J’écoute Bill Clinton, et je ne peux m’empêcher de penser que lorsqu’il était Président, entre 1992 et 2000, son bilan contre le sidaSida Syndrome d’immunodéficience acquise. En anglais, AIDS, acquired immuno-deficiency syndrome. était loin d’être globalement positif. Il renforça par la loi l’interdiction de l’entrée des États-Unis aux séropositifs, il ne fit rien pour la prévention, notamment en direction des gays et des Blacks, et sur le front international, il fut un ardent défenseur des intérêts de l’industrie pharmaceutique américaine, notamment lorsque les firmes intentèrent un procès (qui fut néanmoins perdu) contre l’Afrique du Sud, qui voulait briser leur monopole sur l’accès aux médicaments.
Modèle américain
Bill Clinton a changé d’avis. Selon l’adage, c’est une marque d’intelligence. Il connaît la situation de l’épidémie. Il peut se targuer, à travers sa fondation, de financer l’accès au traitement pour des centaines de milliers de personnes dans le monde.
Mais Bill Clinton n’est pas devenu un citoyen du monde. Il reste un Américain, et un ambassadeur du modèle américain. Ce matin, après une défense appuyée de la politique de Barack Obama, qui n’avait pas grand chose à voir avec le thème de cette conférence, il a demandé à la salle d’applaudir le responsable de PEPFAR, le gigantesque programme international sur le sida, lancé par George W. Bush, et qui dispose d’un trésor de guerre de 48 milliards de dollars jusqu’en 2014. Clinton a même réussi à souligner la bonne volonté du géant pharmaceutique Pfizer, qui allait diminuer de 60% le prix de ses traitements. Bill Clinton s’est bien gardé de désigner des coupables. Il n’y a autour de lui (comprendre aux États-Unis) que des good guys, des braves gens qui ne demandent qu’à être convaincus.
Brillantissime orateur
J’écoute ce brillantissime orateur, et, à ce stade de la rhétorique clintonienne, je ne peux m’empêcher de penser que sa mission dépasse la simple question du sida. Il sait que du haut de cette tribune, à Vienne, il s’adresse à une foule de délégués entièrement conquise à sa cause et qu’il y fera un tabac. Un bon point pour son ego et pour la couverture médiatique de ses propos. Il sait aussi que, face à la montée en puissance de la Chine et des pays émergents sur le terrain économique, les États-Unis ont une longueur d’avance dans la bataille de l’image. Et la lutte contre le sida, dans sa dimension épique, reste une de leurs meilleures armes de communication.