Il y a de plus en plus d’études et d’informations concernant la e-cigarette de plus en plus fiables et, il faut le rappeler, les dangers de la e-cigarette sont considérablement moindres que ceux du tabac. Quand on a un produit qui permet aux fumeurs d’arrêter de fumer, il faut prendre cette vision en compte en termes de santé publique.
La fumée de tabac est très complexe, la dépendance est entretenue en partie par la nicotine, mais il y a d’autres substances dans la fumée qui y participent.
Trop souvent, on a associé les dangers du tabac à la consommation de nicotine et on associe la nicotine aux maladies liées au tabagisme. Or, les dangers viennent des composés cancérigènes, du monoxyde de carbone, et des gaz oxydants contenus dans la fumée. Les produits les plus dangereux sont les produits fumés, ceux qui viennent de la combustion du tabac. On sait que les produits du tabac qui ne subissent pas de combustion, comme par exemple le Snus en Suède, sont moins dangereux. Ce n’est pas la nicotine en soi qui est dangereuse, c’est le fait d’inhaler la fumée, produit de combustion du tabac.
Le fumeur sait gérer la dose de nicotine qu’il s’administre, il sait très bien moduler sa façon de fumer pour obtenir la dose de nicotine qu’il souhaite1Le Houezec J. Role of nicotine pharmacokinetics in nicotine addiction and nicotine replacement therapy: a review. Int J Tuberc Lung Dis 2003;7(9):811-9.. Il faut savoir que la nicotine est une substance extraordinaire, puisqu’elle permet, selon ses besoins, à la fois de se stimuler ou, à l’inverse, de se calmer, d’avoir un effet de sédation. C’est juste une question de dose, elle stimule à petite dose, elle inhibe à haute dose. Un fumeur est capable de le moduler, bouffée par bouffée sur une cigarette.
En ce qui concerne la cigarette légère, l’Europe en a interdit les termes depuis 2003 et cela grâce à une étude2Jarvis MJ, Boreham R, Primatesta P, Feyerabend C, Bryant A. Nicotine yield from machine-smoked cigarettes and nicotine intakes in smokers: evidence from a representative population survey. J Natl Cancer Inst 2001;93(2):134-8. qui montrait que, quels que soient le type de cigarette (les chiffres reproduits sur les paquets de cigarette, qui sont le résultat d’une machine à fumer, ne veulent strictement rien dire) et le rendement de nicotine indiqué sur le paquet, un fumeur va rechercher environ 1 mg de nicotine.
Dans une cigarette, il y a entre 12 et 14 mg de nicotine et un fumeur, en fonction de sa façon de fumer, va tirer entre 1 et 3 mg.
Le vapoteur va apprendre avec la cigarette électronique à faire la même chose et à moduler ses besoins en nicotine. Le débat actuellement est de savoir s’il faut limiter la nicotine dans les liquides. En France, l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps), devenue l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM), recommande de ne pas autoriser plus de 20 mg/ml sauf en déposant une autorisation de mise sur le marché (AMM) et en devenant un médicament. Le débat se pose au niveau européen.
Une étude3Benowitz NL, Zevin S, Jacob P 3rd. Suppression of nicotine intake during ad libitum cigarette smoking by high-dose transdermal nicotine. J Pharmacol Exp Ther 1998;287(3):958-62., réalisée aux états-Unis sur des fumeurs à qui on avait mis 1, 2 ou 3 patchs, et qui avaient la possibilité de continuer à fumer, avait clairement montré que les fumeurs savent titrer la nicotine. Lorsque les fumeurs avaient un apport de 63 mg de nicotine par les patchs, ils tiraient 1,6 mg de nicotine alors que ceux qui n’avaient pas de nicotine par les patchs (placebo, sans nicotine) tiraient 2,5 mg par cigarette.
Le potentiel addictif de la nicotine est déterminé par la façon dont elle est absorbée. La nicotine pénètre dans l’organisme par le même chemin que l’oxygène et atteint le cerveau très rapidement. Lorsqu’elle est fumée, la cigarette est le produit du tabac le plus addictogène, celui qui créé une dépendance la plus forte. Inhaler une substance psychoactive est plus rapide que se l’injecter en intraveineuse. C’est pour cette raison, entre autres, que le crackCrack Le crack est inscrit sur la liste des stupéfiants et est la dénomination que l'on donne à la forme base libre de la cocaïne. Par ailleurs, ce dernier terme est en fait trompeur, car le mot cocaïne désigne en réalité le chlorhydrate de cocaïne. L'origine du mot 'crack' provient du craquement sonore qu'il produit en chauffant. est beaucoup plus addictif que la cocaïne pris sous une autre forme.
L’inhalation est vraiment le facteur clé de la dépendance
C’est aussi pour ça que la cigarette électronique fonctionne, justement parce que la nicotine va prendre le même chemin que celui dont les fumeurs ont l’habitude. Ils vont pouvoir passer d’un produit à l’autre, parce que le mode de consommation de la nicotine est similaire. Avec les substituts nicotiniques, la nicotine pénètre plus lente- ment dans l’organisme, que ce soit à travers la peau, la muqueuse buccale, que lorsqu’elle est fumée. Avec un tabac à chiquer, on a une situation intermédiaire, le tabac contient une concentration en nicotine plus forte et a une capacité d’absorption plus aisée.
Ce qui créé la dépendance, c’est le décalage entre la concentration de nicotine dans le sang veineux (périphérique) et celle dans le sang artériel, qui va amener la nicotine au cerveau1. Lorsqu’on utilise des substituts, l’absorption est plus lente, donc il n’y a pas ce décalage. Seule l’inhalation permet cette forte concentration au niveau cérébral.
Qu’en est-il avec la cigarette électronique?
Dans une étude publiée récemment4Farsalinos KE,Spyrou A,Tsimopoulou K, Nicotine absorption from electronic cigarette use: comparison between first and new-generation devices. SciRep2014;4:4133., le Dr Farsalinos a comparé les cigarettes électroniques de première génération, qui ressemblaient à des cigarettes, à des systèmes plus performants avec une batterie plus puissante et un système de vaporisation plus efficace. Il a étudié le com- portement des vapoteurs en reproduisant pendant les cinq premières minutes l’équivalent d’une consommation de tabac.
Il leur a fait prendre dix bouffées avec la cigarette électronique pour reproduire ce qui se passe avec une cigarette. Une cigarette se fume en général en cinq minutes et en dix bouffées. Puis il les a laissé vaper comme ils le souhaitaient pendant une heure.
Par rapport à ce qui se passe avec une cigarette,les e-cigarettes de première,puis de deuxième génération produisent une nicotinémie bien moins importante et beaucoup moins rapide que a cigarette. Au bout des cinq minutes, on est au tiers de ce que l’obtient avec une cigarette.
Il faut vaper 35 minutes pour obtenir la même dose de nicotine obtenue en cinq minutes avec une cigarette. On a une absorption pulmonaire qui satisfait le fumeur, mais on a aussi un produit qui est loin de la cigarette pour apporter la nicotine au cerveau.
L’autre point est la toxicité de la nicotine. On entend beaucoup de choses et depuis très longtemps. Or, si elle était si importante, on l’aurait rencontrée avec les fumeurs.
En ce qui concerne les symptômes de surdosage, tous les fumeurs les connaissent: les nausées font arrêter la consommation. C’est la même chose avec la cigarette électronique. Au niveau de l’utilisateur, il n’y a pas de danger de toxicité. Le danger de toxicité pourrait provenir du contact de la nicotine avec la peau, en particulier lors- qu’on verse le liquide dans le réservoir de la cigarette électronique. Pendant plus de 150 ans, on a répété que la dose létale de la nicotine était environ de 30 à 60 mg sans en connaître la source. Un pharmacologue autrichien, Bernd Mayer, a fait une vraie recherche, et dans les vieux textes allemands, il a réussi à sourcer ces expériences. Elles ont été faites par des médecins qui se sont auto-administrés des doses de nicotine et ont établi une dose létale tout à fait arbitraire, puisqu’elle était plus faible chez l’homme que ce que l’on a observé chez le rat, la souris ou le chien. Plusieurs publications ont permis de montrer que cette dose létale n’est pas de 60 mg mais au moins 20 fois supérieure, soit 500 mg à 1 000 mg de nicotine absorbée, et non pas ingérée. La dernière tentative de suicide rapportée, chez une patiente de psychiatrie, qui avait ingéré 1500 mg de nicotine, n’a pas conduit à une issue fatale!