Hépatite — VHC : Accord sur une baisse du prix du Solvadi©(sofosbuvir)

Le prix du Sovaldi©, nouveau médicament contre l’hépatite C, a été négocié à la baisse par les pouvoirs publics. Le ministère de la Santé annonce ainsi avoir réussi à obtenir le plus bas prix d’Europe, sans parvenir à satisfaire les associations de patients.

Le comité économique des produits de santé (CEPS) a ainsi fixé le prix du médicament Sovaldi à 13 667€ HT par boîte de 28 comprimés, soit 41 000 euros pour un traitement de 12 semaines avec le nouveau prix. Le sofosbuvir (Sovaldi® de Gilead), nouveau antiviral direct (AVD) contre l’hépatite C, avait vu son prix fixé initialement, dans le cadre de l’Autorisation temporaire d’utilisation (ATU) à 56 000 euros environ pour un traitement de 12 semaines (19 000 euros la boite).

Compte tenu du nombre de patients pris en charge, des réductions supplémentaires liées aux volumes de ventes prévisionnels ont été obtenues. Un contrat de performance oblige au versement de remises en cas d’échec du traitement. Par ailleurs, quand prescrit, ce médicament qui sera donc pris en charge à 100% par l’assurance maladie, dans le cadre du traitement des malades en affections longue durée (ALD, dont l’hépatite C fait partie).

Dans un communiqué, le laboratoire Gilead «se félicite qu’un accord ait été trouvé avec les autorités de santé», ajoutant: «Cet accord est aussi bénéfique à la collectivité grâce aux économies qui vont pouvoir être réalisées (cirrhoses, hospitalisations, cancer du foie et transplantations évités etc..) et va permettre aux spécialistes  de l’Hépatite C d’envisager pour la première fois une stratégie de contrôle puis de maîtrise totale d’une maladie chronique mortelle.»

L’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) a par ailleurs délivré une ATU à la spécialité Harvoni, première d’une nouvelle génération de produits associant deux antiviraux (ledipasvir et sofusbuvir), en un seul comprimé par jour, sans interféron 1LEDIPASVIR/SOFOSBUVIR GILEAD 90 mg/400 mg, comprimé pelliculé, utilisé dans le cadre d’une ATUATU Autorisation Temporaire d’Utilisation. Autorisation permettant aux malades d’avoir un accès précoce aux médicaments, avant ou hors AMM. Procédures souvent utilisée dans l'histoire du sida. de Cohorte, est indiqué pour le traitement de patients adultes atteints d’infection virale C chronique et:
– Présentant une maladie à un stade avancé (avec fibrose hépatique F3/F4 ou présentant des manifestations extra-hépatiques du VHC) ou
– Sont sur liste d’attente pour une transplantation hépatique ou
– Ont subi une transplantation hépatique et présentent une récurrence de l’infection par le virus de l’hépatite C ou
– Ont subi une transplantation rénale.
. Le prix proposé par le laboratoire (48 000 € pour un traitement de trois mois) permet de diviser par deux le coût actuel des bithérapies disponibles.

La mobilisation des associations

Cette annonce n’a pas convaincu, loin de là, les associations, qui espéraient obtenir un prix bien plus bas. Dans un communiqué publié sur le site du TRT-5, elles se disent «en colère»: «L’acceptation de tels tarifs, injustifiés au regard du coût de production et de développement, contribue à mettre profondément en danger la subsistance de notre système de santé solidaire et le principe de l’accès aux soins pour tous jusqu’à aujourd’hui revendiqué».

Lors d’un colloque le 3 novembre autour de l’hépatite C et des nouveaux traitements, le TRT-5, le Collectif interassociatif sur la santé (Ciss), le Collectif Hépatites Virales (CHV), SOS Hépatites, Médecins du monde et la Comede (Comité médicale pour les exilés) avaient insisté sur l’impact du prix des médicaments sur l’accès aux soins en France.

Les prix exorbitants de certains nouveaux médicaments, notamment ceux contre l’hépatite C semblent injustifiés et peuvent menacer le système de santé solidaire français, avaient déjà alerté ces associations de patients et de médecins. «On demande au contribuable de rentabiliser une opération financière», a déclaré Yann Mazens, coordinateur du TRT-5 au sujet du prix initial du Sovaldi©, rappellant que l’américain Gilead a racheté pour 11 milliards de dollars la Start-up Pharmasset, à l’origine de la molécule sofosbuvir.

Emettre une licence d’office

Avant l’annonce de cet accord sur le prix, ces associations souhaitaient :

  • une application stricte des recommandations du Rapport sur la prise en charge des personnes infectées par les virus de l’hépatite B ou de l’hépatite C, coordonné par par le Pr Daniel Dhumeaux. En particulier, auprès des populations spécifiques, celles-là même qui connaissent aujourd’hui des refus de soin. Les associations demandent également une clarification des recommandations du collège de l’HAS, qui a limité en juin dernier leur application.

  • que le gouvernement use de l’article L613-16 du Code de propriété industrielle, relatif à la transmission et aux pertes de droits du détenteur du brevet, pour émettre une licence d’office sur le Sofosbuvir. Ce qui permettrait d’en produire une version générique à un moindre coût.

Instaurée en 1992 pour permettre à l’Etat d’exploiter un brevet dans l’intérêt général, lorsque les laboratoires pratiquent des tarifs trop élevés, la licence d’office n’a jamais été mise en oeuvre en France. Mais ce système a déjà utilisé en Italie et en Allemagne, respectivement pour un antibiotique et un test de dépistage (pas pour le sofosbuvir, donc.)

La ministre de la Santé Marisol Touraine avait déjà évoqué ce dispositif comme un recours possible, mais avait précisé qu’il n’interviendrait qu’en cas d’échec des négociations tarifaires.

Fixation des prix et transparence

Au delà de l’hépatite C, et dans le contexte de l’élaboration de la nouvelle loi santé, les associations souhaitent que les pouvoirs publics lancent une réflexion plus large sur les prix des nouveaux médicaments et demandent la présence d’un représentant de la société civile dans les instances décisionnaires. Dans leur dernier communiqué, les représantants de la société civile regrettent que «le gouvernement rate également aujourd’hui l’occasion d’un débat sur la mécanique de fixation des prix des médicaments, enjeu essentiel et éminemment prégnant pour l’avenir de notre système de santé comme de la recherche médicale».

Aujourd’hui, les procédures de fixation des prix du Comiété économique des produits de santé (CEPS) ne sont pas transparentes. Son président a remis récemment en cause l’intérêt de la participation des malades aux instances d’évaluation des médicaments et de fixation des prix. La loi de santé publique recommande pourtant depuis 2002 la participations des usagers dans les différentes instances.