Les franciliens et le VIH: résultats de l’enquête KABP 2010
Les résultats en Ile-de-France de l’enquête 2010 sur les connaissances, les attitudes, les croyances et les comportements face au VIH/sida ont été publiés fin 2011, et révèlent un recul des connaissances chez les plus jeunes ainsi qu’un éloignement du VIH de leurs préoccupations.
Les premiers résultats de l’enquête KABP (1) réalisée en 2010 concernent l’Ile-de-France, l’une des régions les plus touchées par le VIH ; le nombre de découvertes de séropositivité y est stable depuis 2007 mais quatre fois supérieur au reste du territoire. Les tendances observées lors de l’étude de 2004 se confirment, et sont dans l’ensemble similaires aux résultats nationaux (prochainement publiés).
Des jeunes moins bien informés
Si les franciliens ont dans l’ensemble une bonne connaissance des modes de transmission et de protection du VIH, les fausses croyances persistent : ils sont par exemple aussi nombreux qu’en 2004 à penser que le virus se transmet lors d’une piqûre de moustique, soit 21%, une proportion qui atteint les 25% chez les plus jeunes.
Pour la première fois - en Ile de France comme en France - ce sont les 18-30 ans qui maîtrisent le moins bien les mécanismes de transmission et de protection. Leur niveau de connaissance ne cesse de baisser depuis 1998 quant il augmente chez les 45-54 ans. Un tiers des jeunes franciliens (34.3%) pensent ainsi que la transmission du VIH est possible lors de relations sexuelles protégées ; une croyance qui a certes augmenté dans toutes les classes d’âge entre 2004 et 2010, mais plus nettement chez les 18-30 ans, et ce, sur l’ensemble du territoire français.
Recours au dépistage plus fréquent
Le préservatif reste néanmoins très utilisé, en particulier lors du premier rapport sexuel, mais les stratégies de prévention apparaissent davantage centrées sur le test de dépistage, considéré plus efficace en 2010 qu’en 2004.
Cette évolution touche particulièrement les 18-30 ans : 90% jugent que « demander un test de dépistage à ses partenaires » est une stratégie de prévention efficace (84% toutes classes d’âge confondues), et 72% estiment efficace de faire soi-même un test régulièrement.
De fait, le recours au test de dépistage s’avère plus fréquent qu’en 2004, une tendance qu’on retrouve dans les résultats de l’enquête nationale. En Ile-de France, la hausse est particulièrement forte chez les hommes : 20% ont fait un test en 2010 contre 11% en 2004 ; ils sont pour la première fois aussi nombreux que les femmes à s’être fait dépistés.
On constate par ailleurs une augmentation de l’adhésion au dépistage obligatoire pour toute la population, en particulier chez les jeunes franciliens (44% en 2010 contre 38% en 2004).
Faible visibilité des personnes vivant avec le VIH
Cette évolution des stratégies de prévention peut être rapprochée d’une autre information : pour la première fois depuis 1992, les jeunes sont plus nombreux que leurs aînés à refuser d’avoir des relations sexuelles protégées avec une personne séropositive (seuls 12% contre 20% chez les plus de 30 ans accepteraient). L’enquête montre par ailleurs une moindre visibilité des personnes vivant avec le VIH ; la maladie est moins perçue par l’entourage et les personnes séropositives se manifestent moins.
Si la proportion des franciliens qui connaissent une personne vivant avec le VIH est plus élevée qu’au niveau national, le chiffre baisse depuis 1998, particulièrement chez les jeunes. En 2010, les 18-30 ans sont 14%, contre 25% chez leurs aînés, à connaître une personne séropositive.
En Ile-de-France comme dans le reste du territoire, les attitudes à l’égard des personnes vivant avec le VIH sont cependant favorables (un peu plus qu’en 2004). Plus de 90% des personnes interrogées acceptent de travailler, de manger et de partir en vacances avec elles.
Banalisation
Si dans l’ensemble les franciliens continuent d’adopter des comportements préventifs face au VIH, il n’est aujourd’hui pas davantage craint que d’autres risques sanitaires et apparaît de plus en plus éloigné des préoccupations, particulièrement chez les jeunes (une évolution qui se retrouve au niveau national).
S’inquiétant de cette banalisation du VIH/sida au sein de la jeune génération, les auteurs (2) de l’enquête indiquent qu’il faut rester attentif à ce qu’elle ne s’accompagne pas de l’abandon du préservatif.
Rappelant que les 18-30 ans ont débuté leur sexualité après l’arrivée des ARV en 1996, « dans un contexte épidémiologique et social du sida différent de leurs aînés », ils soulignent la nécessité de mieux comprendre les mécanismes préventifs mis en place par les jeunes et de s’interroger sur la qualité et la pertinence des informations qui leur sont aujourd’hui délivrées.
M.Collet
Les connaissances, attitudes, croyances et comportements face au VIH/sida en Ile-de-France en 2010. Situation en 2010 et 18 ans d’évolution. Décembre 2011.
(1) KABP: Knowledge, Attitudes, Beliefs and Practices. Il s’agit de la 6ème édition, l’enquête ayant déjà été réalisée en 1992, 1994, 1998, 2001 et 2004. Elle est conjointement menée par l’ANRS, l’ORS, l’InVS, l’INPES et l’INSERM.
(2) L’équipe KABP est constituée de Véronique Doré pour l’ANRS, de Nathalie Beltzer, Leïla Saboni, Claire Sauvage, Cécile Sommen pour l’ORS, Cécile Brouard, Marie Jauffret-Roustide, Guy La Ruche, Stéphane Le Vu, Caroline Semaille pour l’InVS, de François Beck, Arnaud Gautier, Romain Guignard, Nathalie Lydié, Jean-Baptiste Richard pour l’INPES et Josiane Warszawski de l’unité 1018 de l’INSERM.