Variole du singe : ce que nous savons

La variole du singe est une maladie plutôt très rare et peu connue. Dans la plupart des cas de guérison spontanée en 2 à 3 semaines, parfois plus au regard de la contagiosité, et avec une faible mortalité estimée, a fortiori avec la souche d’Afrique de l’Ouest circulant actuellement en Europe.

Face à cette flambée, l’incertitude demeure sur plusieurs points, et il est donc impératif de rester informé, en attendant de savoir quelle sera l’ampleur de l’épidémie à laquelle nous faisons face.

Qu’est-ce que la variole du singe ?

La variole du singe (Orthopoxvirus simien ou monkeypox (MPX) en anglais) est une maladie virale zoonotique causée par un virus, proche de celui de la variole. Il a été identifié d’abord chez le singe, en 1958, sur des macaques crabiers en captivité. Ces singes, en provenance de Singapour étaient destinés au Statens Serum Institut de Copenhague. Mais son réservoir naturel se trouve probablement chez les rongeurs. Le premier cas humain identifié date de 1970, et depuis, plusieurs cas ont été signalés dans sa zone d’endémie, soit plusieurs pays africain de l’Ouest et du Centre.

La première épidémie en dehors de l’Afrique remonte à 2003 et a eu lieu aux États-Unis. Plus récemment, deux voyageurs en provenance du Royaume-Uni, un en Israël et un à Singapour, tous deux ayant des antécédents de voyage au Nigeria, ont été diagnostiqués, en 2018 et 2019.

Quelle est l’origine de l’épidémie actuelle ?

Contrairement aux cas européens précédents, la plupart des cas actuels n’ont pas d’antécédents récents de voyage dans des régions d’Afrique occidentale et centrale. Certains personnes concernées, en particulier les hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes (HSH), ont assisté aux mêmes événements dans différents pays de l’Union européenne, où ils ont eu des contacts étroits ou sexuels. On a par exemple décrit un cluster de cas de MonkeyPox dans l’immense gay pride du Yumbo de Maspalomas aux Canaries (5 au 15 mai 2022) avec un groupe de 100 cas pour une fréquentation évaluée à 80 000 personnes. Un sauna gay a aussi été fermé à Madrid pour des raisons identiques. Des enquêtes et un séquençage supplémentaires sont nécessaires pour comprendre les circonstances exactes dans lesquelles les personnes ont été infectées.

Distribution géographique des cas confirmés de variole du singe en Europe, au 31 mai 2022. Source: ECDC.

Combien de personnes sont-elles touchées ?

Le nombre de personnes diagnostiquées est mis-à-jour régulièrement par les organismes publiques de santé.

Au 26 juillet 2022, 1 837 cas confirmés ont été recensés en France. Les cas résidaient le plus fréquemment en Ile-de-France (781 cas soit 55 % des cas dont la région de résidence est connue), en Occitanie (151 cas, soit 11 %) et en Auvergne-Rhône-Alpes (150 cas, soit 10 %).

Tous les cas recensés à ce jour sont des adultes de sexe masculin, sauf 12 adultes de sexe féminin et 2 enfants. Les cas adultes ont un âge médian de 36 ans; 25% des cas adultes ont moins de 30 ans et 25% ont de 43 à 84 ans. À ce jour, en France, 96% des cas pour lesquels l’orientation sexuelle est connue sont advenus chez des hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes (HSH).

La plupart des cas investigués déclarent ne pas pouvoir identifier la personne qui les aurait contaminés ; 255 sont des cas secondaires, c’est-à-dire ayant été en contact avec un cas de variole du singe dans les trois semaines précédant la survenue des symptômes (au 26/07/22).

Au niveau mondial, plus de 18000 cas ont été confirmés en date du 26 juillet 2022.

En ce qui concerne la zone d’endémie africaine, plus de 1500 cas avaient été signalés début juin au Cameroun, en République centrafricaine (RCA), en République démocratique du Congo (RDC), au Libéria, au Nigéria, en République du Congo et en Sierra Leone en 2022. Ce nombre de cas signalés est légèrement inférieur à la moitié des cas enregistrés en 2021 (3200 cas.) Cinquante neuf cas ont été confirmés, et environ 70 personnes seraient décédées.

Pendant des décennies, seuls quelques cas ont été signalés de manière sporadique en Afrique, avant un pic soudain en 2017, avec plus de 2.800 cas signalés dans cinq pays. Cette flambée s’est poursuivie, atteignant un pic en 2020 avec plus de 6.300 cas, dont la majorité en RDC. La portée géographique du virus au sein des pays où des foyers sont apparus s’est élargie ces dernières années.

Comment se transmet cette maladie ?

Cette maladie n’est pas une infection sexuellement transmissible à proprement parler, mais elle est susceptible de se propager par des contacts étroits, et donc particulièrement lors d’activités sexuelles, avec du matériel infectieux provenant de lésions cutanées d’une personne infectée, par des gouttelettes respiratoires lors d’un contact face à face prolongé et par des surfaces infectées. Le risque de transmission peut donc être considéré comme élevé chez les personnes ayant plusieurs partenaires sexuels, et donc y compris certains HSHHSH Homme ayant des rapports sexuels avec d'autres hommes.  qui sont donc exposés face à cette infection.

Les personnes infectées sont contagieuses dès l’apparition des premiers symptômes, et jusqu’à la cicatrisation complète des lésions cutanées, le plus souvent en 3 semaines. Il n’a pas de transmission à partir d’une zone saine.

La variole du singe ne se propage pas facilement en société. La probabilité de propagation à l’ensemble de la population est faible et la plupart des cas actuels présentent des symptômes bénins.

Les personnes qui ont des contacts étroits avec une personne infectée sont les plus exposés au risque d’infection :

  • Les partenaires sexuels;
  • Les membres du même foyer;
  • Les professionnels de santé prenant en charge sans protection (masque FFP2, gants
    latex) ces personnes.

Doit-on avoir peur du monkeypox ?

La maladie est généralement bénigne, comme dans la plupart des cas signalés en Europe à ce jour. Lors de la petite épidémie de 2003 aux USA et dans les données actuelles européennes il n’a pas été rapporté de décès. La majorité des données disponibles dans la littérature sont issues de contextes différents de l’épidémie actuelle (Nigéria, RDC). Au Nigéria, avec une souche différente, on a observé que l’infection avait un taux de létalité de 1 à 3,3%. La mortalité est plus élevée chez les enfants et les jeunes adultes, et les personnes immunodéprimées sont particulièrement exposées aux formes graves de la maladie. L’immense majorité des personnes atteintes se rétablissent en quelques semaines. La probabilité de transmission entre individus sans contact rapproché est considérée comme très faible. C’est par le contact avec ses lésions et par les gouttelettes que se transmet le virus. Contrairement au Sars-cov-2, responsable du covid-19Covid-19 Une maladie à coronavirus, parfois désignée covid (d'après l'acronyme anglais de coronavirus disease) est une maladie causée par un coronavirus (CoV). L'expression peut faire référence aux maladies suivantes : le syndrome respiratoire aigu sévère (SRAS) causé par le virus SARS-CoV, le syndrome respiratoire du Moyen-Orient (MERS) causé par le virus MERS-CoV, la maladie à coronavirus 2019 (Covid-19) causée par le virus SARS-CoV-2. il n’y pas de transmission par aérosol.

Quels sont les symptômes du monkeypox ?

Exemple de pustules et lésions causées par le virus de la Variole du singe. Il y a des petits boutons à petite et d'autres ressemblant à des ulcérations avec des croutes, souvent entourés de rougeurs.
Éruptions cutanées causées par le virus de la variole du singe. Source : UKHSA.

La variole du singe commence souvent par une combinaison des symptômes suivants: fièvre, maux de tête, frissons, épuisement, asthénie, gonflement des ganglions lymphatiques, douleurs dorsales et douleurs musculaires. La présentation clinique récente a également rapportée des angines, des boutons ou des lésions uniques, des rectites, des saignements et des douleurs anales ou rectales, ou des atteintes oculaires.

Les symptômes les plus courant sont une éruption cutanée, qui se développe généralement un à trois jours après le début de la fièvre, sur le visage et/ou d’autres parties du corps, y compris les mains, les pieds, le cuir chevelu et les régions génitales. Les lésions cutanées se présentent souvent d’abord sous forme de tâches, évoluant vers des papules, des vésicules, des pustules et des croûtes.

Dans la récente flambée épidémique, une présence plus importante des lésions touchant les muqueuses génitales a été signalée chez les patients HSH. Dans les cas de transmission actuelle, il est probable que les boutons et vésicules symptomatiques apparaissent à l’endroit de la muqueuse qui a été contaminée. 

Est-ce qu’il existe des infections asymptomatiques par le monkeypox ?

Toutes les personnes touchées ne présentent pas l’ensemble des symptômes décrits en cas d’infection par le monkeypox. Chez certains, l’infection peut par exemple s’exprimer uniquement sous forme de rectite anale. Mais dans tous les cas, aucune infection sans fièvre, ni boutons ou vésicules, ni symptômes génito-anaux n’a a priori été identifiée à ce jour par les tests de dépistage effectués. Les études de séroprévalence devrait permettre de mieux répondre à cette question.

Rappelons, à titre de comparaison, que le SARS-COV-2, responsable du covid-19, est lui asymptomatique dans près de 50% des cas, ce qui rend extrêmement difficile le contrôle de sa circulation.

Comment puis-je me protéger et protéger les autres contre la variole du singe ?

Les personnes infectées doivent rester isolées jusqu’à ce que les croûtes tombent et doivent surtout éviter tout contact étroit avec des personnes immunodéprimées, les femmes enceintes et les jeunes enfants et les animaux domestiques. Il est également conseillé de s’abstenir de toute activité sexuelle et de tout rapport physique rapproché jusqu’à la guérison de l’éruption cutanée. Les personnes atteintes doivent rester dans leur propre chambre lorsqu’ils sont à la maison et utiliser des articles ménagers désignés (vêtements, linge de lit, serviettes, ustensiles de cuisine, assiettes, verres), qui ne doivent pas être partagés avec d’autres membres de l’entourage et être lavés séparément.

Les personnes ayant été en contact rapproché avec des cas de monkeypox doivent surveiller elles-mêmes le développement de symptômes pendant 21 jours après le dernier contact à exposition possible.

Les soignants et les proches doivent éviter de toucher les lésions cutanées à mains nues, porter des gants jetables et observer une stricte hygiène.

Quelles sont les personnes à risque de formes graves ?

Certaines personnes seraient susceptibles de développer des formes graves en cas d’infection au virus Monkeypox :

  • Les personnes atteintes d’une infection par le VIHVIH Virus de l’immunodéficience humaine. En anglais : HIV (Human Immunodeficiency Virus). Isolé en 1983 à l’institut pasteur de paris; découverte récemment (2008) récompensée par le prix Nobel de médecine décerné à Luc montagnier et à Françoise Barré-Sinoussi. et immunodéprimées (un nombre de CD4 bas);
  • Les personnes immunodéprimées en général;
  • Les femmes enceintes et les jeunes enfants

Une attention particulière est donc de mise pour ces personnes en cas d’infection ou de contact avec une personne infectée. Les personnes vaccinées contre la variole (c’est à dire nées avant 1977) semblent moins à risque de développer des formes graves, ce vaccin entraînant une protection partielle (estimée à 85%).

Quelles sont les spécificités de cette flambée épidémique ?

Tout ceci est encore au niveau hypothétique, mais il semblerait que pour cette épisode épidémique, le monkeypox ait adopté des formes particulières de contamination, principalement à travers les muqueuses, et non pas par voie respiratoire. Les symptômes semblent plus localisés, l’infection relativement moins grave et plus courte dans la durée.

Cette incubation courte rend d’ailleurs la vaccination post exposition moins efficace lorsqu’elle est proposée à plus de 4 jours.

Si cette hypothèse se confirme, c’est plutôt une bonne nouvelle : lors qu’une infection par les voies respiratoires, on assiste à une dissémination rapide dans l’organisme, plus importante que lors d’une infection de contact. Ces infections semblent à la fois plus visibles, mais moins diffuses puisque la charge viraleCharge virale La charge virale plasmatique est le nombre de particules virales contenues dans un échantillon de sang ou autre contenant (salive, LCR, sperme..). Pour le VIH, la charge virale est utilisée comme marqueur afin de suivre la progression de la maladie et mesurer l’efficacité des traitements. Le niveau de charge virale, mais plus encore le taux de CD4, participent à la décision de traitement par les antirétroviraux. systémique serait moindre.

S’agit-il d’une nouvelle souche ? Doit-on craindre des mutations du monkeypox ?

L’une des hypothèses expliquant la récente flambée épidémique serait que nous serions face à une autre souche du virus. D’autres études sont nécessaires pour confirmer ou infirmer cette hypothèse.

Le virus de la variole du singe est un virus enveloppé à ADN double brin qui appartient au genre OrthopoxvirusOrthopoxvirus Famille de virus à laquelle appartiennent la variole, la vaccine et le monkeypox (mpox). de la famille des Poxviridés. Cette forme de virus est relativement stable, et nous permet de moins craindre l’apparition de variants qui échapperaient à l’efficacité de la vaccination.

Comment traite-t-on la variole du singe ?

Le traitement est principalement symptomatique, c’est-à-dire qu’on soigne les symptômes de l’infection, mais pas directement l’infection. La prise en charge doit aussi prévenir et traiter les infections bactériennes secondaires possibles.

Au Royaume-Uni, des chercheurs ont annoncé avoir mis au point un potentiel traitement antiviral spécifique de la variole, notamment du singe, selon le journal britannique The Independent (25 mai 2022). Selon les premières données, ce traitement, le Tecovirimat, pourrait raccourcir les symptômes et réduire la durée de contagion d’un patient. Une étude publiée dans The Lancet Infectious Diseases a porté sur sept cas traités entre 2018 et 2021 donc sans rapport avec l’épidémie actuelle. Ces derniers ont passé plus de trois semaines en quarantaine puis les médecins leur ont prescrit deux antiviraux contre la variole: le Brincidofovir, qui s’est avéré inefficace et le Tecovirimat, qui a réduit la durée de la maladie et donc l’hospitalisation. Sont aussi testés le Cidofovir, un antiviral qui a fait ses preuves dans l’infection à cytomégalovirus et des immunoglobulines spécifiques.

Existe-t-il un vaccin contre la variole du singe ?

Le vaccin contre la variole peut fournir une protection croisée contre le virus de la variole du singe autour de 85% Le vaccin peut être utilisé avant et après l’exposition au virus, en l’absence de symptômes. En particulier, le vaccin de troisième génération antivariolique administré dans les quatre jours suivant l’exposition à une infection par le virus de variole simienne peut avoir un effet protecteur important. La HAS a d’abord recommandé la mise en œuvre d’une stratégie vaccinale réactive, c’est-à-dire autour d’un cas confirmé : les adultes dont le contact avec une personne infectée est considéré comme à risque, y compris les professionnels de santé exposés sans mesure de protection individuelle. Cette vaccination doit être effectuée uniquement avec le vaccin de troisième génération (Imvanex).

Toute personne née avant 1979 est invitée à consulter son carnet de vaccination pour savoir si elle a bénéficié de cette vaccination. (La vaccination s’est arrêtée au tout début des années 1980 quand l’OMS a annoncé l’éradication de la variole.)

Aujourd’hui en France, la vaccination est proposée aux personnes-cas contact et elle est disponible pour les personnes exposées. Le nombre de doses de vaccin reste extrêmement limité.

Pourquoi éviter tout contact avec des animaux de compagnie?

Le Monkeypox, malgré son nom, n’est pas une maladie du singe exclusivement. Certains mammifères de compagnie, et particulièrement les rongeurs, sont sensibles au virus de la variole du singe. Si ces animaux domestiques transmettent la maladie à des animaux sauvages, la maladie risquerait de devenir endémique en Europe en créant de nouveaux réservoirs. Il est donc primordiale de prévenir tout contact des personnes infectées avec ces animaux.

Le ministère de la Santé et de la Prévention a annoncé l’activation par Santé publique France, dès ce mercredi 13 juillet d’une plateforme téléphonique d’information dédiée afin de répondre aux interrogations du public :

Monkeypox Info service0801 90 80 69
(appel gratuit depuis un poste fixe en France, de 8h à 23h 7j/7)

Elle aura en charge d’accompagner les messages de prévention et les mesures de protection, d’informer sur les symptômes, les traitements et la vaccination, de conseiller et d’orienter vers les dispositifs de prise en charge.

Sources

Mise-à-jour : 12/07/2022