L’utilisation en est très différente de celle séquencée d’une cigarette de tabac. Et cette distanciation existe aussi entre le vapoteur et le fumeur. Si vous voulez insulter un vapoteur, vous le traiter de fumeur, vous verrez ce qu’il va se passer. Il n’y a pas de fumée, mais de la vapeur, qui est un brouillard de microgouttelettes qui se transforment en quelques secondes en gaz.
L’utilisation en est très différente de celle séquencée d’une cigarette de tabac. Et cette distanciation existe aussi entre le vapoteur et le fumeur. Si vous voulez insulter un vapoteur, vous le traiter de fumeur, vous verrez ce qu’il va se passer. Il n’y a pas de fumée, mais de la vapeur, qui est un brouillard de microgouttelettes qui se transforment en quelques secondes en gaz.
Pour la première fois, on a aussi des organisateurs qui s’organisent.
Ils vont sur des forums. En ce qui concerne le matériel, on a une évolution avec un abandon progressif de ce qui ressemblait à une cigarette conventionnelle et, en même temps, une amélioration des performances de ces appareils qui ne dispensent plus la même quantité de nicotine qu’autrefois.
«Autrefois, c’était il y a deux ans!»
On ne peut plus comparer le vapoteur d’il y a deux ans à celui d’aujourd’hui. Il faut désormais prendre en compte la grande variabilité du matériel dans les études scientifiques. La première cigarette électronique ressemblait à une cigarette, le bout s’allumait en rouge ou en bleu quand on aspirait, l’aspiration déclenchait un microprocesseur qui chauffait la résistance et vaporisait le liquide.
Aujourd’hui, on a d’autres appareils, certains sont imposants, comme ceux fabriqués à Saint-étienne en titane, d’autres ont un petit écran où on peut lire différents éléments, et d’autres présentent différentes subtilités.
Quelle est l’utilisation actuelle?
On s’aperçoit que les vapoteurs utilisent des vapoteurs personnalisés (VP) à forte concentration de nicotine (18mg), ce qui montre que ceux qui l’utilisent ont besoin de nicotine. En ce qui concerne les arômes préférés, chacun peut composer son menu, dans la journée des arômes de tabac, de fruits, de menthol, il y a à peu près 150 arômes identifiés.
Les questions qui se posent sont: quels sont les dangers à court terme, directs et indirects? Quelle est la fonction d’une e-cigarette actuellement chez un fumeur?
Dangers directs
Qu’y a-t-il dans les liquides? Il y a du propylène glycol qui, on le sait, n’est pas toxique. Ce produit est utilisé dans les cosmétiques, en agroalimentaire et en pharmacie puisque le Foradil®, médicament pour les asthmatiques, en contient.
Le glycérol vient compléter l’action du propylène glycol en tant que produit dispersant, ce dernier n’est pas toxique en dessous de 250°C ; or, on ne les atteint pas avec la e-cigarette. En ce qui concerne les arômes alimentaires, il n’y a pas de combustion, donc pas de transformation de ces produits que l’on connaît bien. Il y a éventuellement 2% d’alcool, ce qui peut poser des problèmes chez les anciens buveurs ou chez la femme enceinte, mais on sait que certains e-liquides ne contiennent pas d’alcool du tout. Il y a eu des controverses, comme avec l’article de 60 millions de consommateurs, qui montrait que les produits étaient 9 à 450 fois moins concentrés dans la vapeur des e-cigarettes que dans le tabac conventionnel. On sait qu’il n’y a pas de monoxyde de carbone (CO), pas de goudrons en tant que produit qui conduit à la combustion. Les études réalisées, de plus en plus nombreuses, montrent qu’il n’y a pas de cytotoxicité, ni de toxicité pour le système cardiovasculaire.
Il n’y a pas d’effets adverses connus, en particulier sur le système adverse respiratoire.
Bullen et al.1Bullen C, Howe C, Laugesen M et al. Electronic cigarettes for smoking cessation: a randomised controlled trial. Lancet 2013;382:1629-37. ont montré qu’il n’y avait pas d’effets sur l’arbre respiratoire. Les doses de composés organiques volatils (COV) contenus dans ces produits ne sont pas reconnues dangereuses par la médecine du travail.
Dangers potentiels
Existe-t-il une expérimentation et un usage chez les non- fumeurs? Le danger étant de faire rentrer les non- fumeurs dans le tabagisme. Les études internationales à ce sujet ont montré que l’usage prolongé est extrêmement limité chez les non-fumeurs.
… indirects
Quant au vapotage passif, c’est un point important, il n’y a pas de CO dans une cigarette électronique, le monoxyde de carbone étant le toxique de l’arbre artériel. Quant aux COV, il y en a, mais les doses sont extrêmement faibles.
Et les jeunes
Y a-t-il un risque de les faire rentrer dans le tabagisme ? De nombreuses études ont été effectuées, dont une en Pologne, une autre en Angleterre, et qui montre que très peu de jeunes essayent et ceux qui le font sont les «essayistes», c’est-à-dire les ados qui essayent tout, qui ensuite basculent vers toute autre chose et qui, de toutes façons, auraient essayé le tabac, la chicha, le cannabis, etc. Nous n’avons pas de données sur l’usage régulier des jeunes, ni sur l’addiction à la cigarette par les jeunes, ni sur l’évolution du tabagisme chez les jeunes. On ne peut donc démontrer ni le négatif ni le positif de la cigarette électronique.
Impact sur le tabagisme
Parmi les vapoteurs, 97 % sont des fumeurs, et ils nous disent bien que leur envie de fumer disparaît ou diminue de manière significative, mais peu d’auteurs se sont consacrés à ces travaux.
Quelle est la fonction actuelle ? Tout d’abord la réduction des risques, puisque toutes les études montrent que les fumeurs ont réduit leur quantité de tabac à fumer et aussi leur taux de produits toxiques inhalés. Comme l’ex- pliquait J. Le Houzec, diminuer le nombre de cigarettes fumées dans la journée ne veut pas dire diminuer le nombre de toxiques inhalés, le fumeur va simplement moduler son mode de «fume». Quand on utilise la e-cigarette on ne va pas surtitrer les cigarettes que l’on va fumer après. Donc la cigarette électronique peut participer, et des études le montrent, à la réduction des risques.
Une étude très intéressante de Caponnetto2Caponnetto P, Polosa R, Auditore R et al. Smoking Cessation and Reduction in Schizophrenia (SCARIS) with e-cigarette: study protocol for a randomized control trial. Trials 2014;15:88. sur des schizophrènes, qui, en général, fument beaucoup, certains vont jusqu’à sept paquets par jour (le schizophrène meurt surtout du cancer du poumon), montre que la e-cigarette réduit de moitié la consommation de tabac dans la journée.
En ce qui concerne le sevrage, nous sommes dans l’inconnu scientifique. L’étude de Bullen1, publiée en 2013, méthodologiquement bien construite, n’a pas montré grand-chose, le matériel était très ancien, le suivi était téléphonique, un peu aléatoire et uniquement fondé sur le déclaratif, la population était très hétérogène. Dans les trois populations envisagées : vapotage avec 16 mg de nicotine, substitut nicotinique avec timbre à 21 mg et cigarette électronique placeboPlacebo Substance inerte, sans activité pharmacologique, ayant la même apparence que le produit auquel on souhaite le comparer. (NDR rien à voir avec le groupe de rock alternatif formé en 1994 à Londres par Brian Molko et Stefan Olsdal.) l’étude a montré qu’il n’y avait pas de différence significative entre les trois popu- lations. Cette étude a éventuellement montré qu’on était au même niveau que les substituts nicotiniques, mais sans grande fiabilité.
La méta-analyse de Dawkins et al.3Dawkins L, Turner J, Crowe E. Nicotine derived from the electronic cigarette improves time-based prospective memory in abstinent smokers. Psychopharmacology (Berl) 2013;227:377-84. a montré qu’environ trois quarts des vapoteurs ne fument plus ou beaucoup moins depuis qu’ils utilisent le VP. C’est un point important. Quatorze pour cent avaient réduit significativement le nombre de cigarettes fumées.
J.F. Etter4Etter JF. La vérité sur la cigarette électronique. Fayard. 2013. a montré que 76% vapotaient quotidiennement et fumaient moins de cigarettes de tabac. On sait aussi que lorsqu’on commence à vapoter, dans la plupart des cas, on continue.
Le VP aujourd’hui et la tabacologie
Les tabacologues ont pendant longtemps ignoré, snobé la cigarette électronique. Et ce sont les patients qui les ont sensibilisés, je peux en témoigner.
Vraisemblablement, ce n’est pas un produit gadget. Faut-il le considérer comme un médicament comme en Angleterre, où le statut du médicament n’est pas le même qu’en France? Faut-il le considérer comme un produit du tabac? L’industrie du tabac commence à y travailler de façon insidieuse. Pour le moment, c’est un produit de consommation courante qui est entre les deux, qui a un prix modéré, avec une souplesse d’acceptation de l’innovation technique, comme le disait D. Jayle. Mais, évidemment, il ne faut pas exclure les contrôles de qualité, de fabrication. Ce qui est intéressant, ce sont les prospectives du groupe financier américain Wells Fargo, qui ont montré qu’en 2020, le nombre de vapoteurs sera équivalent à celui des fumeurs. Et que le chiffre d’affaires des vapoteurs va dépasser celui des fumeurs à la fin de la décennie.
On va donc avoir une pression très forte sur ce marché. à la fin 2013, on avait prévu 1,8 milliard de dollars de chiffres d’affaires aux états-Unis, c’est ce qui s’est réalisé. On prévoit à la fin de la décennie 10 milliards de dollars et si les grands fabricants s’y mettent, on va doper le marché. Comment vont réagir les cigarettiers? Ils commencent à investir massivement. L’industrie pharmaceutique? Elle est étrangement absente. L’état? On ne sait pas, mais on va vite voir. Le VP, on l’a dit, est un produit entre 10 et 250 fois moins risqué que la cigarette, comment va-t-on prendre en charge des gens qui ont une pratique, sans problème de santé mentale, économique, sociale et sanitaire, c’est un problème éthique qu’il faut essayer d’aborder. Le statut de la nicotine serait-il à revisiter? Sûrement. La vigilance de toute façon est nécessaire.
L’avenir c’est quoi? D’abord, il faut observer. Observer le développement de cet usage massif d’un produit, qu’on aurait pu considérer comme un gadget, mais qui, finalement, ne l’est pas. En étude continue, on mesure ses effets, les premières remontent à trois ans, nous n’avons qu’un recul modéré sur ce dispositif. Ensuite, il faut affiner nos connaissances, et rester vigilants sur des dérives possibles. Aux états-Unis, certains savent utiliser leur cigarette électronique avec des bidouillages un peu dangereux. Surtout avec l’appropriation par l’industrie du tabac, on risque de voir apparaître dans les e-liquides des produits plus addictogènes, et là, il faudra revoir le discours.
En conclusion, pour la première fois, un dispositif nous a été imposé par nos patients, il ne vient ni de la pharmacie, ni de la médecine, ni de la science. Ce retard de prise en charge par la pharmacologie nous pose problème. C’est sous la pression imposée par les patients que l’on a dû revoir notre position initiale, qui était dubitative, voire de rejet. Quant à l’avenir, on peut penser qu’il se fera sur les marchés avec tout ce que cela comporte.