L’OEDT a rassemblé les résultats d’études concernant les quelque 90 salles qui existent dans le monde et présenté les résultats dans une étude dévoilée le jeudi 4 juin à Lisbonne, en marge de son rapport annuel.
L’observatoire européen souligne une amélioration «en terme d’hygiène et de sécurité», notamment chez les clients réguliers de ces salles, un accès accru de ces populations aux structures de soin, et «une baisse de la consommation de drogue dans la rue et des nuisances qui y sont associées». L’OEDT explique qu’«il n’y a pas de preuve que l’accès à ces salles de consommation de drogue augmente l’usage de drogue ou la fréquence des injections de drogue» et que ces salles «facilitent plutôt qu’elles ne retardent l’entrée dans des traitements».
La première de ces salles a ouvert en juin 1986 à Berne, en Suisse. D’autres ont suivi en Allemagne, aux Pays-Bas, en Espagne, en Norvège, au Luxembourg, au Danemark et en Grèce, ainsi qu’en Australie et au Canada.
Ces résultats devraient apporter des arguments aux associations et professionnels de santé qui plaident pour l’ouverture de la première salle de consommation à moindre de risque française. En France, l’Assemblée nationale a adopté en avril l’expérimentation des SCMR, pendant six ans maximum. Le texte doit être examiné à l’automne au Sénat.
La première salle à Paris adossée à Lariboisière
Le 25 mai dernier, la mairie de Paris a annoncé que la première salle de consommation à moindre risque parisienne ne sera pas implantée au 39, boulevard de La Chapelle, dans le Xe arrondissement de Paris mais quelques centaines de mètres plus loin, adossée à l’hôpital Lariboisière.
Dans une entrée de son blog, Jean-Yves Nau, journaliste et docteur en médecine, se montre très déçu que cette première salle de consommation soit adossée à l’hôpital Lariboisière:
«En clair, et au-delà de la finesse dialectique cette salle de shoot n’en sera pas une. Lors de l’enquête que nous avons menée pour Slate.fr («Les coulisses politiques des salles de shoot»), les partisans de cette avancée thérapeutique de santé publique que nous avons rencontrés étaient unanimes pour dire que ces espaces n’avaient de sens que hors de l’hôpital. Leur justification, leur raison d’être est de proposer un premier accompagnement hors des murs de l’institution, une main tendue là où l’hôpital n’est par définition pas. De ce point de vue il n’y a pas deux cents mètres entre les rails du 39 bd de La Chapelle et le pignon classé de Lariboisière. Il y a très exactement la distance, considérable, entre l’espoir et le renoncement.»
Dans une réponse par email au texte de Jean-Yves Nau, Didier Jayle, titulaire de la chaire d’addictologie au CNAM1Didier Jayle est également directeur de Vih.org), estime au contraire que ce choix pour l’ouverture de la première salle peut s’avérer une bonne décision:
«Nova Dona était en même temps une « boutique » (futur Caarud) qui distribuait du matériel d’injection. Implanté dans un quartier du 14ème arrondissement avec une très forte densité d’usagers d’héroïne, la localisation dans l’enceinte de l’hôpital n’a jamais été un frein à son accessibilité et a participé à rassurer tout le monde, usagers, riverains et décideurs. Je ne crois pas que cette proximité nous ait jamais gênés, au contraire, puisque l’accès aux soins vih et vhc était tout proche et facilitait la prise en charge somatique quand elle était nécessaire.
Maintenant que le feu est au vert du côté législatif mais que le principe d’une seule et unique salle pour Paris demeure, autant qu’elle soit dans les murs de l’hôpital (avec une entrée distincte comme vous le précisez), cela protègera le projet et permettra aux équipes de travailler avec plus de sérénité. Si les évaluations sont bonnes, ce qui est probable, rien n’empêchera d’en ouvrir d’autres, très vite, y compris à l’extérieur de l’hôpital.»