Qualitativement, on peut commencer par constater que le fameux CPE, dit « score de Charter » (coefficient de pénétration dans le LCR des antirétroviraux) est en perte de vitesse avec un premier poster présenté par son « géniteur », Scott Letendre (signataire de 18 présentations à cette CROI !) qui, sur une étude longitudinale de 33 mois concernant plus de 2000 patients (#473) arrive à isoler des facteurs indépendants liés à la présence de virus dans le LCR dont le CPE nouvelle version (protecteur si >7) mais aussi et entre autres l’élévation des CD8 en périphérie (donc un marqueur d’activation immune).
La seconde présentation marquante de la thématique est un peu moins favorable au score de Charter puisqu’il faut attendre un score de 9 points minimum pour voir un lien entre le score et les résulatts des épreuves neuro-cognitives de la cohorte canadienne OHTN (#484, N=435 adultes infectés).
A signaler par contre, un travail très original concernant la pénétration des ARV dans le cerveau qui aurait probablement mérité la session orale. C’est celui de l’équipe Hawaïenne qui génère un concept intéressant de score d’efficacité macrophagique (ME) basé sur le tropisme monocyto/macrophagique de chaque molécule ARV (#481). Concept basé sur l’hypothèse de plus en plus répandue que la pénétration du virus à travers la barrière hémato encéphalique des patients indétectables n’ayant plus de virus libres circulants se fait par le macrophage activé, principal « cheval de Troie » pour atteindre l’encéphale. L’étude présentée porte sur la cohorte HAHC et concernent 139 sujets infectés traités indétectables à 90% appariés à des sujets contrôles séronégatifs. Elle évoque une forte corrélation (p<0,01) entre le score du tropisme macrophagique ME des combinaisons ARV et l’effet protecteur vis-à-vis de troubles neuro-cognitifs (TNC). Cette corrélation étant beaucoup plus marquée que celle du CPE (p=0,13).
Activation macrophagique et TNC
Le macrophage est à l’honneur, également, dans cette CROICROI «Conference on Retroviruses and Opportunistic Infections», la Conférence sur les rétrovirus et les infections opportunistes annuelle où sont présentés les dernières et plus importantes décision scientifiques dans le champs de la recherche sur le VIH. vis-à-vis de la génèse des TNC chez les patients VIH+ en 2012. Avec une première étude versant neuro-inflammatoire réalisée par les mêmes collègues Hawaïens (#460) qui montrent un lien très fort entre activation macrophagique (mesuré e ici par le CD14+ CD16+), les cytokines (IL6, TNFα et MCP1) sécrétées et l’existence de TNC. Cette association est renforcée par le fait que les patients ayant des TNC ont une réplication ADN plus forte en PBMC. Toujours sur le macrophage, une étude chez le macaque (#453) vient corroborer les résultats très intéressants présentés chez l’homme à l’oral (#81) présentant le CD163+ comme un marqueur d’activation macrophagique très associé aux TNC.
Concernant l’étude des marqueurs de la neuro-inflammation / neuro-dégénérescence, en dehors du CD163+ très prometteur (et corrélé aussi avec le plasma), on peut noter toujours et encore le « neurofilament » dans le LCR défendus par l’équipe de Richard Price à San Francisco (#469), le CD14+ dans le LCR associé à une perte neuronale mesurée par la baisse en N acétylaspartate corrélée également à l’augmentation de la protéine Tau phosphorylée (#468). Pour mesurer la neuro-inflammation et la neuro-dégénérescence, on peut aussi utiliser des outils de neuro-imagerie comme la spectro-IRM qui mesure les métabolites cérébraux comme le myoinositol ou la choline, marqueurs de l’inflammation cérébrale / activation microgiale et le NAA marqueur de la perte neuronale (#456).
Neuro-pathogénicité centrale
Informations contradictoires concernant la question de la neuro-pathogénicité centrale qui pourrait varier en fonction des sous-types viraux (le sous-type C présentant une protéine tat moins chémo-attractive, pourrait être considéré comme étant moins pourvoyeur de dégâts cérébraux). Cependant, les études présentées là ne confirment pas clairement cette hypothèse (#447, 448, 449). D’autres études contradictoires concernent la question d’un risque théorique accru de compartimentalisation cérébrale sous monothérapie d’antiprotéase. Trois études ont été présentées sur la monothérapie de LPV. Deux donnent des conclusions négatives (#479 et 483) portant sur les TNC mais sont de faible puissance statistique en termes de design ou d’effectif. Une étude évoque un lien entre monothérapie de Lopinavir (LPV) et neuro-inflammation (activation astrocytaire et néoptérine) mais sans évaluer la corrélation avec la recrudescence éventuelle de Troubles Neuro Cognitifs (TNC) (#480).
Enfin, il faut finir par une question émergente que celle du lien entre les troubles métaboliques et vasculaires et les TNC. Le groupe CHARTER a étudié, dans une sous étude de la cohorte HNRC comportant 130 patients volontaires, l’association éventuelle entre les variables métaboliques et les performances neuro-cognitives (#490). Indépendamment des autres facteurs liés aux TNC, le tour de taille était très nettement associé à la dysfonction cérébrale avec une augmentation du risque de 34% à chaque centimètre supplémentaire (p=0,001). Le diabète était également associé (ORa=18) avec une forte tendance statistique (p=0,07). Dans une autre étude, italienne cette fois-ci (#491), il semblait y avoir un lien avec l’épaisseur intima média. Enfin, dans une dernière étude, réalisée également par des italiens, les auteurs ont fortement corrélé les TNC à l’athérosclérose mesurée par la résistivité de l’artère ophtalmique qui, lorsqu’elle est augmentée multiplie par 5 le risque de TNC (#515).