Drogues et développement: l’effet mirage

Depuis la Déclaration de Vienne de juillet 2010, la littérature sur l’échec de la politique internationale de contrôle des drogues et ses effets collatéraux ne cesse de croître. Incarcération de masse, déstabilisation sécuritaire et politique des états, violations des droits humains, et bien sûr propagation incontrôlée des épidémies de sida et d’hépatite virale C dans les pays les plus répressifs. N’en jetez plus! Une ombre subsiste: les conséquences négatives de la guerre aux drogues en matière de développement des pays à revenus faibles et intermédiaires, plus particulièrement de ceux qui sont des zones de production ou de transit. Ou, le conflit entre deux politiques publiques internationales: celle régissant le contrôle des drogues, celle promouvant l’aide au développement – toutes deux ancrées dans le même système multilatéral international sous l’égide des Nations unies.

Cette autre dimension du livre noir de la guerre aux drogues n’est que très rarement documentée. Ainsi, la Global Commission on Drug Policy l’a rapidement abordée dans son dernier rapport publié en septembre 2014, synthétisant les quelques travaux, essentiellement anglo-saxons, qui ont été produits à partir des années 2000. Il s’agit de mieux explorer cette interaction entre guerre aux drogues et obstacles au développement dans cet article, au travers d’un cas concret: l’Afghanistan. Que disent ces travaux et que nous apprend l’histoire récente de l’Afghanistan? De la même façon qu’il existe un «effet ballon» pour expliquer le déplacement des zones de production de cultures illicites de pavot, de coca et de cannabis1, il existe un effet spécifique à cette interaction entre drogues et développement, que nous qualifierons d’«effet mirage»: le mirage créé par le bénéfice du court terme. Cet effet prend un sens particulier dans une logique économique qui pose comme postulat que les agents économiques ont tendance à maximiser leur intérêt à court terme. D’ailleurs, Keynes ne nous rappelait-il pas qu’à long terme nous serons tous morts… Intéressons-nous à la structure des coûts et à la logique de profitabilité d’un marché illégal des drogues en général, de celui de l’opium en Afghanistan en particulier. Le «marché illégal» est ici entendu comme tout ce qui est en dehors du marché légal – c’est-à-dire celui défini par les conventions des Nations unies qui réglementent la production, la fabrication et le commerce des substances placées sous contrôle et à destination de la médecine et de la recherche.

Structure des coûts

Elle est considérablement allégée par l’absence des coûts de régulation et de contrôle justement, et les intrants capitalistiques sont assez faibles, en dehors de la main d’œuvre nécessaire aux opérations de récolte: nous sommes en présence de cultures qui poussent assez facilement sur des sols de différentes natures et sont moins consommatrices d’eau que d’autres cultures (comme le maïs par exemple) ; quant aux opérations de fabrication, elles nécessitent des moyens assez rudimentaires pour peu que les précurseurs soient disponibles. De ce point de vue, des agents de l’office fédéral allemand de police criminelle avaient réalisé un travail intéressant dans le cadre des opérations de coopération anti-narcotique en Afghanistan, qui avait démontré la facilité à produire 4 kg d’héroïne blanche titrant à plus de 70% à partir de 70 kg d’opium brut, dans les conditions «artisanales» du pays, selon un processus qui durait une cinquantaine d’heures au total1Zerell U, Ahrens B, Gerz P. Documentation of a heroin manufacturing process in Afghanistan. Bull Narcotics 2005;LVII:1 et 2..

Logique de profitabilité

Evidemment, le producteur considéré sous l’angle de l’agent économique va «rationnaliser» son choix en fonction des contraintes existantes et des bénéfices attendus – dans un langage économique, il va maximiser son utilité ou sa satisfaction. En matière de production illicite, la contrainte est bien évidemment celle de la sanction. Mais en l’absence d’infrastructures étatiques, le risque est minimal ; en revanche, le bénéfice immédiat est évident, comme le montre l’exemple de l’Afghanistan. En 2003, la première année où ce type de données a été collecté par l’Office des Nations unies contre la drogue et le crime (ONUDC), un paysan afghan qui décidait de cultiver de l’opium gagnait 27 fois plus que son collègue qui faisait pousser du blé2Cette donnée relative à la culture et à la production d’opium en Afghanistan et les suivantes sont toutes issues de la série des enquêtes annuelles de l’ONUDC sur l’opium en Afghanistan («Afghanistan Opium Survey»). Les premières études pays datent de 1994 (UNDCP) ; elles ont connu un saut qualitatif lorsque c’est l’ONUDC qui les a produites à partir de 2003. Mais rappelons que leur fiabilité fait l’objet de nombreuses critiques: estimation des surfaces cultivées par image satellite et sondages terrains; estimation de la production à partir de rendements moyens. Sont ensuite produites des extrapolations qui constituent plus une aide à comprendre les tendances qu’à quantifier scientifiquement le phénomène.. Il est vrai que cette année fut particulièrement exceptionnelle en termes de rendement à l’hectare et de prix de vente de la récolte. Mais sur la durée, et ce malgré les campagnes d’éradication soutenues par la Force internationale sous commandement de l’OTAN3FIAS (ISAF en anglais), à laquelle la France a participé de 2002 jusqu’en 2014 pour une dépense cumulée de 3,5 milliards d’euros inscrite au budget OPEX., l’intérêt économique est toujours en faveur du pavot (avec un rapport de 1 à 4 pour l’année 2013). En 2003, c’était ainsi plus de 260 000 familles de paysans, comptant environ 1,7 million d’Afghans (7% de la population de l’époque) qui vivaient de la culture de l’opium, garantissant un niveau de vie bien supérieur à la moyenne: près de 600 dollars (USD) de revenu annuel par habitant en moyenne pour ces personnes alors que le produit national brut (PNB) par habitant était de 183 dollars. Au-delà des ressources monétaires tirées de la vente de la récolte d’opium, la culture du pavot, forte consommatrice de main d’œuvre, crée de l’emploi saisonnier et génère donc des salaires dans les zones de production. La culture du pavot demande en effet une main d’œuvre intensive, en particulier au moment de la maturité lorsque les capsules sont incisées manuellement pour récolter la pâte d’opium: selon Alain Labrousse, citant une étude des Nations unies datée de 1999, la culture de l’opium exige 350 jours/hommes de travail alors qu’il n’en faut que 135 pour la même surface de cumin et 40 pour le blé4Labrousse A. Afghanistan. Opium de guerre, opium de paix. Paris: Mille et une nuits; 2005.. Main d’œuvre plus nombreuse donc, surtout au moment de la récolte, mais aussi mieux payée: en 2013, le salaire journalier moyen d’une personne affectée à l’incision des capsules de pavot était de 9,8 USD contre 5,9 USD pour la moisson du blé. L’opium s’inscrit donc dans le modèle économique agricole de l’Afghanistan comme une culture de rente, au même titre que le blé, le maïs, le coton, le riz ou les fruits et légumes – mais avec un bien meilleur rende-ment. Autre avantage immédiat de la culture de l’opium en Afghanistan: il donne beaucoup plus facilement accès au crédit. Alain Labrousse a bien décrit ce système de financement du secteur agricole afghan. «à travers le système connu comme salam, les collecteurs d’opium achètent à l’avance (parfois avec deux ans d’anticipation) la récolte. Dans ce cas cette dernière est payée jusqu’à la moitié de sa valeur».

Impact économique à court terme

Démontré à l’échelle d’une communauté paysanne en Afghanistan, il a pu l’être à une échelle macroéconomique, avec l’exemple de la Bolivie documenté dans une étude publiée en 1992: les auteurs avaient établi qu’une augmentation de 10% de la production de cocaïne était associée à une hausse de 2% du PNB et une baisse du chômage de l’ordre de 6%5De Franco M, GodoyR. The economic consequences of cocaine production in Bolivia: historical, local and macroeconomic perspectives. J Latin Amer Studies 1992;24,2:375-406..

L’effet à court terme est donc réel, et peut même être mesuré. Dans une perspective d’économie politique, il faudrait toutefois contrebalancer les effets immédiats avec les coûts (les externalités) tout aussi immédiats en matière de politique anti-drogue. à un instant donné, quel est le solde net pour le pays, entre les richesses générées par la production et le commerce de drogues illicites d’une part, les coûts directs et indirects générés par la présence de ces produits sur le territoire d’autre part (coûts de la lutte anti-drogues pour le volet offre et demandes et coût des dommages associés à la consommation locale)? Mais ce n’est pas tant ce solde qui nous intéresse ici, car il est synchronique et ne saurait préjuger des développements futurs. Dans ce propos, il s’agit de privilégier une perspective diachronique: quel est l’impact, à long terme, de l’activité économique qui a créé ces richesses à court terme?

Conséquences à moyen et long terme

Dans cette perspective, nous sommes un peu dans la situation où l’arbre cache la forêt… Si l’incitation financière à court terme paraît juteuse, qu’en est-il des conséquences à long terme, tant au niveau micro-économique – celui des paysans et de l’économie rurale – qu’au niveau macro-économique – celui de l’économie du pays et des conditions de sa pérennité ainsi que de l’efficacité dans l’allocation des ressources et les arbitrages des acteurs? Sans être exhaustif, il convient de documenter certains de ces impacts de long terme.

En premier, les paysans afghans, premières victimes du mirage en quelque sorte. Une analyse fine de l’évolution de la propriété terrienne depuis l’introduction de la culture massive de l’opium en Afghanistan montre que le secteur n’a pas échappé à une logique de concentration qui a bénéficié aux plus gros propriétaires terriens au détriment des petits propriétaires et des métayers. C’est une dérive vers un modèle latifundiaire latino-américain à laquelle on a assisté depuis le début des années 1990, quand le pays est devenu le premier producteur mondial d’opium, renforçant les inégalités économiques et sociales dans les zones rurales – qui étaient déjà les grandes oubliées de la politique d’aide à la reconstruction du pays. Le facteur clé qui a conduit à cette évolution est celui-là même qui présentait un intérêt à court terme: le système du crédit qui s’est transformé en spirale infernale de l’endettement à la fois structurel et de type crédit à la consommation. Une étape décisive dans ce processus d’étranglement et de concentration eut lieu au tournant du millénaire, lorsque Mollah Omar décida d’interdire la culture de l’opium en Afghanistan le 28 juillet 2000: une des conséquences les moins connues de cet édit fut un appauvrissement monétaire des paysans. En effet, dans le système du salam décrit ci-dessus, la plupart d’entre eux avaient auparavant emprunté pour leur permettre d’acheter les semences et d’avoir des revenus en attendant la récolte et la vente de la production. Dans ce système, il existe parfois un décalage dans le temps jusqu’à deux ans: le paysan reçoit une somme d’argent correspondant à une estimation de la valeur marchande de sa récolte deux années plus tard. La somme ainsi obtenue correspond aux tendances du marché. Or, l’édit de 2000 s’est effectivement traduit par une réduction brutale des surfaces ensemencées en octobre, et donc de la récolte de l’année suivante – 180 tonnes contre 3 280 l’année précédente. Finance islamique ou pas, le prêteur est avant tout un être humain, quelles que soient les latitudes, et est donc la plupart du temps motivé par un des plus vieux ressorts de l’humanité: la maximisation de son profit, dans une perspective économique toute néoclassique. Toujours dans cette perspective, selon la bonne vieille loi de l’offre et de la demande, le cours de l’opium brut à la ferme a bien évidemment considérablement augmenté, celui de l’opium sec plus encore. L’avidité avait donc un terrain tout trouvé pour s’exprimer: pourquoi se faire rembourser sur la base des prix convenus deux ans plus tôt (disons environ 50 dollars le kilo d’opium frais) quand on peut en obtenir 500 dollars? Les prêteurs ont alors massivement converti la dette en nature en dette monétaire. L’effet immédiat fut un appauvrissement considérable de la plupart des paysans, à savoir les petits propriétaires et les métayers. Voici un effet économique bien réel.

Autre conséquence à moyen et long terme qui constitue un obstacle au développement: l’allocation d’une partie conséquente des ressources d’aide au développement à la promotion de cultures alternatives. Cette intervention, particulièrement promue à partir des années 1990 à l’échelle mondiale, constitue un outil privilégié de la réduction de l’offre de drogues illicites, qui est elle-même un des piliers de la lutte mondiale antidrogue – au demeurant sans avoir été véritablement évaluée jusqu’à maintenant6Buxton J. Drug and Development: the geat disconnect. Rapport publié par le Global Drug Policy Observatory, Université de Swansea, Royaume Uni, janvier 2015.. Or, qu’a-ton pu constater sur le terrain afghan? Dès 2005 a été établi, dans le cadre d’une résolution des Nations unies, un fonds fiduciaire dédié à la lutte anti-narcotique en Afghanistan: le Counter Narcotic Trust Fund (CNTF), essentiellement doté par les états-Unis, la GrandeBretagne et l’Union européenne. Sa gestion est confiée au ministère afghan de lutte contre les narcotiques, lui aussi institué en 2005. Sur la période juin 2005 – décembre 2008, le CNTF a été doté de 900 millions de dollars, dont un gros tiers était affecté aux fameuses «alternative livelihoods». Bilan quelques années plus tard: à l’exception de deux ou trois champs de safran présentés comme le saint Graal des programmes de culture alternative, le pays a continué à produire de l’opium illicite. Et les fonds du CNTF ont majoritairement fini dans les poches d’opérateurs étrangers chargés de la mise en œuvre de ces programmes (dont des organisations non gouvernementales [ONG]) et, surtout, des potentats locaux et gros propriétaires terriens qui ont su adroitement canaliser cette manne. En 2007, le pays battait son record de production avec 8 200 tonnes… Les sommes du CNTF ne représentant que 10% de la totalité des montants alloués. Sur le fond, cette approche des cultures alternatives à la production d’opium illicite revient à extraire le secteur agricole d’une logique de développement pour le placer dans une perspective militaire et de sécurité. Outre que nous avons la preuve de son inefficacité, ce système produit des solutions qui ne sont pas économiquement viables dans la pérennité: il faut subventionner la culture du safran, ou de n’importe quel autre produit pour concurrencer les prix du marché de l’opium et les rendre attractifs pour les paysans ; toute chose égale par ailleurs, c’est un peu le syndrome de la politique agricole commune au niveau de l’Union européenne: une politique publique fondée sur le subventionnement de façon à garantir aux agriculteurs un revenu supérieur à celui qu’ils obtiendraient sur le marché, politique qui conduit à un modèle non viable économiquement.

Non seulement cela n’a donc pas dissuadé les paysans afghans de produire de l’opium, au prix du gaspillage de l’aide publique au développement, mais les mesures répressives associées à ces mesures de réduction de l’offre ont en outre contribué à éloigner ces mêmes paysans et leurs familles des autorités nationales afghanes, qui souffraient déjà d’un bien lourd passif en matière d’acceptation par la population7Voir en particulier l’analyse de Vanda Felbab-Brown dans son article «Peacekeepers Among Poppies: Afghanistan, Illicit Economies and Intervention ». In: Intern Peacekeeping, 2009;16,1:100-14..

Un des visages les plus connus des économies illicites: la corruption!

Voilà une autre conséquence structurelle de l’effet mirage. Selon une étude de l’ONUDC, les Afghans avaient dû débourser en 2009 pour près de 2,5 milliards de dollars en pots-de-vin pour des actes de la vie courante, somme qui représentait à l’époque 23% du PNB8UNODC. Corruption in Afghanistan. Bribery as reported by the victims. January 2010.. C’est autant de pouvoir d’achat des ménages afghans qui s’est évaporé. La même année, le «chiffre d’affaire» de la filière opium en Afghanistan était estimé à 2,8 milliards de dollars. Soit une enveloppe totale de 5,3 milliards, à comparer aux 4,4 milliards de dollars qui ont nourri l’économie réelle – même si en partie artificielle – l’année suivante: 2 milliards pour le budget ordinaire du gouvernement afghan et 2,4 milliards d’aide publique au développement.

Autre exemple de corruption, qui fut médiatisé en septembre 2010 car impliquant la famille du président Karzaï et de son vice-président: le scandale de la Kabul Bank, dont les dirigeants avaient tout simplement extrait près de 900 millions de dollars de liquidités sur les comptes courants des dépositaires. Le lien avec notre sujet? La perte de confiance de la population et des bailleurs internationaux dans les institutions financières en reconstruction de l’Afghanistan, et donc, à terme, la limitation des capacités de financement des investissements dans les différents secteurs économiques afghans. Le Fonds monétaire international (FMI) ne s’y était pas trompé, en retirant sa «signature» à l’Afghanistan, créant alors la panique chez tous les contributeurs de l’aide publique au développement du pays. L’expérience de l’argent facile obtenu par le commerce illicite de drogues en Afghanistan a ainsi généré des pratiques de prévarication à grande échelle qui représentent un des plus sûrs dangers pour le développement futur du pays. Autre lien: qu’il s’agisse des sommes détournées ou bien des richesses monétaires créées par la culture du pavot et par le négoce des produits manufacturés à partir de la pâte d’opium, ce sont autant de montants qui ne sont pas réinvestis dans l’économie légale du pays. Les seuls investissements locaux sont ceux qui permettent de garantir la sécurité nécessaire à la chaîne de l’économie illicite de l’opium: armes, groupes armés insurgés, achat des fonctionnaires. Pour les dépenses de consommation, en Afghanistan comme ailleurs, les trafiquants ont une propension faible à consommer des biens et services ayant une utilité économique et sociale dans leur pays. Ils privilégient l’achat de biens de consommation de luxe, qu’ils soient importés légalement – ce qui ne joue pas en faveur de la balance des paiements et donc de la constitution de stocks de devises– ou le plus souvent illégalement (donc sans impact fiscal sur le pays). Mais surtout, la plus grande partie des sorties monétaires a lieu en dehors du pays. De ce point de vue, Dubaï et la zone du golfe persique sont la première plateforme d’absorption des profits générés par la filière de l’opium en Afghanistan. L’auteur se souvient, à cet égard, des panneaux apposés dans l’aéroport de Kaboul qui rappelaient aux passagers des nombreux vols quotidiens vers Dubaï l’interdiction de transporter plus d’un million de dollars en billets de banques…

Voici donc quelques-uns des éléments de l’effet mirage des drogues à l’échelle d’un pays, au-delà des bénéfices réels à court terme: déstructuration d’un secteur entier de l’économie, à savoir le secteur agricole qui fait vivre 70% de la population ; spirale de l’appauvrissement structurel créé par le système du «crédit de l’opium» et concentration de la propriété terrienne; allocation inefficace de l’aide publique au développement ; dévoiement des institutions bancaires. Si l’on considère que le développement économique et social d’un pays passe par la structuration et le renforcement des infrastructures qui permettent d’améliorer les conditions d’activité des agents économiques, alors force est de considérer que la guerre à la drogue est un échec majeur de ce point de vue pour l’Afghanistan.

Une des recommandations à adresser aux états membres pour la session spéciale de 2016 pourrait être d’intégrer la politique de contrôle des drogues dans l’agenda global du développement et de la réduction de la pauvreté – et non plus l’isoler et l’enfermer dans une stratégie verticale coordonnée par l’ONUDC et mise en œuvre de façon militaire et sécuritaire par les états. Ce pourrait être un axe de plaidoyer novateur par rapport aux demandes plus classiques issues du mouvement promouvant une réforme de la politique internationale de contrôle des drogues. En effet, le Protocole de l’opium de 1953 et le Protocole additionnel de 1972 à la Convention unique de 1961 constituent la base conventionnelle sur laquelle peuvent exister les phénomènes relatifs à la production décrits dans cet article. C’est en tous les cas une orientation pragmatique pour sortir du conflit entre deux politiques publiques internationales et améliorer l’affectation des ressources des pays à haut revenu vers les pays à faible et moyen revenu qui sont des pays de production et de transit – et accessoirement les 4 millions d’hommes, de femmes et d’enfants dans ces pays dont les ressources reposent sur la production illicite.