Afrique — Epidémies généralisées et concentrées : une épidémie peut en cacher une autre

Petit retour succinct sur les définitions utilisées par l’Onusida. Une épidémie est dite généralisée lorsque la prévalence du VIH (soit la proportion de personnes infectées par le VIH) dépasse 1% dans la population générale adulte (entendre le plus souvent 15-49 ans). Si, en revanche, la prévalence du VIH en population générale est inférieure à 1% mais dépasse 5% dans des sous-populations dites «vulnérables» (comme les professionnel(le)s du sexe (PS), les hommes ayant des rapports sexuels entre hommes (HSH) ou les usagers de drogues par voie intraveineuses (UDVI)), Onusida parle alors d’épidémie concentrée. Depuis 2006, le terme d’épidémie hyperendémique ou épidémie massive est également employé pour qualifier les épidémies d’Afrique australe où la prévalence dépasse les 15%. </

Cet article a été publié dans Transcriptases n°149 Spécial Washington 2012réalisé en partenariat avec l’ANRS.

En Afrique subsaharienne, la plupart des pays présentent donc, selon cette définition, une épidémie dite généralisée, à l’exception notamment du Sénégal où la prévalence du VIHVIH Virus de l’immunodéficience humaine. En anglais : HIV (Human Immunodeficiency Virus). Isolé en 1983 à l’institut pasteur de paris; découverte récemment (2008) récompensée par le prix Nobel de médecine décerné à Luc montagnier et à Françoise Barré-Sinoussi. n’est que de 0,7% en population générale. Ceci, couplé au fait que la transmission du VIH a été présentée en Afrique comme étant principalement hétérosexuelle et materno-foetale, a occulté le fait que ces épidémies sont également concentrées au sein de certaines sous-populations.

Depuis longtemps, les études épidémiologiques menées auprès des professionnel(le)s du sexe ont montré que ces dernier(e)s étaient particulièrement touché(e)s par le VIH. Concernant les HSHHSH Homme ayant des rapports sexuels avec d'autres hommes.  il a fallu attendre 2004 pour que soit réalisée la première enquête épidémiologique mesurant la prévalence au sein de cette population en Afrique subsaharienne, montrant au Sénégal une prévalence de 22% parmi les HSH (contre moins de 1% en population générale). La conférence de Toronto en 2006 avait bousculé l’idée que l’épidémie au Sud était uniquement hétérosexuelle, celle de 2008 avait montré que les HSH africains étaient de 2 à 20 fois plus infectés que le reste de la population générale1Voir les précédents comptes rendus de conférence de Transcriptases. Le nouveau rapport mondial d’Onusida, publié à l’été 2012, précise même que 20% des nouvelles infections au Sénégal et 15% au Kenya et au Rwanda ont lieu parmi les hommes ayant des rapports sexuels avec d’autres hommes. Concernant les UDVI, peu de travaux existent sur cette population en Afrique subsaharienne. Pourtant, plusieurs indices suggèrent que cette pratique est en développement sur le continent et, avec elle, que le VIH se propage au sein de ce groupe.

A l’exception des pays d’Afrique australe à épidémie massive, où la prévalence est tellement élevée en population générale qu’il n’y a pas forcément de différence de niveau avec les HSH, les PS ou les UDVI, il est acquis aujourd’hui que, même sur le continent africain, ces trois populations sont particulièrement touchées. Ce fait en lui-même n’est pas nouveau, mais la prise de conscience de cette réalité n’aura jamais été aussi importante que cette année à Washington. Enfin !