SFLS 2016 : Prep et IST, de nouveaux chiffres

A l’occasion du congrès 2016 de la SFLS, de nouveaux chiffres concernant la Prep, et particulièrement les IST chez les personnes suivies, ont été rendus publics, alors que l’accès à la prévention diversifiée commence à se déployer chez les gays et HSH et peine à se déployer dans les autres populations exposées.

L’efficacité de la prophylaxie pré-exposition (PrEP) utilisant le Truvada® en prévention de la transmission sexuelle du VIHVIH Virus de l’immunodéficience humaine. En anglais : HIV (Human Immunodeficiency Virus). Isolé en 1983 à l’institut pasteur de paris; découverte récemment (2008) récompensée par le prix Nobel de médecine décerné à Luc montagnier et à Françoise Barré-Sinoussi. a été démontrée dans divers essais cliniques. Depuis janvier 2016, conformément à une recommandation temporaire d’utilisation (RTU), prise en charge à 100% par la sécurité sociale, la mise à disposition de la PrEPPrEP Prophylaxie Pré-Exposition. La PrEP est une stratégie qui permet à une personne séronégative exposée au VIH d'éliminer le risque d'infection, en prenant, de manière continue ou «à la demande», un traitement anti-rétroviral à base de Truvada®. se déploie dans les services hospitaliers et dans les CeGIDDCeGIDD Centre gratuit d’information, de dépistage et de diagnostic (CeGIDD) des infections par les virus de l'immunodéficience humaine, des hépatites virales et des infections sexuellement transmissibles. Ces centres remplacent les Centres de dépistage anonyme et gratuit (CDAG) depuis le 1er janvier 2016.

Ainsi, à l’Hôpital Tenon à Paris, 189 personnes ont été accueillies dans le service de maladies infectieuses pour une demande de PreP (au 24/06/2016). Il s’agissait de 176 hommes ayant des rapports sexuels entre hommes (HSH, 93%), 12 se déclarant bisexuels et d’une femme migrante hétérosexuelle chez qui finalement, l’indication de PreP n’a pas été retenue. L’âge médian était de 38 ans [21-64]. Sept sur les 186 personnes demandeuses étaient des travailleuses du sexe.

La moitié des personnes accueillies (51%) ont déclaré avoir eu recours au traitement post-exposition (TPE) et 21% avait précédemment utilisé une PreP «sauvage», sans supervision médicale. Le nombre médian de partenaires dans les 3 derniers mois est de 15 [0-250], celui des rapports sexuels non protégés par le préservatif de 4 [0-400]. Une majorité (59%) ont déclaré avoir «des difficultés» avec le préservatif. D’ailleurs, 69% ont déclaré que le dernier rapport sexuel n’avait pas été protégé par le préservatif. Concernant l’usage de drogues, 63% ont déclaré avoir utilisé des substances psychoactives dans les 3 mois et 3,7 % avoir «slammé» (utilisé des drogues en injection en contexte sexuel).

Prep et ISTIST Infections sexuellement transmissibles. 

Concernant les infections sexuellement transmissibles autres que le VIH, 61% des personnes intéressées par la Prep en ont eu au moins une au cours des deux dernières années. Le bilan pré-Prep a d’ailleurs permis le dépistage d’IST non repérées précédemment chez 38% des personnes demandeuses de Prep. Il s’agissait de 3 VIH précoces, 3 VHC, 9 syphilis et de 57 Gonocoques/Chlamydiae. La PreP, qui a été finalement prescrite chez 82% des personnes la demandant (soit 156, 74% à la demande, 26% en continu), représente donc véritablement une offre globale de dépistage. Ces IST n’auraient pas été dépistées hors du contexte de la Prep.

Ce taux élevé de dépistage d’IST au stade asymptomatique est néanmoins un signe positif, alors qu’une méta-analyse récente se penchant sur 18 études de cohortes a montré un taux très élevé d’IST chez les HSHHSH Homme ayant des rapports sexuels avec d'autres hommes.  sous Prep. Les rapports de taux d’incidence ont montré des risques d’infections beaucoup plus élevés chez les personnes sous Prep que chez les HSH non utilisateurs : 25,3 fois plus pour les gonorrhées, 11,2 fois plus pour la Chlamydia et 44,6 fois plus pour la syphilis.

Cette augmentation du risque peut être expliquée par plusieurs facteurs : l’augmentation du dépistage, d’abord, comme les chiffres en provenance de Tenon l’indique ; ensuite, l’augmentation du nombre de partenaires sexuels et des rapports non protégés par le préservatif (anaux, mais aussi bucco-génitaux ou digitaux, possible vecteurs d’IST). Il faut toutefois nuancer les résultats de cette méta-analyse particulière, qui s’est penchée sur des études ayant spécifiquement recruté des HSH particulièrement exposés aux IST et au VIH. Dans les études n’utilisant pas la Prep retenues pour cette analyse, les comportements des HSH recrutés étaient peut-être différents. Ces chiffres soulignent en tout cas l’impérative nécessité d’un dépistage régulier des IST chez les personnes sous Prep.

Les chiffres de 7 services d’infectiologie 

Les données recueillis dans les consultations Prep de 7 services d’infectiologie en métropole (Nice, Hôpitaux civils Lyon, Montpellier, Nantes, Strasbourg, Tourcoing, Hôpital Bichat Paris) étaient également présentées via un autre poster lors de ce congrès de la SFLS. A l’origine de ces chiffres, les centres utilisant le dossier médical informatisé Nadis et participant à la cohorte Dat’aids qui avaient ainsi saisi les recours des patients pris en charge entre le 1er décembre 2015 et le 15 juin 2016. 

Ainsi, 280 personnes, âgées de 37 ans en moyenne [IQR : 31-45] ont été vues en consultation : 268 hommes ayant des relations sexuelles avec d’autres hommes (HSH) et 12 personnes transgenres.

Concernant les IST, Leurs antécédents comprenaient une syphilis (33 %), une infection à gonocoque (33 %), à chlamydiae (26 %), une condylomatose ano-génitale (30 %). Six présentaient une sérologieSérologie Étude des sérums pour déterminer la présence d’anticorps dirigés contre des antigènes. VHC positive et 129 une immunité contre le VHB (22 un preuve sérologique d’hépatite B guérie). 

  • 62 % rapportaient des rapports anaux non protégés par le préservatif dans l’année précédente.

  • 33 % mentionnaient l’usage de drogues récréatives.

  • 201 personnes avaient déjà bénéficié d’un traitement par Truvada®, dont 11 dans les suites de l’essai Ipergay.

L’indication de PreP n’a pas été retenue chez 10 sujets : 3 en situation de couples séro-différents monogames et 6 en l’absence de RANP, 1 femme non considéré à risques. Par ailleurs 3 initiations ont été reportées après un traitement post-exposition. 3 patients présentaient une sérologie VIH positive lors du bilan initial. 

Soixante six patients étaient en attente de résultats initiaux pour débuter la PreP. Celle-ci était proposée en prise discontinue dans 60 % des cas.

Alors que le nombre de personnes intéressées augment, un recueil structuré des données récoltés par les services apparaît comme de plus en plus nécessaire pour permettre un suivi efficace de tous les patients. 

Bibliographie 

Profil des premiers usages d’une consultation Prep-Santé sexuelle
J. Chas, MA. Danet, J. Berdougo, MG. Lebrette, S. Le Nagat, J. Bellony, G. Pialoux Hôpital Tenon, APHP, Paris, France
Poster, SFLS 2016

Pre-exposure prophylaxis for HIV infection and new sexually transmitted infections among men who have sex with men
Noah Kojimaa, Dvora Joseph Daveya,b and Jeffrey D. Klausnera
AIDS 2016, 30:2251–2252

Analyse descriptive des personnes consultants pour Prep au cours du premier semestre 2016 dans 7 services hospitaliers métropolitains
P. Pugliese, L. Cotte, B. Phung, E. Billaud, V. Tribout, T. Huleux, D Rey, T. Jovelin, A. Pasquet, S. Bagge, O. Cabras, N. Meftah, C. Chidiac, E. Cua
Poster, SFLS 2016