus grande accessibilité permettent à toutes les populations exposées face au VIH en France d’en bénéficier, enfin.