Serosorting, «sérotriage»: plus de questions que de réponses

Une session de la CROI s’est intéressée aujourd’hui au serosorting – faire intervenir dans le choix d’un partenaire sexuel à la fois le statut sérologique de ce dernier, et le sien propre. Malheureusement, sans aborder vraiment les motivations des partenaires ou l’efficacité possible de ces pratiques. 

L’un des travaux, mené à Seattle, explorait l’impact de la découverte de la séropositivité sur ce choix, et observait qu’avant le diagnostic de séropositivité, les sujets choisissaient pour des rapports non protégés des partenaires VIH+ dans 8,6% des cas et des partenaires VIH- dans 34,4% des cas, alors qu’un à deux ans après le diagnostic ils choisissaient des partenaires VIH+ dans 39,5% des cas et VIH- dans 11,6% des cas. Un autre travail, mené à Philadelphia, observait que 21,4% des sujets HIV- et 51,3% des sujets HIV+ choisissaient des partenaires de même statut sérologiques ; les sujets Noirs rapportaient une telle stratégie 2 fois plus souvent que les que les sujets Blancs, les Hispaniques ayant une position intermédiaire.

Cette session laissait cependant sur sa faim: d’une part, les motivations des sujets, en particuliers VIH+, n’étaient pas explorées: empreinte du stigma? Volonté de ne pas être contaminant? D’autre part, aucune question n’était posée sur la part du statut virologique (indétectable ou non) dans le choix d’un partenaire VIH+. Enfin, l’intérêt réel de cette attitude de « triage » n’était pas abordé: en tant que VIH-, faire reposer sa sécurité sur le choix d’autres VIH- est un leurre, à moins de dépistages extrêmement fréquents (et irréalistes !) du partenaire, et encore (et il n’est pas sûr que les TROD en vente libre changent grand-chose); en tant que VIH+, le choix d’autres VIH+ expose au risque (plus théorique qu’autre chose) de surcontamination; en tant que VIH-, le choix d’un partenaire VIH+ traité et indétectable pourrait être la meilleure solution; mais les recommandations officielles se font attendre… (pour mémoire, le CDC américain déconseille le serosorting à l’usage des VIH-, mais ne dit rien sur les autres options).

La CROICROI «Conference on Retroviruses and Opportunistic Infections», la Conférence sur les rétrovirus et les infections opportunistes annuelle où sont présentés les dernières et plus importantes décision scientifiques dans le champs de la recherche sur le VIH. sur le web