AFRAVIH 2016 — Désir et intention de procréation chez des femmes vivant avec le VIH à Abidjan

Lors de la session animée par Safiatou Thiam (CNLS, Dakar, Sénégal) et Veronica Noseda (Planning familial, Paris, France), consacrée aux femmes face au VIH, au Nord comme au Sud, Patricia Dumazert (INSERM, Centre INSERM U897) a présenté une étude sur les facteurs associés au désir et à l’intention de procréation, aux besoins non satisfaits en planification familiale et au grossesses non planifiées. 

La santé de la reproduction et du VIHVIH Virus de l’immunodéficience humaine. En anglais : HIV (Human Immunodeficiency Virus). Isolé en 1983 à l’institut pasteur de paris; découverte récemment (2008) récompensée par le prix Nobel de médecine décerné à Luc montagnier et à Françoise Barré-Sinoussi. en Afrique est un sujet complexe, pour lequel on dispose de peu d’études. Les femmes vivant avec le VIH connaissent une fertilité moins élevée qu’en population générale, mais qui augmente après la mise sous-traitement. Cette fertilité moins bien maitrisée entraîne des grossesses non désirées, non planifiées et non menées à terme. La question était donc de savoir cette incidence accrue des grossesses est vraiment liée à un choix de procréation.

Ainsi, 2002 femmes ont été sélectionnées de façon aléatoire dans deux sites de prise en charge ambulatoire du VIH à Abidjan entre avril et septembre 2014. Les désirs de procréation —qui a été défini comme un idéal de procréation— ont été estimés chez l’ensemble des enquêtées, et les intentions —les moyens déployés pour atteindre cet idéal de procréation— chez les 1118 femmes déclarant avoir un partenaire sexuel, désirant un enfant et n’étant pas enceintes au moment de l’étude. La non utilisation de contraception par une femme en âge de procréer avec une vie sexuelle active bien qu’elle ne désire pas ou n’espère pas avoir d’enfant dans le future ont été définis comme des besoins non satisfaits en planification familiale. Ils ont été estimés chez les 696 femmes ayant un partenaire et ayant déclaré vouloir retarder d’au moins deux ans leur prochaine grossesse ou ne plus vouloir d’enfants. L’échelle psychométrique «London Measure Unplanned Pregnancy» a été utilisée pour estimer le taux de grossesses non planifiées chez les 588 femmes ayant eu une grossesse après la connaissance de leur statut VIH.

Des besoins non statisfaits en planification familiale

L’âge médian des 2002 femmes enquêtées était de 37,4 ans (intervalle interquartile [IIQ]: 32,8; 42,3), 46,4% avaient un niveau d’éducation secondaire ou supérieur. Le délai médian depuis la connaissance du statut VIH était de 63,3 mois (IIQ: 27,5; 100,3); 87,9% étaient sous traitement antirétroviral depuis 54,1 mois (IIQ: 23,1 à 84,3). 1077 (53,8%) ont déclaré vivre avec un partenaire sexuel, dont 47,9% l’ont informé de leur statut VIH. 76,7% ont déclaré un désir de procréation, et parmi elles 52,9% souhaitaient une grossesse immédiate ; 27,3% avaient partagé ce désir de procréation avec un personnel de santé et 72.7% avec un membre de leur entourage. 24,8% des femmes ont déclaré une intention de procréation.

Au final, le taux de besoins non satisfaits en planification familiale et le taux de grossesse non planifiées ont été respectivement estimés à 42,4% et 27,1%(pour 588 personnes). Cette population de femmes ouest-africaines infectées par le VIH se caractérise donc bien par un très fort désir de procréation, mais les besoins en planification familiale restent souvent non satisfaits chez celles qui ne souhaitent pas procréer dans l’immédiat. Pour Patricia Dumazert, il est urgent de proposer une offre de santé sexuelle et reproductive intégrée à la prise en charge VIH et adaptée aux besoins de ces femmes.

Désir et intention de procréation, besoins non satisfaits en planification familiale et grossesses non planifiées chez des femmes infectées par le VIH à Abidjan, Côte d’Ivoire, Patricia Dumazert

La lettre de l’Infectiologue et Vih.org s’associent pour couvrir l’AFRAVIH 2016.