Criminalisation — Canada, Suisse, Royaume-Uni : la jurisprudence et les associations

Certains pays occidentaux plus que d’autres ont vu les actions en justice se multiplier pour statuer sur des cas de transmission ou d’exposition au risque de transmission du VIH. C’est naturellement dans ces pays aussi que le milieu associatif a développé un plaidoyer en réaction à ce genre de situations.

Ce dossier privilégiant les sources francophones, il met plus particulièrement en avant le cas du Canada, qui semble détenir le record de condamnations de ce type (plus de 90 personnes poursuivies, dont 70 condamnées), et celui de la Suisse, où des relations sexuelles non protégées, même sans transmission, exposent leur auteur à une condamnation, mais où les conclusions des travaux menés sous la direction du Pr Hirschel sur l’impact des traitements sur la réduction notable du risque de transmission du VIH a déjà commencé à influencer les tribunaux.

Canada

En février 2008, la Coalition des organismes communautaires québécois de lutte contre le sidaSida Syndrome d’immunodéficience acquise. En anglais, AIDS, acquired immuno-deficiency syndrome. (COCQ-Sida) publie sa position sur la criminalisation de la transmission et de l’exposition au risque de transmission du VIH (PDF, 52,8Ko).

En janvier 2009, le site de la Société canadienne du sida met en ligne un « Aide-mémoire pour entrevue média » rédigé par le Groupe de travail ontarien sur le droit pénal et l’exposition au VIHVIH Virus de l’immunodéficience humaine. En anglais : HIV (Human Immunodeficiency Virus). Isolé en 1983 à l’institut pasteur de paris; découverte récemment (2008) récompensée par le prix Nobel de médecine décerné à Luc montagnier et à Françoise Barré-Sinoussi. sur L’impact de la criminalisation sur l’épidémie du sida au Canada (PDF, 32Ko). Il dresse la liste  des répercussions de ce genre de mesures sur les politiques publiques et sur la réponse de la santé publique à l’épidémie de VIH/sida en général, mais aussi plus particulièrement sur l’appareil judiciaire, les organismes communautaires, les personnes vivant avec le VIH/sida et le grand public, et il propose une série d’alternatives au recours au droit pénal.

En mai 2009, ce même Groupe publie un document de position sur la criminalisation du non-dévoilement de la séropositivité au VIH (PDF, 102Ko).

Les 12 et 13 juin 2009, le Réseau juridique canadien VIH/sida organise 1er Symposium annuel sur le VIH, le droit et les droits de la personne, Des données et principes aux politiques et pratiques qui met à l’honneur Edwin Cameron, juge de la Cour constitutionnelle d’Afrique du sud, séropositif et militant contre la criminalisation de la transmission du VIH.

Le numéro de décembre 2009 de la Revue VIH/sida, droit et politiques lui consacre une section spéciale, sous le titre La criminalisation de la transmission du VIH, une piètre politique de santé publique (PDF, 372Ko).

Dans le numéro de septembre du Journal du Barreau du Québec (PDF, 70Ko), l’avocat Philippe Samson en fait un bref compte rendu.

Depuis longtemps déjà, le Réseau juridique canadien VIH/sida veille, analyse et commente les cas de poursuites pénales en lien avec le VIH/sida, comme en témoigne un rapport publié dès mars 1997, Droit criminel et VIH/sida : rapport final (PDF, 583Ko) qui examinait en détail le contexte canadien et quelques expériences étrangères.

Plus récemment, en mars 2008, il a mis en ligne une série de cinq feuillets d’information, sous le titre Le droit criminel et le VIH (PDF, 1,1Mo) qui se penchent  sur quelques points essentiels :

– La criminalisation de l’exposition au VIH : l’état actuel du droit canadien;
– Les poursuites fondées sur le Code criminel;
– La criminalisation de l’exposition au VIH est-elle logique?
– La législation sur la santé publique et la prévention du VIH;
– La criminalisation de l’exposition au VIH et les travailleurs de première ligne

Par ailleurs, il consacre une rubrique de sa Revue VIH/sida, droit et politiques à un panorama rapide de la jurisprudence liée au VIH/sida, à laquelle s’ajoutent régulièrement des articles plus approfondis, comme celui du numéro de mai 2009, intitulé Confusion et inquiétudes liées à la criminalisation : une décennie depuis l’arrêt Cuerrier (PDF, 228Ko), qui fait le point sur la criminalisation de la transmission ou de l’exposition au risque de transmission sexuelle du VIH au Canada, depuis le premier cas, en 1998, de poursuite pénale à l’encontre d’une personne séropositive pour n’avoir pas divulgué son statut à ses partenaires sexuelles.

La plupart des textes publiés par l’association sur le sujet sont réunies dans la rubrique Droit criminel du site http://www.aidslaw.ca

Suisse

En 2007, l’Aide Suisse contre le Sida réexaminait et confirmait une position prise en 2001 dans un communiqué intitulé Pénalisation de la transmission du VIH: l’essentiel en bref (PDF, 41Ko) puis rappelée à l’occasion de la conférence de Mexico, en 2008, dans un communiqué qui se concluait par « La pénalisation ne devrait s’appliquer que dans les cas de contamination délibérée et avérée, de contamination par violence, ou lorsque la contamination intervient dans le cadre d’une relation stable et durable où le partenaire a caché son statut sérologique. »

En septembre 2009, Kurt Pärli (Haute Ecole des sciences appliquées de Zurich) et Peter Mösch Payot (Haute Ecole de Lucerne), juristes, publient une étude sur la jurisprudence dans les affaires de transmissions éventuelles du VIH, sur la base du dépouillement des peines en rapport avec le VIH et le sida prononcées par les tribunaux cantonaux et le Tribunal fédéral de 1990 à 2009. (Le rapport complet est en allemand)

En suisse, on peut être poursuivi en justice pour avoir eu des relations sexuelles non protégées même si elles n’ont pas abouti à une contamination du ou de la partenaire. C’est à cette situation particulière que Raoul Gasquez, juriste au Groupe Sida Genève consacre un article dans la Revue Plaidoyer  en 2009 : Pour la dépénalisation de l’exposition au VIH (PDF, 57,4Ko).

Le 24 février 2009 et le 28 septembre 2009, deux procès de ce genre se sont conclus par des acquittements, pour des motifs différents. Le premier parce que la charge viraleCharge virale La charge virale plasmatique est le nombre de particules virales contenues dans un échantillon de sang ou autre contenant (salive, LCR, sperme..). Pour le VIH, la charge virale est utilisée comme marqueur afin de suivre la progression de la maladie et mesurer l’efficacité des traitements. Le niveau de charge virale, mais plus encore le taux de CD4, participent à la décision de traitement par les antirétroviraux. indétectable de l’accusé réduisait considérablement le risque de transmission. Le second parce que l’accusation n’a pas pu faire la preuve que le prévenu, non germanophone, avait bien compris le résultat du test qui lui avait été rendu peu avant le rapport incriminé.

Fil Rouge, le blog du Groupe Sida Genève, rend régulièrement compte de procès mettant en cause des personnes séropositives, en Suisse et ailleurs.

En novembre 2010, la Commission fédérale pour les problèmes liés au sida (CFPS) publie une Déclaration concernant la punissabilité de la transmission du VIH (PDF, 29,65 Ko) qui développe un plaidoyer en 7 points démontrant que « l’application du droit pénal qui a été faite jusqu’à présent en Suisse pour sanctionner les rapports sexuels non protégés n’est pas judicieuse ».

Royaume-Uni

Le 28 avril 2009, ce même Fil rouge évoque un sondage réalisé au Royaume-Uni auprès d’homosexuels: 57% d’entre eux soutenaient la poursuite et l’emprisonnement des personnes vivant avec le VIH après qu’ils aient contaminé de manière insouciante un partenaire sexuel.

Le numéro d’août 2005 de la Revue canadienne VIH/sida, droit et politiques consacre un article à la Criminalisation de la transmission du VIH en Angleterre et au Pays de Galles : questions juridiques et de politiques (PDF, 139Ko). Les auteurs y analysent les approches des tribunaux dans différentes affaires, étudient les notions mises en jeu (faute, tromperie, advertance, consentement) et s’interrogent sur les impacts de cette criminalisation et sur son potentiel de stigmatisation.

Le site du National Aids Manual (NAM) ne propose pas de rubrique spécifique, mais on y trouve de nombreux articles et références sur le sujet (en anglais). Le choix des mots-clés « criminal + transmission » dans la fenêtre de recherche permet d’en trouver une bonne partie. De nombreux liens internes aux articles les lient entre eux.

Le Terrence Higgins Trust (THT) quant à lui propose sur son site une rubrique comportant de nombreuses ressources (en anglais) pour informer les personnes séropositives sur le sujet : Criminal prosecutions for transmitting HIV: If you have HIV it’s important to make sure that you have a clear picture of the law. Elle peuvent notamment y télécharger le guide Prosecutions for HIV transmission: A guide for people living with HIV in England and Wales (PDF, 252Ko) publié à leur intention en mai 2009 par le National Aids Trust (NAT), qui consacre une rubrique à cette question sur son site sous le titre Criminal prosecutions.