L’Institut de veille sanitaire (InVS) présente dans le Bulletin épidémiologique hebdomadaire (BEH) du lundi 1er décembre les chiffres de l’infection VIH et du sida en France au 31 décembre 2007 (www.invs.sante.fr/beh). Environ 5 millions de tests VIH ont été réalisés en 2007 (dont 8 % dans des CDAG). Après avoir atteint un sommet en 2005 avec 5,29 millions de sérologies, leur nombre a diminué en 2006 puis s’est stabilisé en 2007, correspondant à 79 sérologies pour 1 000 habitants.
Moins de contaminations
Le nombre de personnes ayant découvert leur séropositivité en 2007 est estimé à environ 6 500, en diminution depuis 2004, année au cours de laquelle il avait été estimé à 7 500.
Les auteurs estiment que cette diminution « est liée principalement à celle observée chez les personnes de nationalité étrangère essentiellement originaires d’Afrique subsaharienne, contaminées par rapports hétérosexuels. A contrario, le nombre de découvertes de séropositivité VIHVIH Virus de l’immunodéficience humaine. En anglais : HIV (Human Immunodeficiency Virus). Isolé en 1983 à l’institut pasteur de paris; découverte récemment (2008) récompensée par le prix Nobel de médecine décerné à Luc montagnier et à Françoise Barré-Sinoussi. a augmenté entre 2003 et 2006 chez les hommes contaminés par rapports homosexuels ».
Plus d’hommes, moins d’étrangers
La proportion d’hommes a augmenté parmi les découvertes de séropositivité, passant de 58 % en 2003 à 65 % en 2007. Cette masculinisation est principalement liée à l’augmentation constante de la proportion d’hommes contaminés par rapports homosexuels, elle-même passée de 26 % en 2003 à 38 % en 2007.
Les personnes de nationalité étrangère représentent 40 % parmi les découvertes de séropositivité (une proportion qui atteignait 53 % en 2003), et 71 % des personnes étrangères sont de nationalité d’un pays d’Afrique subsaharienne.
L’âge moyen au diagnostic augmente chez les hommes (de 40 à 42 ans) comme chez les femmes (de 33,5 à 35,8 ans).
Figure : Le nombre estimé de découvertes de séropositivité a progressivement augmenté chez les hommes contaminés par rapports homosexuels entre 2003 et 2006, pour se stabiliser en 2007 autour de 2 500 cas. Ce nombre a diminué pour les hommes et les femmes de nationalité étrangère contaminées par voie hétérosexuelle, alors qu’il est stable pour les hommes et les femmes de nationalité française. Chez les UDI, le nombre de nouveaux diagnostics est en légère diminution sur l’ensemble de la période.
38% de contaminations homosexuelles
Parmi les personnes dont le mode de contamination est connu, 60 % ont été contaminées par rapports hétérosexuels (98 % chez les femmes et 39 % chez les hommes), 38 % par rapports homosexuels et 2 % par usage de drogues injectables. La moitié des contaminations hétérosexuelles concernent des personnes de nationalité d’un pays d’Afrique subsaharienne. Néanmoins, le nombre de découvertes de séropositivité chez des personnes de nationalité étrangère poursuit sa diminution depuis 2003 chez les femmes et depuis 2005 chez les hommes.
En revanche, le nombre de découvertes de séropositivité a augmenté chez les homosexuels entre 2003 et 2006, puis semble se stabiliser en 2007 (stabilisation qui doit cependant « être interprétée avec prudence »). Plusieurs observations paraissent confirmer la poursuite de comportements à risques chez les homosexuels : d’une part l’augmentation du nombre de découvertes au stade de primo-infectionPrimo-infection Premier contact d’un agent infectieux avec un organisme vivant. La primo-infection est un moment clé du diagnostic et de la prévention car les charges virales VIH observées durant cette période sont extrêmement élevées. C’est une période où la personne infectée par le VIH est très contaminante. Historiquement il a été démontré que ce qui a contribué, dans les années 80, à l’épidémie VIH dans certaines grandes villes américaines comme San Francisco, c’est non seulement les pratiques à risques mais aussi le fait que de nombreuses personnes se trouvaient au même moment au stade de primo-infection. qui traduit un recours au dépistage plus précoce qu’auparavant ; d’autre part le fait que l’âge moyen au diagnostic de l’infection VIH n’augmente pas chez les homosexuels (alors qu’il augmente chez les hétérosexuels), signe d’un renouvellement plus important des séropositifs dans cette population ; et enfin l’augmentation des infections sexuellement transmissibles.
17% de diagnostics au stade sida…
12 % des personnes dont le stade clinique était connu ont été diagnostiquées dès le stade de la primo-infection, 58 % à un stade asymptomatique, 13 % à un stade symptomatique non sidaSida Syndrome d’immunodéficience acquise. En anglais, AIDS, acquired immuno-deficiency syndrome. Il reste donc 17 % de personnes qui n’ont été diagnostiquées que très tardivement, au stade sida. Cette proportion diminue cependant progressivement, puisqu’elle atteignait 24 % en 2003.
…et 1200 nouveaux cas de sida
A partir des 596 notifications reçues, les auteurs estiment à environ 1 200 le nombre de diagnostics de sida en 2007, et le nombre total de personnes ayant développé un sida et vivantes au 31 décembre 2007 à environ 30 000. Parmi les cas de sida diagnostiqués en 2007 chez des personnes dont le mode de contamination est connu, 61 % ont été contaminées par rapports hétérosexuels, 26 % par rapports homosexuels et 11 % par usage de drogues injectables.
Environ une personne sur cinq (21 %) avait bénéficié d’un traitement antirétroviral pré-sida. Ce pourcentage, plus important chez les UDI (Usagers de drogues par voie intraveineuse) (47 %) que chez les homosexuels (23 %) ou les hétérosexuels (17 %), peut laisser supposer une situation d’échec thérapeutique.
La pathologie inaugurale du sida est le plus souvent une pneumocystose (25%), une tuberculose (20%), une toxoplasmose cérébrale (14%), une candidose oesophagienne (13 %) ou un sarcome de Kaposi (7%).
Comment interpréter la diminution des contaminations ?
L’InVS évoque plusieurs hypothèses pour expliquer la diminution des nouvelles contaminations évoquée plus haut : elle pourrait être le reflet de la diminution des flux migratoires vers la France, ou celui d’une diminution du recours au dépistage. Elle pourrait aussi correspondre à une diminution de la prévalence du VIH dans les pays d’origine ou de l’incidence dans les populations étrangères vivant en France.
Autre hypothèse enfin : les politiques actuelles en matière de lutte contre l’immigration auraient un impact sur le recours au dépistage et sur l’accès au traitement de ces populations. L’InVS constate en effet que « la diminution globale du nombre de tests entre 2005 et 2006 a peut-être plus concerné les populations africaines ».