Seuls les malades étrangers venant d’un pays où le traitement est indisponible pourront désormais demander à être pris en charge par le système français —Une précédente version de l’amendement utilisait le mot «existant» au lien de «disponible». Une telle décision revient de manière pratique à priver ces personnes de traitement. Car si les traitements sont en théorie accessibles presque partout, l’accès aux soins est bien loin d’être universel.
Le Conseil national du sida (CNS) tire la sonnette d’alarme et «souligne le caractère extrêmement préjudiciable de l’évolution législative envisagée sur la prise en charge des personnes infectées par le VIH/sida ainsi que sur la lutte contre les maladies infectieuses». Concernant la disponibilité des traitements, le CNSCNS Le Conseil national du sida et des hépatites virales (CNS) est une commission consultative indépendante composée de 26 membres, qui émet des Avis et des recommandations sur les questions posées à la société par ces épidémies. Il est consulté sur les programmes et plans de santé établis par les pouvoirs publics. Ses travaux sont adressés aux pouvoirs publics et à l’ensemble des acteurs concernés. Le Conseil participe à la réflexion sur les politiques publiques et œuvre au respect des principes éthiques fondamentaux et des droits des personnes. ajoute : «De tels traitements, en particulier des traitements antirétroviraux, sont formellement disponibles dans tous les pays du monde. Ceux-ci ne sont pas pour autant effectivement accessibles.»
Enfin, s’il était besoin d’une raison supplémentaire pour dénoncer l’adoption de cet amendement, le Conseil précise que «la présence en France d’étrangers malades non traités ou mal traités constitue, en outre, un risque supplémentaire de dissémination de maladies infectieuses dans la population générale et représente, au final, un surcoût pour la collectivité».
La migration pour raison médicale, une exception
Des justifications financières pourtant au coeur de l’argumentaire du gouvernement. Ce dernier craint le coût trop important qu’exercerait la prise en charge de ces populations et la création d’un «appel d’air» en direction des pays sans couverture de santé.
L’Observatoire du droit à la santé des étrangers (ODSE) estime pourtant que la migration pour raison médicale reste une exception : plus de 90% des personnes concernées ayant découvert leur maladie à l’occasion d’un examen médical pratiqué en France alors qu’ils y résidaient déjà (InVS, InsermInserm Institut national de la recherche médicale. enquête Vespa, Rapports Comede, Observatoire européen de l’accès aux soins de Médecins du Monde).
La Cimade rappelle de son côté que «refuser l’accès aux soins et le droit au séjour renforce la clandestinité, le non recours aux soins, le retard dans la prise en charge médicale». Et qu’appliquer cette loi à la lettre revient «à renvoyer les malades mourir dans leur pays d’origine».
Aujourd’hui, dans les colonnes de Libération, Rosine Bachelot annonce qu’elle souhaite dépister la population française. Doit-on comprendre que cette mesure ne concernera pas les étrangers résidants en France ? Et que si ces personnes sont dépistées, elles n’auront pas accès à un traitement ARV ? On peut le craindre.
Aides et Coalition PLUS, en tout cas, accusent : «Pendant que Roselyne Bachelot annonce les bonnes feuilles du futur plan national, les députés de la majorité renvoient les malades mourir dans leur pays.» Sidaction considère que «la politique de lutte contre le sidaSida Syndrome d’immunodéficience acquise. En anglais, AIDS, acquired immuno-deficiency syndrome. en France, c’est la grande illusion».
En savoir plus
> ADDE, Acat France, Anafé, CFDA, Cimade, Fasti, Gisti, InfoMIE, Migreurop, MOM, Association Primo Levi, SAF et le Syndicat de la magistrature proposent une analyse collective de la loi Besson (PDF, 873Ko), disponible sur le site de la Cimade.
> Pour qu’elle ne passe pas, un site de la Cimade pour suivre les débats autour de l’adoption de la loi.