IST — Infection à Chlamydia trachomatis : revoir les cibles du dépistage

NatChla, première enquête française du genre, a permis d’estimer la prévalence de l’infection à Chlamydia trachomatis en population générale et d’en identifier les facteurs de risque. Leur étude incite à repenser l’offre de dépistage, en particulier à l’élargir aux hommes.

L’enquête sur le contexte de la sexualité en France (CSF) est une enquête nationale qui a été réalisée par téléphone en 2006 auprès d’un échantillon aléatoire de la population des 18-68 ans. Le volet NatChla a été proposé à un sous-échantillon de personnes âgées de 18 à 44 ans avec un dépistage par autoprélèvement à domicile. Parmi les personnes éligibles, 76% ont accepté de participer. Elles recevaient à domicile un kit de dépistage, génital pour les femmes et urinaire pour les hommes, avec un mode d’emploi. Celles-ci ont été plus nombreuses à le renvoyer (71% versus 65%). Au total, 2580 personnes, soit 52% des éligibles, ont été testées, dont 54% de femmes. Le rendu des résultats se faisaient, au choix, par courrier, via un numéro vert communiqué aux personnes désirant rester anonymes, ou par téléphone mais uniquement en cas de résultat positif.

Les facteurs de risque des 18-29 ans

La prévalence globale de l’infection Chlamydia chez les 19-44 ans a été estimée à 1,6% chez les femmes et 1,4% chez les hommes, prévalences comparables à celles observées dans les autres pays industrialisés. Chez les femmes, la prévalence est maximale entre 18 et 24 ans (3,6%), elle décroît entre 25 et 29 ans (2,7%) et chute après 30 ans (0,5%). Chez les hommes, la prévalence est relativement stable entre 18 et 24 ans (2,4%) et entre 25 et 29 ans (2,7%), elle diminue entre 30 et 34 ans (1,1%) et rejoint ensuite celle des femmes (0,5%).

Une analyse multivariée a identifié les facteurs associés au risque d’être porteur d’une infection à Chlamydia entre 18 et 29 ans, tranche d’âge où la prévalence est la plus élevée et pour laquelle le dépistage serait le plus pertinent. L’infection à Chlamydia est liée à des comportements sexuels à risque. La prévalence augmente chez les femmes avec le fait d’avoir eu dans les douze derniers mois au moins trois partenaires sexuels (prévalence = 8,4%), ou d’avoir eu un partenaire occasionnel comme dernier partenaire sexuel (prévalence = 11,9%), ou d’avoir des partenaires du même sexe (prévalence = 13,4%). Chez les hommes, la prévalence augmente avec le fait d’avoir eu comme dernier partenaire sexuel un nouveau partenaire connu depuis moins de trois mois (prévalence =6,1%), ou  un partenaire occasionnel (prévalence = 11,1%). Deux autres facteurs de risque indépendants ont été trouvés : ne pas posséder de diplôme pour les femmes (prévalence = 12,5%) et résider en Ile-de-France pour les hommes (prévalence = 7,5%  contre 1,3% dans le reste de la France).

Revoir les cibles du dépistage

Les auteurs pensent que «Ces résultats sont l’occasion de revoir les cibles du dépistage en France». Le dépistage des personnes asymptomatiques est principalement réalisé dans les services fréquentés par les personnes à risque comme les centres de planification familiale, les consultations de dépistage anonymes et gratuites ou les dispensaires anti-vénériens. L’étude NatChla montre que ce dépistage «devrait être élargi aux jeunes femmes sans diplôme et à celles qui ont un facteur de risque». De même, comme c’est déjà le cas aux Pays-Bas ou au Royaume-Uni, il devrait être proposé aux hommes. Les moins de 30 ans avec un facteur de risque ont en effet un niveau de prévalence similaire à celui des femmes et les dépister «permettraient de réduire la contamination de leurs partenaires féminines».

L’infection à Chlamydia trachomatis est l’infection sexuellement transmissible la plus fréquente dans les pays industrialisés. Elle est dans plus de la moitié des cas asymptomatique. En l’absence de traitement, elle peut envahir profondément l’appareil génital provoquant chez l’homme des épididymites et des prostatites, avec un risque de stérilité si l’épididymite est bilatérale. Chez la femme, l’infection profonde peut provoquer des salpingites qui obstruent les trompes de Fallope. Une obstruction partielle provoque un risque de grossesse extra-utérine; l’obstruction complète des deux trompes aboutit à la stérilité. L’infection à Chlamydia est la cause majeure de stérilité féminine dans le monde; cela concerne 8 à 10000 femmes par an en France.

> Enquête nationale de prévalence de l’infection à Chlamydia trachomatis (volet NatChla de l’enquête CSF 2006) : à quelles personnes proposer un dépistage?  (PDF, 969Ko)  / V. Goulet et al. – BEH : Bulletin Epidémiologique Hebdomaire, 5 avril 2011, n° 12. – Pp. 160-164.